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Renforcement de l’action collective
L’AOP, un projet de grande envergure

Le regroupement des organisations de producteurs du Grand Ouest dans une association d’organisation de producteurs (AOP) pourrait changer profondément le rapport de force entre les producteurs et les abatteurs.

Michel Bloch, président de l'UGPVB (à gauche), Philippe Bizien, président du CRP bretagne et à droite François Valy, de la FRSEA Bretagne. "Une AOP est désormais possible grâce à l'évolution du droit européen."
© E. Lecorre

Le Space a été l’occasion de voir plus clair sur le projet d’AOP porté par l’Union des groupements de producteurs de porcs bretons (UGPVB) et soutenu par la FNP et ses branches régionales, le Comité régional porcin (CRP) Bretagne et les sections porcs des FDSEA. Un projet rendu possible par l’évolution du droit européen qui rend désormais possible une telle organisation sans déroger aux règles de la libre concurrence. Un projet qui rentre également dans les plans du gouvernement, exprimés dans le cadre des États généraux de l’alimentation et réaffirmé durant le Space par Stéphane Travers, le ministre de l’Agriculture. Lors de sa conférence de presse, le CRP a détaillé ce que les éleveurs pouvaient attendre de la création d’une AOP.

1Conforter le MPB pour la définition du juste prix.

De l’avis général, le marché du porc breton est aujourd’hui menacé par l’absence de Bigard et de Cooperl, et par l’écart de prix encore constaté cet été avec les Allemands et les Espagnols. L’AOP permettrait aux OP de mieux s’organiser pour présenter plus de porcs et faire de l’outil de Plérin un passage obligé pour les abatteurs pour s’approvisionner en marchandise. « Aujourd’hui, certains abatteurs viennent au marché non pas pour acheter des cochons, mais uniquement pour faire le prix », déplore François Valy, de la FRSEA. Pour lui, l’idéal serait de faire passer au cadran l’équivalent de deux jours d’abattage, soit 80 000 porcs par semaine. Mais pour augmenter les apports, encore faut-il que tous les groupements jouent le jeu, et que le nombre de porcs vendus en direct diminue. Se posent alors les problèmes des élevages éloignés des sites d’abattage, et des porcs contractualisés par des cahiers des charges. « Hors Cooperl, les porcs libres de tout cahier des charges (hors VPF) représentent entre 40 et 50 % de la production du Grand Ouest, fait remarquer François Valy. Nous avons donc largement de quoi augmenter les apports au cadran ».

2 Engager des démarches collectives pour prévenir et anticiper les crises

L’objectif est d’éviter que se reproduisent les retards d’enlèvement qui ont fortement pénalisé certains éleveurs en 2016 et 2018. « La commercialisation commune de porcs en vif ou en carcasse de l’excédent de porcs serait à même de rétablir un équilibre du marché et de la fluidité en faveur des éleveurs », souligne Michel Bloch (voir Réussir Porc septembre 2018 page 14). En clair, dégager de manière coordonnée des porcs à l’export serait nettement plus efficace que quelques tentatives isolées qui n’ont aucune incidence sur le marché. Mais ces actions ont un coût, et les responsables des groupements tiennent à ce qu’elles soient financées de manière équitable, puisqu’elles profitent à tous. Les groupements ayant noué des partenariats avec l’aval émettent aussi des réserves, arguant le fait que les abattoirs français ont besoin de travailler à saturation pour ne pas perdre de l’argent.

3 Financer des actions collectives par des aides PAC

C’est la « carotte » financière qui pèse lourdement en faveur de la création de l’AOP. Au travers du second pilier de la politique agricole commune, des démarches de progrès communes à toutes les OP pourraient être financées. Ces démarches concernent des thèmes aussi variés que la qualité des produits, l’environnement, la bientraitance animale, le sanitaire, les attentes sociétales… « Ce serait une première pour la production porcine d’être financée par des aides européennes », précise Philippe Bizien, président du CRP Bretagne. L’UGPVB souligne aussi que le contrat d’avenir sociétal, un projet porté par la profession qui prévoit de passer un contrat directement avec les distributeurs pour promouvoir le porc français, pourrait aboutir plus facilement.

