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La clôture comme outil d’un pâturage réussi

Permanente ou mobile, choisir sa clôture doit faire l’objet d’une démarche réfléchie, en accord avec le fonctionnement du troupeau et la gestion du parcellaire.

Il n’existe pas une norme ou une référence de clôture pour chaque type de conduite de troupeau, de gestion de parcelles ou d’enjeu environnemental. Chaque éleveur ayant son fonctionnement propre, il devra trouver la bonne combinaison de clôtures pour délimiter son exploitation et assurer la contention qu’il souhaite pour ses brebis. « Il est intéressant de mélanger différents types de clôtures, puisque chacune d’entre elles a une utilisation particulière », explique Fabienne Launay, chef de projet pastoralisme, systèmes fourragers, pâturage et gestion agricole des espaces naturels à l’Institut de l’Élevage.

Permanentes, pour le long terme

Les clôtures permanentes vont servir principalement de barrière physique pour délimiter l’exploitation, une parcelle, un parcours. Le grillage à moutons, dit « Ursus » (nom commercial) est très répandu parmi les éleveurs ovins, séduits par la sûreté de l’installation. Bien que celle-ci soit coûteuse (il faut compter environ 1,30 €/m) et que son installation soit chronophage avec une implantation de poteaux tous les deux à trois mètres sur terrain plat, la hauteur du grillage et l’espacement progressif des fils horizontaux apportent de la sérénité à l’éleveur dans la surveillance de ses brebis et agneaux. Il n’y a pas de risque qu’un animal, même petit, ne se coince et la hauteur est suffisante pour empêcher les adultes de passer par-dessus (et il est possible de le hausser d’un fil supplémentaire). L’entretien est limité, la clôture n’étant pas électrifiée. Et il n’est pas gênant qu’il y ait un peu de végétation autour, sans excès. Le grillage à moutons est constitué de mailles rectangulaires dont l’espacement des fils horizontaux augmente progressivement de bas en haut. "Sur les parcelles qui bordent des routes, j’ai mis du gros Ursus et du grillage plus fin sur les autres. Mais si c’était à refaire, je mettrais de l’Ursus partout car malgré le coût, ça tient bien 30 ans, c’est une vision à long terme", témoigne Pierre Smessaert, éleveur de 350 brebis dans l’Oise.

La deuxième clôture en vogue et qui se répand le plus aujourd’hui est la clôture électrifiée à fils lisses du type high tensile. Elle est moins coûteuse que le grillage à moutons (environ 0,50 €/m) et se révèle également résistante dans le temps, à condition d’implanter solidement les poteaux de départ (ou de tête) et d’angle. Pour Fabienne Launay, « la principale difficulté avec le high tensile sera de bien penser son installation électrique, notamment au niveau des franchissements. De nombreux éleveurs font passer le courant dans la poignée de leur porte d’accès, mais les déperditions électriques sont très importantes ! ». Elle conseille alors de faire passer le fil conducteur sous la porte pour garantir une bonne électrification. « J’ai toujours utilisé du high tensile et je n’ai aucun problème de brebis qui sautent. Si ça peut arriver à certains éleveurs, c’est sans doute qu’il y a un défaut dans la conception de l’installation », assène Éric Pottier, chef de projet production de fourrages et pâturages à l’Institut de l’Élevage et lui-même éleveur ovin.

Mobiles, pour la polyvalence

La clôture mobile va, elle, être implantée selon différents objectifs. Elle va servir à refendre une parcelle afin de gérer précisément la ressource en herbe, forcer le pâturage des chaumes ou faire pâturer sur une culture dérobée. Elle est aussi très utilisée en estive, pour mettre en place les parcs de nuit, ou lors des manipulations sur les animaux. "J’ai 20 ha de pâturages, autour duquel j’ai mis une clôture spider avec trois fils. La parcelle est ensuite refendue en plusieurs petits parcs où je mets un gros chargement, avec une rotation quotidienne", précise Antoine Cuypers, éleveur de 800 brebis dans l’Oise. "Je passe quatre heures par semaine à monter et démonter mes clôtures, certains trouvent ça important, mais c’est peu par rapport au temps passer en astreinte dans les bâtiments", continue-t-il. Il faut dire que la moitié de son troupeau est entièrement à l’herbe et l’autre moitié en bergerie. 

