À Lorquin, en Moselle
Une gestion économe pour dégager du revenu
Issu d’une famille de moutonniers et passionné de génétique, Franck Van Haaren élève moutons et chevaux en valorisant l’herbe au maximum.
« Dans la famille, nous avons 50 ans d’expérience dans l’élevage ovin, s’enorgueillit Franck Van Haaren. Mes parents avaient des moutons et j’ai toujours su que je voulais faire ça. » Il reprend en 2001 une partie de leur exploitation avec 350 brebis sur 45 hectares. « J’ai poursuivi le système de mes parents, en y apportant quelques évolutions mais sans rien inventer de neuf. » Il augmente progressivement la troupe, au gré des terrains qui se libèrent et élève aujourd’hui 830 brebis sur 110 hectares, intégralement en prairies permanentes. « Mes frères sont aussi éleveurs nous avons 2 300 brebis à nous trois ! » En 2014, il commence à faire de la sélection avec l’achat de 50 agnelles inscrites Suffolk et 80 Texel puis, en janvier dernier, 60 charmoises. « Ce qui me motive, ce ne sont pas les concours ou les prix mais le plaisir de voir de bons animaux quand je me lève le matin », explique ce passionné de génétique.
Rentrer les brebis le moins de temps possible
Le reste de la troupe est composé de 640 brebis à dominante Texel. Les 200 meilleures sont triées pour être mises en lutte avec les meilleurs béliers et mettent bas mi-mars pour produire les agnelles de renouvellement. Les plus gros de la troupe (440 brebis dont 125 agnelles) est mis en lutte en décembre. Les béliers sont laissés trois semaines avec les brebis mais les brebis saillies sont triées chaque semaine grâce au tablier marqueur porté par les béliers. Cela permet de les rentrer le moins de temps possible en bâtiment au moment des mises bas en mai. Tout ce qui n’a pas fait d’agneau au printemps est épongé pour être remis en lutte et faire agneau pour la fin d’année. Ce lot est échographié pour trier les vides et ne pas les nourrir pour rien. Les brebis sont rentrées en bergerie un mois avant la mise bas, tondues, vaccinées contre l’arthrite, l’entérotoxémie, le tétanos et complémentées jusqu’à l’agnelage : foin à volonté, 500 g de maïs grain et 500 g de bouchons de luzerne. Elles ressortent le plus vite possible après l’agnelage : un mois après pour les mises bas de mars mais seulement quelques jours pour les mises bas de mai.
L’objectif est de finir tous les agneaux, ou le plus possible, à l’herbe. Le sevrage intervient vers quatre mois. Ils sont ensuite finis à l’herbe tout en étant complémentés au nourrisseur. Les derniers agneaux sont rentrés début novembre pour être finis en bergerie mais il en reste généralement très peu. Ainsi, en 2014, les derniers ont été vendus au 15 octobre et la consommation de concentré moyenne n’a été que de 45 kilos par brebis pour le couple mère-agneau. Mais, en 2015, les conditions climatiques et de pousse de l’herbe ont obligé à finir 200 agneaux sur 700 en bergerie et ce sont 95 kilos de concentré qui ont été consommés en moyenne. Au moment des départs, les agneaux sont pesés tous les quinze jours, triés et marqués. En 2014, ils sont partis à un poids moyen de 19,5 kilos de carcasse pour un prix moyen de 116 euros. La mortalité agneau n’est que de 8 %, mais l’exploitation est confrontée à des problèmes de vols qui peuvent représenter des pertes allant jusqu’à 10 % d’agneaux.
Pâturage et fauche sont conduits de front
En 2015, une quinzaine de jeunes béliers Suffolk inscrits ont été vendus ainsi que quelques Texel. L’éleveur a aussi vendu pour la reproduction150 agnelles de renouvellement issues de sa troupe non inscrite. Les agnelles de renouvellement passent l’hiver dehors, dans des parcelles attenantes au bâtiment, tout en étant complémentées en bâtiment avec 750 g de mélange maïs-luzerne. Cette complémentation permet aussi d’avoir des animaux moins sauvages, habitués à venir à l’auge tous les jours, et permet qu’elles finissent leur croissance dans de bonnes conditions et souffrent moins à l’agnelage. Le taux de réforme de 12 % est assez bas. « Quand on soigne bien ses bêtes, elles vieillissent bien. C’est aussi un poste d’économie. Car le premier euro gagné, c’est l’euro qui n’est pas dépensé », estime Franck Van Haaren.
La gestion de l’herbe est aussi importante pour expliquer les bons résultats. L’éleveur a opté pour une conduite extensive avec un chargement limité (1,15 UGB/Ha) qui permet de mener pâturage et fauche de front sur les mêmes parcelles sur l’ensemble de l’exploitation. L’ensemble du parcellaire est déprimé et l’éleveur passe faucher les parcelles après le passage des moutons. Le déprimage diminue le rendement des prairies mais augmente leur qualité. La fauche se fait à partir de juin. C’est un chantier assez gourmand en temps du fait du passage sur les 110 hectares de l’exploitation. Les brebis restent sur les mêmes parcelles jusqu’au sevrage à l’automne. Le chargement limité et des traitements réguliers permettent d’éviter le parasitisme. Les bâtiments récupérés à son installation sont restés globalement en état et l’alimentation et le paillage sont réalisés à la main. S’il est seul sur l’exploitation, Franck Van Haaren prend parfois des stagiaires et l’aide d’un éleveur proche de la retraite 2 à 3 heures par jour l’été quand il a des chantiers plus difficiles à faire seul comme les clôtures.
Le premier euro gagné, c’est celui qui n’est pas dépensé
Des chevaux, complémentaires des brebis
Franck Van Haaren élève conjointement aux ovins des chevaux de courses. Il a cinq poulinières en propre et trois qu’il garde en pension, ainsi que leurs suites et attend la naissance de sept poulains au printemps. Il entraîne aussi des chevaux, à certaines périodes de l’année, ce qui représente en phase d’entraînement un travail de deux heures par jour. Les mois de mars, avril et mai peuvent donc être bien chargés entre les poulinage et les déplacements parfois assez loin pour aller faire saillir les juments. « Ma motivation première, c’est la passion de l’élevage et des courses. Mais il est vrai que chevaux et ovins peuvent être complémentaires pour l’utilisation de l’herbe. Les chevaux mangent les tiges hautes plus ligneuses que les moutons ne veulent pas manger. Et les moutons mangent facilement les repousses de trèfle dans les coins de parcelles où les chevaux ont déféqué et qu’ils ne veulent pas toucher. »