Bertrand Houzé, président d’Elpor

Négocier un prix, ensemble

« Nous sommes interrogatifs sur la possibilité de renforcer le MPB tel qu’il existe actuellement. Aujourd’hui, 10 % des porcs font le prix. À l’heure où les cahiers des charges se multiplient, et où les éleveurs veulent sécuriser la vente de leur production, il devient de plus en plus compliqué de trouver des éleveurs apporteurs au cadran. Or, cela ne peut se faire sous la contrainte. Aussi, nous estimons qu’il est nécessaire d’entamer des discussions avec l’ensemble des acteurs de la filière, afin de réformer le MPB, et bâtir un système de fixation du prix qui intègre l’ensemble de la production, et construit à partir de données objectives. Il serait regrettable que la filière s’interdise une telle réflexion. »

Philippe Lecornue, président de Porc Armor Évolution

« Une décision lourde de conséquences »

« Adhérer à une AOP est une décision lourde de conséquences. Ce projet doit être mûrement réfléchi. Nous serons certainement plus efficaces si nous mettons en place quelque chose de collectif au sein du MPB à condition que toutes les OP soient exposées de la même façon et que toutes contribuent de façon équitable. Faire du dégagement à l’export peut aussi s’envisager pour désengorger les marchés néanmoins nous pensons qu’il est préférable de privilégier le dégagement avec nos outils en France pour les optimiser. Par ailleurs, concentrer l’offre ne sert à rien si les débouchés n’existent pas. Nous avons fortement poussé pour promouvoir Le Porc Français. De nouvelles actions doivent être entreprises pour prolonger ce qui a déjà été fait. »

Jean-Luc Chereau, président d’Agrial

« D’accord pour suivre le mouvement et apporter plus de porcs au cadran »

« Agrial apporte déjà modestement au cadran. Nous pourrons augmenter nos offres pour accompagner le mouvement collectif, à condition que toutes les OP jouent le jeu dans les mêmes proportions. Ce projet d’AOP aura un coût, qui devra être supporté de manière équitable pour qu’il bénéficie au maximum d’éleveurs. Son périmètre devra donc être le plus large possible. »

Pascal Concert, président de Syproporcs

« Valoriser l’offre des éleveurs »

« Syproporcs est favorable à une action collective dont le but est de valoriser l’offre. Augmenter le nombre de porcs présentés au MPB ne peut que donner plus de poids aux éleveurs face aux abatteurs. Le renforcement du MPB peut aussi permettre de relancer le projet de contractualisation à livraison différée qui avait échoué il y a quelques années. Cependant, nous ne voulons pas d’AOP à deux niveaux. Toutes les OP doivent participer de manière équitable au fonctionnement de ce projet, au prorata de sa production. »

Jean Pierre Simon, président de GRPPO

"Regrouper toutes les OP sur les dossiers transversaux"

« On nous présente une opportunité pour renforcer le pouvoir des éleveurs sur les marchés. Avec l’AOP c’est la première fois que la filière porcine peut prétendre à des aides PAC. Sur les nombreux dossiers transversaux, il est nécessaire de regrouper toutes les OP afin de donner davantage de crédibilité à nos démarches et imposer le VPF comme gage de qualité près des consommateurs. Les contours de cette AOP restent à définir mais aujourd’hui nous devons avancer."

Guillaume Roué, président d’Evel’up

« Les marges ne se partagent pas, elles se gagnent »

« Evel’up est prêt à participer à une stratégie collective en partageant les efforts nécessaires à la mise en place de l’AOP, y compris sur la partie contractuelle de la commercialisation des porcs. Attention cependant à ne pas se tromper d’ennemi. Les abattoirs ne sont pas des adversaires, mais bien des partenaires des éleveurs. Le problème actuel est un rapport de force déséquilibré au détriment des éleveurs. L’AOP a pour objectif de rééquilibrer ce rapport de force. Il ne faut pas oublier que les marges ne se partagent pas, elles se gagnent. »

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