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Quelle stratégie d’investissement pour un drone viticole ?

Selon son bassin de production et l’usage souhaité, investir dans un drone peut être plus ou moins rentable. Le recours à la prestation de service, à la location ou à l’investissement en Cuma sont d’autres options envisageables.

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L'acquisition d'un drone de pulvérisation ira de pair avec celle d'un petit utilitaire de type Citroën Jumpy.
© C. Nadaillac

Un drone ? Oui, mais dans quelles conditions est-ce jouable financièrement parlant ? C’est ce que nous avons voulu découvrir. Comme pour de nombreux outils, la réponse à cette question diffère selon le type de drone (capteur ou porteur) ainsi que selon les bassins et les configurations du parcellaire.

Ainsi, en Bourgogne, pour les traitements, Thomas Gouroux, conseiller viticole à la chambre d’agriculture de Côte-d’Or, estime qu’un investissement en propre n’est pas rentable. « Un drone de pulvérisation revient cher, entre l’achat de l’appareil et la formation de télépilote, introduit-il. Le dernier DJI de 70 l sera entre 50 000 et 60 000 euros, et la formation coûte dans les 10 000 euros. C’est un budget conséquent pour une exploitation. » Il juge que la prestation est plus intéressante. À titre d’exemple, l’entreprise Agribio Drone, qui propose des prestations de services par drone sur tout le territoire national, facture entre 180 et 250 euros par hectare, hors frais de déplacement. « Ces tarifs varient selon la topographie et le morcellement du parcellaire », explicite Augustin Navarranne, le directeur associé de l’entreprise.

Ne pas sous-estimer l’aspect administratif

Mais pour Thomas Gouroux, l’argument financier n’est pas le seul à plaider en faveur de la prestation. L’aspect administratif compte aussi pour beaucoup. « Pour chaque vol, il faut une autorisation, plante-t-il. Les prestataires en réalisent tous les jours, ils savent comment s’y prendre. Mais un viticulteur y perdrait beaucoup de temps. » Et de fait. « L’utilisation en extérieur d’engins volants, même lorsqu’ils sont de petite taille, qu’ils ne transportent personne à leur bord et qu’ils sont utilisés à basse hauteur, est considérée comme une activité aérienne et relève donc de la réglementation applicable à l’aviation civile », mentionne la direction générale de l’aviation civile (DGAC). À ce titre, dès qu’ils dépassent un certain poids, ils sont soumis à une autorisation de vol. Par ailleurs, Augustin Navarranne précise que l’utilisateur doit disposer d’une analyse de risque Sora(1) pour un appareil pesant plus de 25 kg et d’un manuel, en plus du certificat de télépilote. Derniers points en faveur de la prestation : la faible utilisation sur l’année (trois mois par an) et la rapide obsolescence des drones. « Tous les deux ans ou deux ans et demi, les drones doivent être changés, confirme Augustin Navarranne. Ils sont dépassés, les batteries de remplacement ne sont plus fabriquées, etc. »

La formation au brevet de télépilote est finançable

De son côté, même s’il préconise de démarrer par de la prestation de service pour bien cerner le fonctionnement de ce type d’appareil et les modalités de déplacement les plus adaptées, Adel Bakache, conseiller en agroéquipement à la chambre d’agriculture de la Gironde, considère que dans son département, dès la parution de l’arrêté l’autorisant, l’investissement dans un drone de traitement sera « dans tous les cas rentable ». En effet, selon lui, ce type d’engin vaut dans les 15 000 à 25 000 euros, « soit l’équivalent d’un pulvérisateur classique, explique-t-il, pour un rendement à l’heure meilleur. On peut aller jusqu’à trois fois plus vite qu’avec un pulvérisateur ; 5 hectares sont traités en une heure, une heure et demie. Et cela, avec des résultats qualitatifs vraiment comparables au moins jusqu’à mi-mai, fin mai. En outre, le drone ne tasse pas les sols et on s’expose moins, notamment en configuration de pente»

Il ajoute qu’il est possible d’obtenir des financements pour le brevet de télépilotage, via le compte professionnel de formation (CPF), des aides de la région ou autre. Vivéa confirme financer ce type de formation. « Depuis 2017 nous avons eu au moins 12 formations réalisées », précise Émilie Jenouvrier, responsable communication de l’organisme. Même son de cloche du côté d’Ocapiat, qui prend en charge une partie de la formation (montant maximum net de 750 € HT par stagiaire et par dossier). En 2025, sept salariés ont ainsi été ainsi formés au télépilotage de drone via le dispositif Boost Compétences, fait savoir l’organisme.

