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Les pulvérisateurs viticoles à panneaux récupérateurs testés par la maison Hennessy

La maison de cognac Hennessy a évalué cinq pulvérisateurs à panneaux récupérateurs via le suivi de sept viticulteurs partenaires. En voici les principaux enseignements.

Les pulvérisateurs à panneaux récupérateurs suscitent l'intérêt.
© A. Davy

Au sein du service R & D d’Hennessy, tout le monde en est convaincu : les pulvérisateurs confinés sont une bonne solution environnementale. Et cette assertion ne sort pas de nulle part ; elle est étayée par de nombreux essais menés par le groupe. De 2012 à 2014, le service R & D d’Hennessy a en effet testé l’utilisation de pulvérisateurs à panneaux récupérateurs, en vue de réduire la dérive. « Nous avons comparé l’efficacité biologique du traitement avec ce matériel, à celle obtenue avec un pulvérisateur classique », explique Mathilde Boisseau, responsable du domaine expérimental de La Bataille.

Le suivi de l’évolution de la concentration de la bouillie au fil du traitement, ainsi que l’évaluation des temps de travaux étaient également à l’ordre du jour. Une deuxième phase de tests s’est déroulée en 2015, avec le suivi de sept viticulteurs partenaires, récemment équipés de pulvérisateurs confinés. Et tous les résultats concordent : ces appareils sont une bonne voie pour réduire l’IFT sans prise de risque, et limiter la dérive et donc les soucis avec les riverains.

Une économie d’environ 126 euros par hectare de fongicides

Sur le domaine de La Bataille, Mathilde Boisseau s’est équipée de l’Arcobaleno de Bertoni, qui était alors le pulvérisateur du marché convenant le mieux aux contraintes du domaine, à savoir un parcellaire très morcelé, avec quelques pentes. Il a très vite été rejoint par quatre autres appareils, pour pouvoir ainsi couvrir les 160 hectares du domaine. « Nous avons pu valider le fait que le niveau de protection de la vigne est similaire avec les panneaux ou une pulvérisation classique, témoigne-t-elle. De plus, c’est un levier très efficace pour diminuer l’IFT, puisque sur la saison, nous économisons entre 30 et 35 % de bouillie. Cela nous permet de gagner 3 à 4 points d’IFT selon l’année. » Autre acquis : en vigne large (trois mètres), la maniabilité de ces engins est satisfaisante. « Les chauffeurs avaient une appréhension au départ, note Mathilde Boisseau. Mais à présent, ils ne reviendraient pas en arrière, car cela leur a permis de monter en compétence (gestion d’un DPAE, des buses, etc). »

De même, le poids du matériel n’est pas un obstacle dans les terres argileuses, dans un contexte d’enherbement un rang sur deux. « Ce type de pulvérisateur n’est pas plus contraignant pour la ré-entrée qu’un appareil classique », rapporte-t-elle, en pointant que cela assouplit plutôt les conditions d’utilisation en proximité d’habitations ou sites sensibles. Par ailleurs, contrairement à ce que l’on pouvait craindre, la concentration de la bouillie n’évolue pas significativement au cours du traitement, du fait de la récupération. Il n’y a pas de phytotoxicité constatée liée à un changement de la concentration, ni de dérive d’efficacité induite par une dilution.

Dhugues, Friuli, Bertoni, Grégoire et Lipco passés au gril

Forte de ce constat, et avant de préconiser un déploiement de la technologie, la Maison a évalué cinq marques de panneaux et trois technologies chez des viticulteurs partenaires, qui venaient de s’équiper : le jet porté avec le Koleos de Dhugues, le Drift recovery slim de Friuli et l’Arcobaleno de Bertoni, le pneumatique avec le Speed flow de Gregoire, et le jet projeté avec le GSG-NV2 de Lipco. À chaque fois, une modalité a été traitée avec l’appareil confiné, une autre, avec un pulvérisateur classique non confiné. Et ce, avec des calendriers de traitement identiques. En revanche, les modes d’utilisation des matériels ont été laissés libres : réglages, ouverture ou non des buses, vitesses, débits, etc.

