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Le Gaec Fleuri préserve les sols

Les couverts végétaux implantés par le Gaec Fleuri limitent l’érosion des sols et permet, si besoin comme cet automne, de fournir des fourrages à la troupe.

Mathieu Serieys, 29 ans, a choisi l’élevage ovin pour s’installer en 2015 avec son père au Gaec Fleuri, en Corrèze. Avec 450 brebis et 13 béliers, il a développé les couverts végétaux pour améliorer la fertilité de ses sols, lutter contre l’érosion et si besoin alimenter ses animaux. L’élevage ovin vient en complément d’un atelier de canard et profite aussi aux cultures de céréales du Gaec par les apports de matières organiques.

Tournesol, fenugrec, moha et sorgho fourrager, gesse commune, phacélie, radis chinois, cameline, crotalaire… Le troupeau de 450 brebis de Mathieu Serieys du Gaec Fleuri à Soudaine-Lavinadière en Corrèze a droit à un menu varié. Pour cause, cet éleveur installé en 2015, a choisi de développer les techniques de couverts végétaux. L’érosion des parcelles de l’exploitation de son père l’a fait s’orienter vers ces techniques de conservation des sols lors de son installation. « Cela me rendait malade de voir la terre partir, explique-t-il. Après mon BTS agricole, j’ai réalisé un stage de six mois au Québec et c’est là que j’ai découvert le semis direct ». De retour en France, Mathieu se renseigne, visite des fermes, se forme et au vu des caractéristiques de l’exploitation paternelle et de ses préférences décide de développer l’atelier ovin (alors de 110 brebis). Le Gaec Fleuri affiche aujourd’hui une SAU de 156 ha dont 59 en prairies temporaires et 8 en prairies permanentes, souvent des zones humides et de fond de vallée. Le reste de la superficie est réservé aux cultures de blé, maïs, lupin, féverole, épeautre, méteil, etc, à destination notamment de l’élevage de canard (22 000 canards prêts à gaver par an), l’autre atelier du GAEC.

Des moutons à la place des bovins

« Des moutons, il y en a toujours eu depuis l’installation de mon grand-père dans les années soixante-dix, s’exclame Mathieu Serieys. Dans les années soixante, l’exploitation produisait classiquement des céréales, de la vache limousine et des porcs. Il y avait toujours 120 vêlages en 2012. Pour les porcs, 25 truies en élevage naisseur étaient présentes sur le site jusqu’en 1986. Lorsque les cours du porc ont commencé à chuter, il a fallu réfléchir autrement. L’élevage de canard, plus intéressant, est arrivé ». Et pourtant, c’est bien cet atelier qui, avec les investissements pour la mise aux normes « grippe aviaire », décidés en 2016, a ralenti fortement le développement de l’atelier ovin, afin de conserver un taux d’endettement raisonnable. Impossible pour l’heure de développer la bergerie comme prévu initialement. « Une grande partie de mes brebis restent dehors l’hiver et agnèlent principalement dehors. J’ai un taux de perte élevé et beaucoup de prédations », regrette Mathieu Serieys. Il a choisi de travailler avec les races Hampshire et Ile-de-France. Mais pour les agnelles, il préfère croiser avec un bélier de race charmoise. « Les agnelages sont plus faciles », souligne-t-il. Avec un cheptel dehors quasiment toute l’année, la qualité des prairies et des sols est stratégique. « Les bovins, avec le temps, ont dégradé certaines parcelles par surpâturage. Mon objectif est de renouveler 5 ha par an », continue Mathieu Serieys. Là encore, avant de renouveler une prairie, il installe un couvert estival pour garder l’humidité et produire de la biomasse valorisée par les moutons. Du côté des cultures, il cite en exemple : « avant un sarrasin et avant un maïs, nous semons un méteil qui est soit récolté soit restitué au sol en fonction des stocks fourragers ».