Des prestataires proposent des packs tout compris

Pour ce qui est des drones de cartographie multispectrale, Thomas Gouroux indique que ces solutions sont majoritairement distribuées par des entreprises ne souhaitant pas commercialiser l’appareil, mais proposer la prestation. « Des distributeurs proposent des packs où tout est compris, décrit-il. Vous avez deux vols de drone dans la saison, plus la cartographie, plus les conseils en saison, etc. » En outre, Adel Bakache est réservé sur l’intérêt même d’investir dans de tels drones. « Ils fonctionnent avec le NDVI pour la vigueur et cela marche bien, mais une fois qu’on a les informations, qu’en fait-on derrière ?, interroge-t-il. Comment en déduit-on une modulation de la dose d’épandage » Même questionnement pour les manquants. « La solution fonctionne, permet de connaître le nombre de complants nécessaire et leur localisation, résume-t-il. Mais à part cela, quel est l’apport ? » Dans la pratique, peu de domaines y trouvent un intérêt, même en prestation, comme en témoigne Augustin Navarranne : « cela coûte trop cher par rapport à un comptage manuel qui emploie la main-d’œuvre du domaine en morte-saison ».

La mutualisation, une voie d’investissement intéressante

L’achat d’un drone en Cuma peut paraître compliqué du fait de la formation nécessaire du télépilote. « Cela implique d’avoir un salarié en GIE », pointe Thomas Gouroux. Mais dans la pratique, cela ne semble pas être un frein. Une Cuma du Lot-et-Garonne a par exemple investi dans un drone, en partenariat avec le lycée agricole du département. Thibault Chakrida, conseiller en agroéquipement à la Fédération des Cuma de Gironde et du Lot-et-Garonne considère que la Cuma est adaptée pour ce type d’investissement car il s’agit d’un équipement onéreux, employé peu de jours par an. Il confirme en revanche qu’il faut réfléchir en amont au volet formation des utilisateurs. Dans le cas de la Cuma du Lot-et-Garonne, le lycée agricole a formé deux pilotes grâce à une prise en charge de la MSA, et réalise les prestations pour la Cuma. « Il vaut mieux avoir un ou deux pilotes attitrés. Il y a pas mal de réglages à faire, ce n’est pas à mettre dans les mains de tout le monde », témoigne-t-il.

Enfin, la location est pratiquée par endroits, comme en Gironde, et peut être une option intéressante. « Les entreprises que je connais qui proposent cela prodiguent en plus une formation à l’appareil », observe Adel Bakache. Cela permet en outre de toujours voler avec un modèle récent et bien entretenu.

Hormis l’achat du drone, il faut songer à s’équiper d’un groupe électrogène pour charger les batteries à la vigne. « Autrement, il faut l’équivalent d’une vingtaine de batteries pour tenir la journée, souligne Augustin Navarranne, ce qui représente un budget de 30 000 euros. » Investir dans une petite cuve mélangeuse et dans une camionnette pour emporter le drone sur les parcelles est également nécessaire. « Un Renault Kangoo ou un petit utilitaire peut faire l’affaire », conclut Adel Bakache.

(1) Specific Operations Risk Assessment : méthode d’évaluation des risques pour les opérations de drones spécifiques

FAQ

En cas de problème lors d’une prestation de service par drone, qui est responsable ?

La responsabilité est celle de l’employeur, c’est-à-dire celle de l’exploitant.

Lors de la prestation de service, qui doit posséder un Certiphyto ?

Tant l’opérateur maniant le drone que le préparateur de la bouillie doivent disposer de leur Certiphyto. L’entreprise de prestation doit en outre posséder un agrément.

Sera-t-il possible de traiter de nuit au drone ?

Pour l’instant non. « Mais nous essayons d’obtenir une dérogation », dévoile Augustin Navarranne.

Faut-il demander l’autorisation du propriétaire pour voler au-dessus d’une parcelle que l’on a en fermage ?

Non, assure Thomas Gouroux. « Il n’y a que pour les opérations d’arrachage et replantation que l’autorisation du propriétaire est nécessaire », contextualise-t-il.

Quid de l’assurance ?

Un drone est assurable au même titre qu’un autre engin agricole.

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