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« Avec la race pie rouge, nous dégageons de la marge avec des vaches laitières rustiques, en Ille-et-Vilaine »

Au Gaec Ker Saout Ru, en Ille-et-Vilaine, Benoît Le Gal et Antoine Le Morvan ont troqué les vaches prim’Holstein contre des pie rouge à leur installation. Ils produisent du lait avec des taux en veillant aux coûts alimentaires.

Depuis que Benoît Le Gal et Antoine Le Morvan se sont installés ensemble hors cadre familial en septembre 2021, ils ont transformé la ferme en achetant des vaches pie rouge pour remplacer les prim’Holstein, en augmentant le nombre de vaches qui était de 50 au départ, et en produisant plus de lait avec plus de surface. En cette année 2025, les éleveurs atteignent leur objectif : 110 vaches traites pour plus d’un million de litres de référence. « C’est une production qui nous permettra de rentabiliser les bâtiments et de vivre à deux sur la ferme », plantent les deux associés.

Le système n’est pas encore complètement calé, les deux éleveurs souhaitant encore développer le pâturage. Mais la marge sur coût alimentaire (329 €/1 000 l en moyenne sur un an) affiche déjà un bon niveau, grâce à un lait riche en matière grasse et matière protéique et à un coût alimentaire maîtrisé.

Plus de trois lactations de longévité

La pie rouge a convaincu Benoît Le Gal et Antoine Le Morvan au cours de leurs expériences professionnelles passées. « C’est une race rustique. Nous sélectionnons sur les critères liés aux pattes pour éviter les boiteries et pour que les vaches soient adaptées au pâturage. Nous évitons les vaches de grand format. Nous trouvons que la prim’Holstein est trop grande et a trop de problèmes de pattes et de santé en général. » Aujourd'hui, Antoine Le Morvan est administrateur Ouest Pie rouge 35 et Benoît Le Gal est administrateur France Pie rouge

Les vaches pie rouge sont réputées pour leur longévité : la moitié des vaches pie rouge au contrôle laitier sont en troisième lactation et plus, selon France Pie rouge. « Nous avons actuellement dans le troupeau 45 vaches qui sont en troisième lactation et plus. Nous avons encore beaucoup de première et deuxième lactation car nous étions encore en croissance de cheptel jusque 2025. La proportion de troisième lactation et plus va croître dans les années à venir », indiquent Benoît Le Gal et Antoine Le Morvan. L’objectif des éleveurs est de « maximiser la quantité de lait produite sur une carrière, pour rembourser les frais d’élevage. En dessous de trois lactations, une vache n’est pas rentable dans notre système ».

<em class="placeholder">Une vache laitière de 7 ans</em>
Osiris (fille de Nova star) démarre sa cinquième lactation avec 42 kg de lait à 30 jours. En 4e lactation, elle a produit 12 642 litres en 411 jours à 40,5 de TB et 35 de TP. Sa fille Themis est pré-inscrite pour le Space 2025. © C. Pruilh

Les deux éleveurs apprécient aussi le caractère mixte de la race. « C’est la production laitière qui nous fait vivre, mais quand la conjoncture viande est favorable, comme elle l’est depuis un an, nous finissons avec nos céréales les vaches qui partent à la réforme. C’est un plus. » Le troupeau compte aussi une dizaine de normandes, par « goût pour cette race mixte, rustique et adaptée au pâturage ».

Une recherche de taux élevés

L’autre atout de la pie rouge est sa bonne production laitière et ses taux de matière grasse et de matière protéique, qui en font une bonne productrice de matière utile : 581 kg par an, ce qui la place juste derrière la prim’Holstein qui affiche 622 kg en moyenne (résultats du contrôle laitier 2024). « Nous sélectionnons des taureaux améliorateurs sur les critères de production laitière, ainsi que sur les taux butyreux et protéique. »

Les vaches du Gaec affichent de bons taux butyreux et protéique : 46,2 de TB moyen et 36,1 de TP moyen sur 305 jours de lactation, d’après le bilan génétique d’avril 2025. C’est plus que les taux moyens des troupeaux pie rouge de la zone Innoval : 44,4 et 34,9. « Leurs index TB et TP sont certes supérieurs à la moyenne du groupe Innoval, mais de peu. Cela montre que l’alimentation des vaches joue aussi favorablement », commente Christophe Eon, de France Pie rouge.

Valoriser les fourrages et cultures

Si les éleveurs sortent les vaches traites dès que c’est possible, avec 16 ares par vache le pâturage représente au mieux la moitié de la ration de base.

La ration hivernale se compose d’ensilage de maïs (6 kg MS/VL/j), d’ensilage d’herbe (5 kg MS), de tourteau de soja (3 kg MS), de maïs grain sec et parfois d'orge (2,6 kg MS), de betterave fourragère (2 kg MS), de paille de blé (1 kg MS), de minéraux et de sel. Les vaches reçoivent en plus une complémentation individuelle de maïs grain sec broyé et parfois d’orge broyée. « Je distribue à la casserole. Je reconnais les vaches et adapte les quantités à leur niveau de production », précise Benoît Le Gal.

