L’Argentine compte sur l’accord UE-Mercosur pour percer en Europe
En cas de ratification de l’accord UE-Mercosur, l’Argentine quadruplerait d’une année à l’autre ses exportations de poulet vers le continent européen.
En cas de ratification de l’accord UE-Mercosur, l’Argentine quadruplerait d’une année à l’autre ses exportations de poulet vers le continent européen.
Le marché européen arrive seulement au cinquième rang des destinations du poulet argentin, loin derrière le marché de l’Asie. Un volume stable à 7 000 tonnes par an.
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« Avec des droits de douane de 1 072 euros prélevés sur de la poitrine de poulet d’une valeur de 3 000 euros la tonne, cela limite les affaires », soulignait Carlos Sinesi, le directeur de la chambre des entreprises d’abattage avicoles (Cepa), le lobby des industriels du poulet en Argentine, lors du dernier Salon de l’agriculture de Buenos Aires. Ce volume pèse peu face aux 250 000 tonnes de poulet que le Brésil exporte chaque année en Europe. Davantage que le Brésil, l’Argentine compte sur l’accord de libre-échange avec le Mercosur pour percer en Europe.
Le calcul est simple. En cas d’accord ratifié de libre-échange avec l’Union européenne, l’Argentine aurait accès à 14 % du quota de 180 000 tonnes de viandes de poulet réservé aux pays du Mercosur, soit 25 200 tonnes détaxées. Cela ferait plus de 32 000 tonnes par an que des firmes de la taille de Granja Tres Arroyos et Soychú n’auront aucun mal à fournir.
L’Asie reste le marché prioritaire
L’Asie reste leur priorité absolue, la Chine et le Vietnam étant leurs deux premiers débouchés à l’export, et les Philippines et la Corée du Sud leur ayant ouvert leur marché en début d’année.
L’autre bonne nouvelle, pour le pays sud-américain, est que la Chine, en mai dernier, a rouvert ses frontières au poulet argentin après deux ans de suspension de ses achats suite à un foyer de grippe aviaire déclaré en Argentine. « Les achats chinois ont tout de suite retrouvé leur niveau d’avant 2023. En temps normal, la Chine capte 35 % de nos envois, soit autour 80 000 tonnes par an », assure Carlos Sinesi.
« Le volume de nos exportations, cette année, sera entre 250 000 et 260 000 tonnes. Avec la perte de nos clients chinois pendant deux ans, nos ventes ont connu un creux avec 180 000 tonnes et 213 000 tonnes embarquées en 2023 et 2024. On s’est replié sur le Vietnam, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, et sur les pays d’Afrique de l’Ouest au creux de la vague, eux qui paient la tonne de pattes de poulet une misère comparée au tarif chinois », glisse-t-il.
Une production annuelle de 2,5 millions de tonnes
Après deux folles décennies de progression, la production de poulet en Argentine a marqué le pas en 2019. « Dans cet intervalle de vingt-cinq ans, nous sommes passés de 700 000 tonnes à 2,5 millions de tonnes par an. Le phénomène de la grippe aviaire a freiné notre commerce extérieur. Et la consommation de poulet en Argentine est arrivée à un plafond à 50 kilos par an et par habitant, rendu au même niveau que la consommation de bœuf. On est parti de 22 kilos de poulet en l’an 2000… », rappelle-t-il.
Au pays où le bœuf reste roi, la place de celui-ci dans le régime carné des Argentins, à hauteur de 115 kilos par an et par habitant, a reculé de 80 à 50 kilos, au profit du poulet, devenu meilleur marché.
Les indices de performance des élevages de volaille de chair de l’Argentine : un poids vif moyen de 3,1 kilos ; un cycle d’engraissement de 45 à 50 jours ; et un indice de consommation de 1,850 à 1,9 kilo. « Ce taux pourrait être ramené à 1,6 dans des bâtiments de type black-out [bâtiment obscur à ventilation dynamique] », selon Carlos Sinesi.
Les exploitations d’élevage de poulets y sont au nombre de 4 000 pour environ 10 000 poulaillers. Les industriels visent à s’équiper de 1 200 poulaillers neufs d’ici six ans.
Une distribution intra Mercosur scellée d’avance
Le secteur privé des quatre pays du Mercosur se serait mis d’accord en vue de la distribution du quota de poulet qui leur est réservé dans le cadre de leur accord de libre-échange avec l’Union européenne. Sur la base d’un quota total de 180 000 tonnes de poulet, moitié avec os et moitié sans os, l’Argentine aurait droit à 14 % de ce quota (soit 24 200 tonnes), et le Brésil, 84 % de ce quota (151 200 tonnes), tandis que l’Uruguay et le Paraguay auraient 1 % chacun. Un centième symbolique qui leur permettrait surtout de mettre le pied en Europe au niveau des autorisations sanitaires.
Le Brésil, champion de l’export hors catégorie
Pour les industriels brésiliens, le marché européen du poulet représente moins de 4 % de leur activité à l’export, contre 15 % il y a peu, souligne Ricardo Santin, le président de l’Association brésilienne de la protéine animale (ABPA). « Avant le Brexit, nous avions droit à un quota détaxé de 400 000 tonnes de viande de poulet vers l’Union européenne, surtout de la poitrine. Il a été réduit à 250 000 tonnes. Hors de ce quota, les tarifs douaniers sont dissuasifs. Ils vont de 1 300 euros la tonne pour les escalopes à 2 600 euros la tonne pour les préparations saumurées. »
L’an dernier, le Brésil a ainsi fourni 5,29 millions de tonnes à l’export, soit 38,6 % du marché international. L’ABPA table sur 5,35 millions de tonnes pour 2025.
La production de poulets, au Brésil, croît sans cesse. Cette année, elle franchira le cap des 14 millions de tonnes (14,02 millions, selon l’ABPA).