Aller au contenu principal

Maladies du bois : pas d’impact des contaminations en pépinière viticole ?

Les dépérissements de la vigne au champ ne seraient pas corrélés aux contaminations des plants en pépinière. C’est du moins ce qui ressort des essais d’Olivier Yobrégat, ingénieur à l’IFV.

Le greffage ne jouerait pas un rôle important dans les contaminations des plants par les champignons responsables des maladies du bois.
Le greffage ne jouerait pas un rôle important dans les contaminations des plants par les champignons responsables des maladies du bois.
© Réussir SA

Et si l’explosion des maladies du bois dans les vignes était décorrélée du travail en pépinière ? C’est la question pour le moins troublante que soulèvent des essais réalisés à l’IFV. Leurs résultats vont en effet à l’encontre du présupposé que les dépérissements sont provoqués par les champignons présents sur les plants dès le départ. « Tout est parti du fait que je souhaitais quantifier le rôle de l’inoculum de départ dans les contaminations de la vigne », introduit Olivier Yobrégat, ampélographe et ingénieur à l’IFV. Pour ce faire, en 2013, il a planté une parcelle expérimentale de sauvignon, greffé sur 110 R. Avec d’un côté, des greffages ligneux traditionnels et de l’autre des greffages de boutures herbacées. Ces derniers étaient totalement exempts de champignons, que ce soit sur les tissus internes ou externes. « On ne peut jamais désinfecter aussi bien que ça en pépinière », assure le chercheur.

À l’inverse, 77 % des plants issus de greffages classiques, dits ligneux, présentaient des Botryosphaeriaceae dans leurs tissus internes ou leur écorce. Une fois la parcelle établie, le chercheur a réalisé de nombreux prélèvements tous les ans, afin de suivre l’évolution des contaminations et l’apparition des dépérissements sur les ceps. Et surprise : au bout de trois ans, 80 % des ceps avaient des Botryosphaeriaceae à l’intérieur des tissus, qu’ils soient issus de greffage traditionnel ou de bouture herbacée !

Une apparition des symptômes similaire sur les deux groupes

Et cela va même plus loin. En 2017, Olivier Yobrégat a relevé le premier cas d’esca, sur un pied… issu de greffage herbacé ! Entre 2017 et 2021, le suivi des symptômes a mis en évidence une évolution similaire, quel que soit le groupe.

Maladies du bois : pas d’impact des contaminations en pépinière viticole ?

En effet, en 2019, 1,09 % des pieds exprimaient des symptômes, que ce soit dans le groupe traditionnel (dit groupe témoin) ou le groupe bouture herbacée (GBH). La sévérité des symptômes était légèrement supérieure dans le groupe herbacé, avec une note moyenne de 5,2/10, contre 5/10 dans le groupe témoin. En 2020, le chercheur a relevé 34 souches exprimant de l’esca ; 4,37 % du groupe herbacé présentant des symptômes contre 5,46 % dans le groupe témoin. La sévérité est là aussi très similaire : 5,3/10 pour le GBH et 4,4 pour le témoin.

Quid de l’intérêt de la désinfection en pépinière ?

En 2021, 11,66 % des pieds avec bouture herbacée exprimaient des symptômes de maladie du bois, contre 12,57 % dans le groupe témoin. Avec des sévérités de 5,70/10 pour les GBH contre 5,96/10 pour le témoin. « Les trajectoires dans les deux modalités sont identiques, confirme Olivier Yobrégat. Après huit ans, il n’y a pas de différence d’expression des symptômes dans les deux lots, et on a assisté à des contaminations massives et très rapides par des Botryosphaeriaceae, presque exclusivement par les espèces Diplodia et Neofusicoccum. » Pour aller plus loin, le chercheur aimerait s’intéresser aux autres champignons impliqués dans l’apparition de l’esca et approfondir le rôle joué par l’inoculum de départ. Il a donc planté une nouvelle parcelle en 2020. Il a pour chaque plant procédé à une caractérisation moléculaire génétique. « Mais il y a une très grande variabilité, prévient-il. Je ne sais pas ce que cela va donner. » Quoi qu’il en soit, ses résultats posent la question de l’intérêt de la désinfection en pépinière.

voir plus loin

Des essais sur les différents types de greffage (oméga, anglaise, mortaise, en fente) sont également menés par l’IFV, au Grau du Roi, dans le Gard. « Les lots ne sont pas assez conséquents pour que l’on puisse en tirer un véritable enseignement, rapporte Laurent Audeguin, directeur du pôle national matériel végétal de l’IFV. Il faudrait davantage de plants et des répétitions. Mais pour le moment, il n’y a pas de différence selon le type de greffage. » Des propos confirmés par Olivier Yobrégat qui estime que d’un point de vue sanitaire, le secret d’une bonne greffe réside dans l’adéquation des diamètres du greffon et du porte-greffe et dans la continuité des cambiums. « Nous avons plusieurs parcelles avec plein de types de greffes, et même des greffes à plat, avec un cure-dent pour faire tenir les deux bois, décrit-il. Tout pousse très bien. Nous n’avons pas établi de lien entre le type de greffe et les dépérissements. »

Les plus lus

Prix des vignes 2024 : quelle évolution par région ?

La Safer a livré son bilan 2024 du prix des terres viticoles. La tendance générale est à la baisse des prix mais le nombre de…

<em class="placeholder">Vignoble expérimental en Italie avec essai sur les hydrorétenteurs.</em>
Les hydrorétenteurs préparent leur grand retour dans les vignes

Une nouvelle génération de polymères super-absorbants issus de matériaux biologiques est en train de naître. Un espoir pour…

Vignes en Entre-deux-Mers
Prix des vignes 2024 : la baisse se généralise

Le mouvement de baisse des prix moyens à l’hectare entamé en 2022 se poursuit en 2023, selon le bilan Prix des Terres 2024 de…

<em class="placeholder">Thomas Saleilles produit désormais, en plus du raisin, du jus et des plants de grenade.</em>
Diversification viticole dans le Gard : « Je suis heureux des revenus complémentaires que m’apporte la grenade »

Facilement compatible avec l’activité viticole, la grenade demande peu d’interventions. Rencontre avec Thomas Saleilles, dans…

<em class="placeholder">Vigne abandonnée à Saint-Gervais dans le Gard.</em>
Vignes abandonnées : un nouveau dispositif législatif plus dissuasif pour les friches viticoles

La pression économique et sanitaire renforce encore le sentiment d’urgence à endiguer l’essor des friches viticoles. Un…

<em class="placeholder">Tracteur Same Frutteto Pro</em>
Same - L’autoguidage sans GPS sur les Frutteto Pro
Le constructeur italien Same lance les tracteurs spécialisés Frutteto Pro toute équipée.
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole