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Une productivité de 1 200 agneaux en trois semaines

Josette et Jean-Jacques Mathieu élèvent 1 000 brebis et 70 vaches allaitantes sur 236 hectares d’herbe. Leur technicité leur permet une productivité élevée en valorisant les prairies.

Au Gaec Bois de Ville, Josette Mathieu et son fils Jean-Jacques font naître 1 200 agneaux en trois semaines à Outrémecourt, en Haute-Marne. Pendant les agnelages, il y a du monde en permanence à la bergerie. « L’an dernier, on a même pris quelqu’un pour rester la nuit » se souviennent les éleveurs. Une caméra, installée sur tout un côté du bâtiment permet de continuer à surveiller les mises bas en leur absence, notamment pendant la pause déjeuner. « Il y a toujours des brebis avec des agneaux qui se présentent mal et qu’il faut aider à agneler. Et puis, les Suffolk, s’ils sont bien adaptés à la conduite en plein air, ne sont pas très vifs à la naissance, il faut quasi systématiquement les aider à téter ». Ainsi, pendant les agnelages, une personne est exclusivement dédiée à cette tâche. Elle passe près de 16 heures par jour rien qu’à faire téter.

L’exploitation, fondée en 1982 par Josette et son mari Philippe, a bien évolué jusqu’à une SAU de 236 ha (à 100 % en herbe) et 1 000 brebis. En 2014, l’opportunité de reprendre une exploitation voisine permet l’installation de leur fils, jusqu’à présent aide-familial. C’est alors une troupe bovine de 40 puis 70 vaches allaitantes qui viennent compléter le cheptel ovin. « On était arrivé à la limite de ce qu’on pouvait faire en ovin. Au-delà, ça aurait représenté trop de travail, ou alors il aurait fallu totalement revoir le système. Les bovins permettent de diversifier les sources de revenus et donc d’être moins sensible aux aléas. Le fait de travailler avec une autre espèce limite aussi les problèmes sanitaires. Et les deux productions sont complémentaires sur le plan du travail. Nous sommes en système naisseur avec des vêlages en début automne sur les bovins tandis que nos agnelages ont lieu en février. Et il y a assurément d’autres complémentarités à aller chercher notamment au niveau de la valorisation de l’herbe, en mettant des agnelles ou des béliers avec des vaches ».

Des cases d’agnelages qui se déplacent dans le bâtiment

Pour les agnelages, des lots de 40 brebis sont constitués. Les brebis encore gestantes sont repoussées d’un côté du bâtiment pour libérer de la place dans une travée et y passer au fur et à mesure les brebis qui ont mis bas en montant les cases d’agnelages. Celles-ci vont donc se déplacer dans le bâtiment au rythme des nouvelles mises bas, ce qui permet de ne pas les installer toujours au même endroit et de limiter ainsi les problèmes sanitaires. Les agneaux sont identifiés dès la naissance. Les résultats de reproduction sont très bons avec 182 % de prolificité et 13 % seulement de mortalité agneaux. La productivité numérique est de 150 %, soit 30,3 kilos carcasse d’agneaux par brebis, ce qui est nettement au-dessus de la moyenne de la région Grand Est, à 23 kilos.

Les agneaux sortent avec les brebis deux mois après la mise bas. Ils sont sevrés mi-juin et reçoivent un aliment complet à volonté depuis l’âge de trois semaines jusqu’à leur vente. Au total, la consommation de concentré est de 143 kilos par couple mère-agneau, soit 7 kilos par kilo de carcasse d’agneau produit. Les agneaux sont vendus de mai à septembre avec les trois quarts en juin, à un poids carcasse moyen de 20,2 kilos. Ils sont triés tous les dimanches pour partir à l’abattoir le lundi. Ce sont des agneaux qui poussent vite et une majorité part avant le sevrage. Une centaine est rentrée pour être finie trois semaines en bâtiment. Ils sont en majorité commercialisés auprès du groupement Feder et quelques animaux sont écoulés en circuit court auprès d’un boucher. Le prix de vente moyen des agneaux de boucherie est de 6,8 euros par kilo. 15 % des agneaux partent en reproducteurs, mâles et femelles. Leur prix est de 250 euros pour un mâle vendu en juin génotypés double ARR.

Mises à la reproduction tardivement pour avoir de gros gabarits

Les agnelles de renouvellement, à l’herbe, ne reçoivent aucune complémentation après le sevrage. Elles consomment du foin et 450 g de concentré le premier hiver, en bergerie, et ne seront mises à la reproduction que la deuxième année. « Nous souhaitons avoir des brebis avec du gabarit ». Les Antenaises sont croisées avec des béliers berrichons pour donner des agneaux un peu plus vigoureux. Les brebis quant à elles reçoivent, avant l’agnelage, du foin et 500 à 800 g d’un aliment complet. « Avant, nous donnions des céréales, mais nous avons moins d’avortements depuis que nous donnons un aliment complet spécial préparation à la mise bas de chez Sanders. » Après l’agnelage, le foin est donné en deux distributions et l’aliment complet monte à 1,1 kilo. L’alimentation est distribuée à la dérouleuse, et au télescopique avec godet distributeur. Nous réalisons un flushing de trois semaines avant la lutte sur les regains et nous leur ajoutons 30 g de minéraux par jour pendant un mois. En janvier, elles sont tondues pour mieux préparer la mise bas.

« Pour la gestion du sanitaire, je voulais un vétérinaire qui soit disponible comme je débutais, rapporte Jean-Jacques Mathieu. Pour une cotisation de deux euros par brebis, je suis suivi toute l’année par un vétérinaire ovin qui peut répondre à toutes mes questions et se déplace une à deux fois par semaine pendant l'agnelage. »

avis d'expert

"Une mécanisation et des concentrés qui pèsent sur les résultats"

« Sur cette exploitation, le kilo de carcasse d’agneau coûte 10,60 euros à produire, ce qui est plus élevé que la moyenne des exploitations suivies dans le Grand Est, à 10,10 euros. La mécanisation est le principal poste en cause, avec des amortissements et des frais d’entretien un peu élevés. L’autre point faible de l’exploitation ce sont les frais de concentrés qui sont un peu élevés. Les éleveurs veulent essayer de faire plus de prairies temporaires pour diminuer la distribution d’aliment quand les brebis sont avec les agneaux. Mais il faudrait pour cela retrouver plus de terrain car aujourd’hui, seuls 15 hectares sont retournables, le reste étant en prairie permanente. Au niveau du produit, le volume d’aide ramené au kilo d’agneaux produit est inférieur à la moyenne du fait de la bonne productivité pondérale qui dilue les aides. 1,5 UMO est affectée à l’atelier ovin. La productivité de la main-d’œuvre à 13 600 kg carcasse d’agneaux par UMO est par contre très correcte grâce aux bons résultats techniques. Au final, le prix de revient, auquel il leur faudrait vendre l’agneau pour pouvoir se rémunérer 1,5 Smic par UMO, est de 7,2 euros par kilo. Or, le prix moyen auquel ils vendent leurs agneaux est aujourd’hui de 6,8 euros. Ils n’atteignent donc par pour le moment ce niveau de rémunération. »

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