Le filet est un type de clôture alliant barrière physique, électricité et mobilité. Très répandu parmi les éleveurs et bergers, sa bonne utilisation nécessite généralement une petite formation d’une demi-journée en amont. Une fois les techniques apprises pour monter et démonter le filet, il devient un précieux allié pour le berger. Cependant il y a dans le commerce une grande amplitude sur la qualité des filets proposés. « Plus les barres verticales sont rigides et plus l’installation sera aisée. Néanmoins il faut garder à l’esprit que les pertes électriques sont très importantes, du fait du contact avec le sol et la végétation et par la nature même du filet », rappelle Fabienne Launay. Le fabricant de clôtures Horizont trouvé une astuce pour atténuer ces déperditions. "Les deux derniers fils horizontaux les plus proches du sol ne sont pas électrifiés, la végétation n’altère donc pas le passage du courant", explique Alain Mathé, directeur général de la société. Ce nouveau modèle n’est pas plus cher que les filets standards et se monte de la même manière.

Lors d’un atelier technique organisé par l’Institut de l’Élevage et la chambre d’agriculture de l’Aveyron, Guillaume Constant, berger dans les Cévennes, fait une démonstration de l’installation de parc en filet. « On commence par planter le piquet d’angle ou de départ et on déroule le filet en veillant à ce qu’il soit bien tendu. Un débroussaillage préalable peut être nécessaire pour plus d’efficacité électrique », détaille-t-il lors de son intervention. « L’intérêt du filet bien tendu, c’est à la fois une barrière physique et une bonne électrification ». Il rappelle que les avantages du filet sont sa légèreté (50 m de clôture pour 5,5 kg) et la rapidité de pose en fonction du terrain. Pour Pierre Smessaert, le filet permet de gérer au mieux ses parcelles et ses niveaux d’herbe avec un roulement quotidien. "Tous les jours, je démonte et remonte trois à quatre filets, ça ne me prend pas plus de 20 minutes", témoigne-t-il.

Les piquets, pour tenir l'ensemble

Le choix du piquet dépend d’une part du type de clôture utilisé et d’autre part des manipulations que l’éleveur va faire avec celle-ci. « J’ai choisi des piquets en fibre de verre de 12 mm pour leur solidité. Ils sont souple, moins cassants que ceux en plastique, et la fibre a une durée de vie supérieure », témoigne Rémi Rieuf, qui élève 180 agnelles dans l’Allier. « Quand il y a du relief ou des trous, je combine avec des piquets en acacia, ça évite que les piquets en fibre ne ressortent. Ils me servent aussi pour les angles et le début. Je les fabrique moi-même », poursuit-il. Le bois d’acacia est le plus répandu du fait de sa solidité. Cependant « on voit apparaître des piquets en acacia à très faible coût. Il vaut mieux les éviter car le bois est issu de plantations intensives qui ne laissent pas le temps à l’arbre de gagner en solidité, alerte Fabienne Launay. Préférez également un piquet fendu, qui suit les fibres du bois, plutôt qu’un piquet scié ».

Apprendre la clôture aux jeunes ovins

Afin de faciliter la mise à l’herbe et d’éviter les fugues d’animaux, l’éleveur devra apprendre aux jeunes ovins de son troupeau à craindre et respecter la clôture. Guillaume Constant précise : « L’apprentissage se fait dans les premiers mois, il faut que les animaux soient très jeunes. On va utiliser une clôture fiable et il va falloir un peu de surveillance au départ ». Il est recommandé d’avancer progressivement avec les jeunes agnelles. « On peut commencer par mettre la clôture contre un mur ou une autre barrière infranchissable; comme ça, on laisse la possibilité du contact animal – fil sans pour autant qu’il puisse s’échapper », conseille Fabienne Launay. Les parcs d’apprentissage doivent être de petite taille, entourés par le même type de clôture qui sera ensuite utilisé tout au long de la carrière de la brebis. Enfin, pour faciliter l’apprentissage, faire pâturer ensemble des jeunes et des brebis expérimentées est une pratique qui a fait ses preuves.

L’astuce

Lire l’étiquette des grillages à moutons

Quand une étiquette mentionne « grillage de 95.10.15 », cela signifie une hauteur de 95 cm, des fils horizontaux tous les 10 cm et un espacement de 15 cm entre les fils verticaux.

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