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Dossier spécial
Les mesures contre la sécheresse

Nicolas Sarkozy a annoncé de nouvelles mesures contre la sécheresse. Le point sur ce qui est mis en place.

© CE

En fin de semaine dernière, la présidente de Région, Ségolène Royal avait estimé que le gouvernement « gérait très mal » la sécheresse. La réplique de l’Elysée ne s’est fait pas attendre et quatre jours plus tard Nicolas Sarkozy est venu en Charente le 9 juin et Ségolène Royal a dû s’inviter… elle-même à la table ronde consacrée à la sécheresse, organisée dans le gymnase de La Rochefoucauld. Ce sera la seule passe d’arme entre les deux ex-candidats de la dernière (prochaine ?) présidentielle, puisqu’en fin de réunion, Nicolas Sarkozy a offert la parole à la présidente de Région. Elle en a profité pour faire des propositions, qui ont suivi celles annoncées par le chef de l’Etat. Mesures égrenées au fur et à mesure de la table ronde, animée par le président de la Chambre d’agriculture, Alain Lebret. Celui-ci a commencé par dresser un tableau du département, largement fragilisé par la sécheresse. « Comment allez-vous mettre en œuvre la solidarité nationale ? » a-t-il interpellé le chef de l’Etat. « Travaillons la main dans la main, lui a répondu Nicolas Sarkozy, la souffrance de nos éleveurs n’est pas un sujet politicien, mais un problème structurel et conjoncturel, auquel il convient tout d’abord de répondre par un premier plan logistique ». Celui-ci s’est d’abord soldé par la création d’une cellule de crise au sein du ministère chargé des Transports, en lien avec la SNCF pour répondre aux besoins de transport de paille. « Dès la semaine prochaine, une réunion, associant également le ministère de la Défense et de l’Agriculture est prévue » pour mettre au point ce plan logistique.

Transport logistique de la paille

Pour répondre à une question de Patrick Soury, éleveur ovin présent à la table ronde au titre de la Chambre d’agriculture et de FNSEA 16, concernant justement ce dispositif de transport de paille, la ministre de l’Ecologie et des Transports, Nathalie Kosciuko-Morizet a précisé que « transporter un million de tonnes de paille demande un savoir-faire », ne serait-ce que pour « identifier les sillons », trouver « 300 wagons disponibles », « les bâcher pour éviter tout risque » (incendie, vandalisme...) et rechercher « des bénévoles pour charger et décharger les wagons ». C’est dans ce cadre-là qu’une aide de « l’armée serait la bienvenue », n’a-t-elle pas caché.

Mais, bien conscient que « la situation actuelle ne peut être acceptée », le chef de l’Etat a annoncé le report d’un an des annuités du plan Poligny. Cette mesure s’ajoute aux 80 millions d’euros débloqués par la MSA et aux 700 millions d’euros du Crédit agricole permettant l’attribution des prêts de trésorerie aux éleveurs à de faibles taux, a encore ajouté Nicolas Sarkozy.

A Evelyne Lohues, présidente de Charente Coop, qui s’inquiétait que ce report d’un an des échéances de prêt bancaire ne profite pas aux jeunes éleveurs « qui ne connaissent que des crises », Nicolas Sarkozy a évoqué la création d’un groupe à haut niveau au sein de la Commission européenne sur les perspectives d’évolution de l’élevage bovin. Passant la parole à son ministre de l’Agriculture, c’est donc Bruno Le Maire qui en a détaillé les missions. « A la question des éleveurs qui se demandent : est-ce que cela vaut le coup de travailler sept jours sur sept, on répond par deux décisions. D’abord la création de ce groupe à haut niveau dès le mois de septembre qui sera chargé de réfléchir à l’avenir de l’élevage et à proposer une régulation du marché comme filet de sécurité. Mais aussi dans les négociations commerciales, par la demande d’une stricte réciprocité des règles pour chaque pays ». Une annonce accueillie par des applaudissements dans ce gymnase largement rempli d’un public d’agriculteurs.