« Les raisonnements sont vraiment très différents d’un livreur à l’autre », constate Mickaël Anneraud. Il a dégagé trois stratégies. La première consiste à ne diminuer la dose qu’avec la récupération de la bouillie : les buses sont toutes ouvertes durant toute la campagne, et la concentration de la bouillie n’est pas modulée. La seconde cumule la récupération de la bouillie à la modulation du nombre de buses employées. La troisième allie la récupération de bouillie, à la réduction de sa concentration. Pour ce faire, le vigneron suivait notamment le programme Optidose. « Au final, la modalité la plus intéressante est la dernière, rapporte Mickaël Anneraud. Elle a permis, en 2015 et chez un viticulteur assumant une prise de risque plus importante, de réduire de 68 % la dose employée sur la saison, contre 40 % pour la stratégie 2 et 35 % pour la stratégie 1. Néanmoins, elle implique un niveau de prise de risque supérieur. Mais aucune différence n’a été constatée en termes de rendement. » Au niveau du taux de récupération, les résultats sont à peu près similaires pour toutes les modalités et sont de l’ordre de 35 %. Soit une économie d’environ 126 euros par hectare de fongicides. Sur l’ensemble du panel, l’IFT fongicide s’est avéré inférieur de plusieurs points à l’IFT moyen du département : selon les modalités, il était de 5,06 à 9,60, contre 14,70 pour les Charentes. Un très bon score.

Une vitesse moyenne de passage de l’ordre de 7,6 km/h

Au niveau pratique, les viticulteurs ont estimé que ce type d’appareil n’est pas plus difficile à conduire qu’une écimeuse deux rangs complets. De plus, la vitesse de travail a varié de 6,6 à 8,5 km/h selon les viticulteurs et la configuration des vignobles, avec une moyenne de 7,6 km/h. Néanmoins, avec un traitement de deux rangs complets par passage, les débits de chantiers sont moindres qu’avec un pulvérisateur classique en trois rangs complets. De même, le temps de nettoyage est plus important sur les pulvérisateurs confinés, de 15 à 20 %. « Et on nettoie différemment, souligne Mathilde Boisseau. Les produits sont davantage collés. »

Pour ce qui est des matériels, tous ont permis une bonne qualité de traitement. Néanmoins, l’équipe a constaté des différences au niveau de la robustesse. Par ailleurs, certains appareils n’étaient pas tout à fait au point. « Il y avait des manchons mal fixés, par exemple, relève Mickaël Anneraud. Mais depuis, les constructeurs ont procédé à des améliorations. » De même, certains systèmes de ventilation gagneraient à être améliorés.

Le dernier point noir de ces équipements est bien évidemment le budget. Mais l’équipe d’Hennessy souligne que la différence d’investissement entre un pulvérisateur confiné et un classique est limitée par les économies d’intrants réalisées. De plus, c’est un achat éligible aux aides du PCAE (plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles).

 

D’autres pistes pour réduire les phytos

Le service R & D d’Hennessy va tester d’autres solutions afin d’améliorer l’empreinte environnementale. En pulvérisation, il s’oriente vers l’expérimentation de l’eau ozonée ou électrolysée, ou de capteurs pour mieux cibler la végétation et affiner le volume de bouillie. Les SDN et les buses sont deux autres voies envisagées.

Au niveau du désherbage, la Maison s’intéresse au Grass Killer de Caffini, à l’eau chaude sous pression d’HydroFrance ou encore à la mousse chaude de Spezia.

Affiner le choix des buses en jet porté

La prochaine étape, pour Hennessy, est d’affiner ses préconisations en termes de buses pour les panneaux récupérateurs à jet porté. « Nous nous orientons vers des buses limitant la dérive en début de campagne, explique Mickaël Anneraud. Puis vers des buses plus fines sur la zone fructifère, de la préfloraison à la fin de la saison. » Cela signifie donc opter pour des buses anti-dérive en haut et au début de la saison. Ce qui a quelques inconvénients, ce type de buses se colmatant facilement. « Mais il est possible d’y remédier, en ajoutant un système adapté de préfiltration », note Mathilde Boisseau. Mais avant la réalisation de règles de décision pour le changement des buses et leur orientation, l’équipe souhaite comparer le panachage à des classiques, pour évaluer le gain, si gain il y a, en termes d’efficacité.

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