Développer la technicité de l’élevage ovin

Mathieu Serieys mise sur les associations de cultures et fait valoriser les couverts par les moutons durant les périodes où l’herbe manque. De leur côté, les animaux enrichissent le sol avec leurs excréments. Toute la difficulté est de trouver les graines pour organiser ces couverts, selon lui. Aussi le réseau entre agriculteurs est crucial, tout comme internet. Les moutons valorisent aussi les parcours des canards, entre deux bandes. « Les déjections des canards font pousser l’herbe à toute vitesse au printemps », observe Mathieu Serieys, qui a choisi de réimplanter des arbres également sur les parcours, afin de faire de l’ombre à ses brebis. Sa démarche est la même sur les parcelles de culture qui peuvent avoisiner 10 ha sans la moindre ombre disponible. Au final, ses brebis sont presque trop en état, ce qui pose d’autres problématiques. « Valoriser les couverts demande du temps. Je dois redécouper les parcelles régulièrement, prévoir l’abreuvement. Je devrais aussi mieux séparer les lots pour affiner l’état de mes animaux. Le parc de contention mobile, acheté il y a peu, m’a aidé à mieux gérer les lots », relève Mathieu Serieys qui souligne que l’élevage ovin « ne laisse pas de place à l’erreur ». Dans tous les cas, il constate que la diversité alimentaire apportée grâce aux couverts végétaux donne des brebis en meilleure santé. À l’avenir, il souhaite développer les agneaux d’herbe et reprendre les échographies, après la lutte, pour adapter au plus juste l’alimentation des mères. Le projet de bergerie reste toujours dans les cartons mais a été revu à la baisse, avec des auges trottoirs en bois à la place des tapis d’alimentation initialement prévus.

Des outils de travail du sol stratégiques

« Entre les cultures et les couverts végétaux, nous semons presque toute l’année, relève Mathieu Serieys du Gaec Fleuri. J’utilise un semoir à dent Aitchison pour le semis direct et un semoir à disque Agrisem en technique simplifiée ». Dans l’exploitation, le labour a été mis au rebut. Même si Mathieu Serieys possède un vieux Dyna-Drive, pour un travail superficiel du sol si nécessaire, il regrette de ne pas avoir de fissurateur pour décompacter certaines parcelles sans avoir à « bouleverser le sol », selon lui. Les outils de semis direct en agriculture de conservation restent coûteux. « Le semoir Aitchison est économique mais présente beaucoup de limites », constate Mathieu Serieys. Du côté de la chaîne de récolte des fourrages, il utilise un endaineur soleil, qui « préserve bien mieux les feuilles ». Pour l’enrubannage, il n’a pas hésité à mettre des bactéries lactiques afin de « favoriser les bonnes fermentations ».

Chiffres clefs

1,3 de taux de prolificité
375 agneaux sevrés
19 kg de carcasse par agneau en moyenne
114 € par agneau en moyenne
2,5 équivalent templ plein sur le Gaec
49 000 euros d’EBE après rémunérations

Avis d’expert

"Des pratiques agroécologiques suivies de près"

« Mathieu Serieys a bouleversé les pratiques de l’exploitation en instaurant l’arrêt du labour, les rotations végétales et le semis direct. Cela se traduit par des couverts d’été, difficiles à implanter avec la forte sécheresse de cette année, mais qui aujourd’hui permettent de nourrir les moutons et d’éviter d’acheter du fourrage. Sur une parcelle, le couvert de radis, de cameline et de phacélie a vite levé, à la suite d’une petite pluie, preuve de la maîtrise culturale de Mathieu et du bon fonctionnement du sol. Ces pratiques agroécologiques restent peu connues. Le Gaec Fleuri fait partie depuis 2017 du réseau des fermes pilotes du programme Agr’eau, qui a pour objectif d’évaluer sur le long terme l’impact de ces pratiques sur l’eau, le sol et l’environnement. »

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