200 millions pour les calamités

A la « grosse bouffée d’oxygène » souhaitée par Evelyne Lohues, Nicolas Sarkozy a aussi un abondement de 200 millions d’euros du fonds national de garantie contre les risques en agriculture. Avec trois dates butoirs : « le 15 juin, une réunion pour définir la méthode ; au 12 juillet, une première séance d’examen des dossiers et en septembre les premiers versements ». En outre, « les agriculteurs des zones les plus sinistrées par la sécheresse, une exonération de la taxe sur le foncier non bâti ». Ca, c’est pour répondre à l’urgence, a bien précisé le chef de l’Etat, et à cette réponse conjoncturelle, le chef de l’Etat a voulu y associer « une réponse structurelle » sous forme d’« un plan à 5 ans sur la gestion de l’eau » pour favoriser la création de retenues d’eau en contrepartie de d’engagements de cultures plus économes en eau. « Le maïs tout irrigué partout, c’est non » a prévenu au passage Nicolas Sarkozy. Non sans faire part aussitôt de sa lassitude devant les « batailles pour les retenues d’eau » dont « certaines sont pleines » mais « inutilisables en raison de recours administratif ». « Les recours, c’est un problème assommant. Une possibilité de recours, c’est de la démocratie. Mais l’abus de recours, ce n’est plus de la démocratie. Quand je vois une association qui veut stériliser le paysage, et empêcher toute forme d’investissement, je me dis que c’est oublier que l’homme fait aussi partie de la biodiversité » a plaidé Nicolas Sarkozy. C’est pourquoi il a annoncé que l’examen des conditions juridiques dans lesquelles les retenues d’eau sont mises en service, ne pourrait faire plus faire l’objet de recours. Une extension des compétences des chambres d’agriculture va également leur permettre d’assurer la maîtrise d’ouvrage des retenues d’eau. « Pour cela, on est prêt à aller au Parlement », a-t-il répondu à Jean-Jacques Blanchon, président de la coopérative de gestion de l’eau Charente-Amont, qui en a profité pour glisser une idée qui lui tient à cœur de « réaménager les cours d’eau ».

Alors que Christophe Hervy, président du service de remplacement, faisait remarquer que « Face à cette sécheresse le labourage a sauvé le pâturage », Xavier Beulin, président de la FNSEA, a quand même fait remarquer que « les plus vulnérables d’entre nous, ce sont ceux qui sont « en tout à l’herbe ».

Au final, Nicolas Sarkozy s’est voulu rassembleur et rassurant : « L’agriculture française est trop stratégique dans notre économie pour qu’on passe d’une crise à l’autre. C’est aussi pour cela que j’ai voulu que nos deux ministres de l’Agriculture et de l’Ecologie soient là : pour montrer que les deux travaillent ensemble, pas l’un contre l’autre. » Comme les céréaliers ont invités à le faire au profit des éleveurs.

Fabienne Lebon




Les mesures déjà prises

Pouvoirs publics

- 61 départements sont visés par au moins un arrêté préfectoral de limitation de l'usage de l'eau, et 9 sont actuellement en vigilance. Le département de la Charente est en niveau de restriction le plus important (seuil de crise).

- Le pâturage ou le fauchage des jachères et des bandes enherbées a été autorisé.

- Les contraintes sur les parcelles soumises à des mesures agro-environnementales, qui peuvent par exemple empêcher de couper les fourrages nécessaires à l'alimentation animale, ont été levées.

- La Commission européenne a donné son accord pour le versement anticipé d'un acompte sur les aides communautaires dès le 16 octobre 2011 (au lieu du 1er décembre 2011).

- Un groupe à haut niveau chargé de réfléchir aux perspectives d'évolution de l'élevage bovin a été mis en place.

- Une cellule de crise a été créée au sein du ministère chargé des Transports, avec la SNCF et le ministère de la Défense afin de répondre aux besoins de transport de paille vers les départements qui en manquent.

Mutualité sociale agricole (MSA) et Crédit agricole

- La MSA a décidé le report en fin d'année de l'appel de cotisation prévu à la fin du mois de juin.

- Le Crédit agricole a déployé une enveloppe de 700 millions d'euros destinée à attribuer des prêts de trésorerie à taux faible (2% maximum) aux éleveurs, dans l'attente du versement anticipé des aides communautaires.


BILAN

Les mesures nouvelles annoncées par le Président de la République

Soutiens à la trésorerie

1. Le fonds national de garantie contre les risques en agriculture sera doté dès cette année d'une enveloppe de l'ordre de 200 millions d'euros pour permettre le versement d'une avance aux agriculteurs sur l'indemnisation des pertes dues à la sécheresse.

2. Les échéances de prêts contractés par les éleveurs dans le cadre du plan de soutien exceptionnel à l'agriculture (Poligny) seront reportées d'un an.

3. Les agriculteurs situés dans les zones sinistrées par la sécheresse seront exonérés de la taxe sur le foncier non bâti. Cela représente une exonération de 300 millions d'euros.

Soutiens au développement de la ressource en eau

1. Un plan à 5 ans pour la création de retenues d'eau va être déployé. L'objectif : mieux assurer l'équilibre entre les besoins de l'irrigation et les ressources disponibles.

2. Les compétences des chambres d'agriculture vont être étendues par voie législative, afin de leur permettre d'assurer la maîtrise d'ouvrage des retenues d'eau.

3. Les conditions juridiques dans lesquelles les retenues d'eau mises en service ne pourraient plus faire l'objet de recours vont être examinées.

4. Un plan à 5 ans sur la réduction des volumes d'eau prélevés sur 14 000 hectares va être mis en œuvre, en implantant des cultures plus économes en eau (sorgho, soja pour développer la production de protéines végétales, à la place du maïs par exemple).

POUR ALLER PLUS LOIN

La rubrique sécheresse du site du ministère en charge du développement durable|

Le site du ministère de l'agriculture|

La rubrique sécheresse du site de Météo France

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