Le Ciirpo dessine la ferme ovine du futur
Recherche ovine, valorisation des données, nouvelle bergerie, ferme digitale et récompense ITA’Innov, l’assemblée générale du Ciirpo était riche de bonnes nouvelles pour la station expérimentale.
L’assemblée générale du Ciirpo (Centre interrégional d’information et de recherche en production ovine) qui s’est tenue le 8 juin dernier à Saint-Priest-Ligoure en Haute-Vienne a montré l’étendue des recherches et valorisations de la ferme expérimentale du Mourier. Avec sa structuration en réseau, son lien étroit avec la profession et son partenariat régional – en particulier Nouvelle-Aquitaine et Centre-Val de Loire — ce centre de ressources unique en France combine les trois métiers d’éleveur, d’expérimentateur et de communicant. " Ces expérimentations menées avec le bon sens paysan, suivies de vulgarisations, sont très utiles pour les éleveurs, apprécie Patrick Soury de la FNO. Le Ciirpo traduit aussi l’esprit d’équipe qui anime la filière ovine. Ici, ils ont montré qu’on peut augmenter le nombre d’agneaux produits sur une ferme. Et ce n’est pas du virtuel mais de l’appliqué". Parmi les recherches en cours, notons le programme de production d’agneaux agroécologiques qui vise à réduire la proportion d’agneaux conduits au pâturage et améliorer l’efficacité alimentaire en bergerie en se basant sur le pâturage cellulaire et le pâturage de prairies multi-espèces enrichies de plantes à tannins. Avec des expérimentations sur la vigueur de l’agneau à la naissance, la note d’état corporel, la génétique pour lutter contre les strongles gastro-intestinaux, le pâturage des cultures intermédiaires, la finition des agneaux sur dérobées en fin d’automne, les projets de recherche ne manquent pas. Le Ciirpo débute aussi une étude nommée Climagrof pour démontrer les bénéfices économiques et environnementaux de l’agroforesterie en élevage ovin. Le centre ovin veut ainsi lister les intérêts et les limites des haies, bosquets ou alignement d’arbres dans les prairies. Ce projet, mené avec une dizaine de partenaires de Nouvelle-Aquitaine et d’Auvergne-Rhône-Alpes, vise aussi à approfondir les valorisations du bois comme litière pour remplacer la paille ou comme source d’énergie pour le chauffage ou la production d’électricité. D’autres projets de recherches sont également prévus comme les essais Patapain sur le pâturage des céréales ou celui Ovitonte sur la tonte en milieu de gestation.
L’ultra haute fréquence pour lire des lots d’animaux en mouvement
Autre actualité pour le Ciirpo, la station expérimentale du Mourier intègre désormais le réseau des Digifermes à côté de celle d’Arvalis à Boigneville en Essonne, dédiée aux grandes cultures, et de Saint-Hilaire-en-Woëvre dans la Meuse, consacrée aux grandes cultures et à l’élevage de bovins viande. Ce dispositif d’expérimentation baptisé Digifermes signifie que ces fermes expérimentales mettent en œuvre et testent les innovations numériques pour aider les start-up ou les grands groupes à construire les outils de l’élevage de précision de demain adaptés aux conditions de terrain. « Le numérique va bouleverser le monde agricole et, dans ce bouillonnement, il y a un vrai enjeu à avoir un terrain de jeu pour tester et évaluer les nouvelles applications » expliquait Jacques Mathieu, le directeur d’Arvalis. Pour le Ciirpo, cette mise en pratique des outils connectés se traduit par les tests de l’ultra haute fréquence (UHF) pour lire des lots d’animaux en mouvement, sans contention particulière ni contrainte de circulation. Cette lecture rapide de nombreuses boucles d’identification facilite le repérage et le suivi des lots d’animaux. Le Ciirpo teste aussi une bascule pour peser automatiquement les ovins, à partir d’un couloir intégré à un parc de contention permettant de trier automatiquement les animaux et d’ajuster leur ration en fonction d’objectifs de poids vif ou d’état corporel. La station expérimentale va aussi tester une bascule reliée à un pistolet automatique permettant le traitement antiparasitaire sélectif et adapté aux poids individuels des seuls animaux infectés. Enfin, la station du Mourier a testé l’utilisation du GrassHopper, un herbomètre connecté qui relie les hauteurs d’herbe mesurées et le positionnement GPS à l’aide d’un smartphone ou d’une tablette. Les objectifs de la Digiferme sont bien de faciliter le travail de l’éleveur et d’améliorer ses performances zootechniques et économiques.
De nombreuses visites et un prix ITA’innov
Pour diffuser ses résultats, le Ciirpo multiplie les invitations et, en 2016, pas moins de 1 300 personnes (éleveurs, techniciens, jeunes en formation…) sont venues sur le site dans le cadre de journées techniques. « Le transfert de connaissance a une place aussi importante que la recherche » témoigne Laurence Sagot du Ciirpo. Et, pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer, le Ciirpo a mis en ligne sur http://www.inn-ovin.fr/videos-innovin une vingtaine de vidéos pratiques très bien faites. Chaque année, une dizaine de nouvelles fiches sont rédigées et mises en libre accès sur http://www.inn-ovin.fr/documents-techniques/. Le Ciirpo communique aussi largement ses résultats sur Facebook, en éditant La lettre technique des éleveurs ovins ou dans la presse (dont la revue Pâtre). Reconnaissance de leurs efforts, l’équipe du Ciirpo est lauréate des trophées ITA’Innov 2017 dans la catégorie « équipe innovante ». En combinant au quotidien les métiers d’éleveur, d’expérimentateur, de formateur, et de communicant, tout en étant réactives face à l’actualité et proactives face aux enjeux de demain, les huit personnes ont été reconnues pour leur contribution majeure à la recherche et au développement ovin. L’équipe a notamment été citée « pour sa performance, son fonctionnement interne, ses outils de collaboration, sa cohésion et sa complémentarité ». Organisé tous les deux ans, ce concours ITA’Innov cherche à valoriser les hommes, les découvertes et les innovations des instituts techniques agricoles (ITA) pour les filières agricoles et agro-industrielles. Enfin, dernière actualité du centre, une bergerie de 864 m² pouvant accueillir 280 brebis et leurs agneaux a été inaugurée. Polyvalente, elle peut accueillir les mises bas et différentes catégories d’animaux. Pour gagner de la place, la distribution des aliments et le paillage se font par l’extérieur et seul un couloir de circulation surélevé de deux mètres de large traverse les 54 mètres de la bergerie.