<em class="placeholder">Un silo d&#039;ensilage de maïs</em>
Les deux éleveurs ont choisi cette ferme pour s'installer notamment parce que les terres présentent un bon potentiel : 15 à 19 t MS/ha de maïs ensilage. Un atout dans leur stratégie autonome. © C. Pruilh

« La force du Gaec est de valoriser leurs fourrages et leurs cultures en maïs et orge grain sec broyé autoconsommé, analyse Solenn Roignant, nutritionniste au cabinet BR nutrition. Par rapport à notre groupe de 160 éleveurs, ils sont plutôt économes en concentrés. Par contre, la production par vache est plus faible chez eux : ils diluent moins les charges. » Le Gaec obtient ses meilleures marges sur coût alimentaire en période de pousse de l’herbe. « Le pâturage est bien valorisé ce qui permet de réduire le correcteur tout en produisant plus de lait au printemps », souligne la nutritionniste.

Augmenter la production par vache

Les éleveurs scrutent surtout la marge aux 1 000 litres et moins à la vache, car leur facteur limitant n’est pas le nombre de vaches. Aujourd’hui, leur marge de progression passe par l’augmentation de la production par vache. Leur potentiel génétique est sous-exploité. L’index de production laitière est bien plus élevé au Gaec comparé à la moyenne des troupeaux pie rouge de la zone Innoval. Et pourtant, la productivité est comparable au groupe : 7 700 kg de lait par vache sur 305 jours de lactation.

« Sans changer leur stratégie économe en complémentation, les éleveurs peuvent encore améliorer leur qualité de ration, estime Solenn Roignant. Pour l’ensilage de maïs, il s’agirait d’augmenter la digestibilité du fourrage et de viser un taux d’amidon plus élevé. Cela permettrait de produire plus de lait tout en réduisant le correcteur énergétique. Le mélange fermier peut encore gagner en qualité de broyage pour améliorer la disponibilité de l’énergie. Pour l’ensilage d’herbe, couper les brins vraiment courts (30 mm maximum) pour une bonne homogénéité de ration et une meilleure conservation. Enfin, nous pouvons travailler la préparation au vêlage pour de meilleurs démarrages en lactation. »

Pour le correcteur azoté, les éleveurs travaillent avec des matières premières, ce qui permet de contenir le coût. « Nous pouvons encore gagner en passant des contrats pour se prémunir des fluctuations de prix », estiment les éleveurs.

Projet d’augmenter le pâturage

L’analyse de la marge sur coût alimentaire montre que le Gaec performe au printemps grâce à une bonne valorisation du pâturage, mené sur 18 hectares accessibles découpés en sept paddocks, avec une conduite au fil avant poussé tous les deux jours. « Le pâturage peut alors peser jusqu’à la moitié de la ration de base des vaches traites », indiquent les éleveurs. Sur cette période, la production par vache est la plus élevée – 28 l/VL/j contre 23 en hiver –, le coût alimentaire est le plus faible – 125 à 135 €/1 000 l contre 170 à 190 € en hiver –, et l’efficacité alimentaire est la meilleure avec un rapport de plus de 1,50 entre la production laitière standard et le niveau d’ingestion.

Benoît Le Gal et Antoine Le Morvant veulent donc développer davantage le pâturage des vaches traites. Pour cela, il leur faut plus d’hectares accessibles. « Aujourd’hui, avec 16 ares par vache, il faut complémenter le pâturage même en période de forte pousse de l’herbe. Notre projet, quand des remboursements de prêts se termineront, sera de faire construire un boviduc pour agrandir la surface accessible et passer à 38 hectares. »

Fiche élevage

110 vaches traites : 70 % de pie rouge, 25 % de prim’Holstein et 5 % de normande

8 200 l/VL/an

103 ha de SAU, dont 51 ha de prairies, 45 ha de maïs fourrage, 5 ha de céréales et 2 ha de betterave fourragère

Au printemps 2025

Un bon produit lait grâce aux taux

Une marge sur coût alimentaire 
dans la moyenne du groupe

Moyenne annuelle du 4 juin 2024 au 4 juin 2025
Lait livré en l/VL25,6 l/VL
TB46,1 g/l
TP36 g/l
Cellules272 000/ml
Efficacité alimentaire1,45 l/kg MS ingérée
Prix du lait payé485 €/1 000 l
Coût alimentaire156 €/1 000 l
Marge sur coût alimentaire329 €/1 000 l
Produit12,43 €/VL/j
Charges4 €/VL/j
Marge8,44 €/VL/j
Source : BR nutrition 

« La marge sur coût alimentaire est bonne et dans la moyenne du groupe de 160 éleveurs que nous suivons, qui est de 320 €/1 000 l environ sur les douze mois de juin 2024 à juin 2025 », pointe Solenn Roignant, nutritionniste au cabinet BR nutrition. Le prix du lait du Gaec est supérieur à la moyenne du groupe (472 €/1 000 l), grâce à la richesse du lait en matière grasse et en matière protéique. La marge bénéficie aussi d’une bonne efficacité alimentaire, c’est-à-dire supérieure à 1,3 et un coût alimentaire dans la moyenne du groupe (152 €/1 000 l).

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