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Marché des céréales - Peu de tension liée à la méthanisation, mais une surveillance accrue est nécessaire, selon FranceAgriMer

FranceAgriMer (FAM) prône une meilleure traçabilité des matières premières entrant dans les méthaniseurs. Le modèle français diffère largement de celui en Allemagne, consommant davantage de céréales.

Un méthaniseur dans la Marne
© Kévin Cler, La Dépêche Le Petit Meunier

La méthanisation agricole (ou à la ferme) en France se développe, consommant des produits issus de l’agriculture, faisant craindre à certains une potentielle tension sur les marchés locaux des céréales, à savoir une concurrence entre débouché énergétique et alimentaire. Mais selon une étude de FranceAgriMer (FAM) publiée fin septembre 2022, ces frictions sont actuellement très faibles, la filière nationale se basant sur une logique de réutilisation des déchets, entraînant une faible consommation des cultures végétales par les méthaniseurs. Les productions françaises de grains sont largement suffisantes pour satisfaire les besoins des filières de l’élevage et de la méthanisation aujourd’hui et dans un futur proche, d’après elle.

 

Mais un phénomène qui n’existait pas il y a quelques années et qui se révèle, même très faiblement, suffit pour éveiller l’attention. « Des déséquilibres entre besoins et disponibilités en matières premières méthanisables sont observés dans les régions d’élevage peu céréalières » et vice versa, explique par exemple l’étude de FAM.

Combien de transferts de maïs grains vers du maïs ensilage pour la méthanisation ?

Certains opérateurs de marché évoquent le fait que des méthaniseurs paient parfois davantage des cultures que des organismes stockeurs (OS) ou fabricants d’aliments pour animaux (FAB). Par exemple, l’agriculteur avance sa récolte au lieu d’attendre la maturité du grain, et fait éventuellement passer son maïs en ensilage, pour le vendre ensuite aux méthaniseurs. « Nous avons observé des cas ces dernières années, et spécialement pour le maïs, où des méthaniseurs payaient les agriculteurs entre 10 à 30 €/t de plus qu’un OS. Et cela se répercutait sur le FAB, qui devait lui aussi payer un surcoût pour avoir la marchandise », déclare un opérateur anonyme. Il précise que ce genre de cas de figure n’arrivait pas au début des années 2010, et qu’il s’agit donc d’un phénomène récent. Ainsi, il se peut que certains transferts de surface en maïs grains vers du maïs ensilage relevés par les services statistiques du ministère de l’Agriculture (Agreste) soient destinés aux méthaniseurs.

L’opérateur indique que seuls des cas ponctuels et localisés (régions céréalières comme la Beauce, par exemple) de ce type sont rapportés. « Les tensions surviennent surtout en maïs, juste avant la récolte, sur la période août-octobre. Après, il n’y a plus de soucis », assure-t-il.

Il n’est actuellement pas possible de donner de chiffres précis de cultures céréalières ou autre, appelées « cultures principales dédiées », destinées aux méthaniseurs, tant les volumes et les surfaces concernées sont minimes. Par ailleurs, d’autres scénarios existent : « Avec la flambée des prix des intrants, j’ai constaté des cas où le méthaniseur propose son digestat, fertilisant d’une valeur globalement semblable à un lisier, comme facteur de base à la livraison d’ensilage », témoigne Guillaume Ponsin, dirigeant de la société Biogaz Pro, et céréalier.

Environ 816 000 t de matières de brutes de cultures principales dédiées dans les méthaniseurs français

Se basant sur les données de l’Observatoire national des ressources en biomasse, FAM estime que l’Hexagone comprend 1 065 méthaniseurs agricoles au 31 décembre 2021, et que 840 sont en attente (marge d’erreur de 0 à 10 unités), contre 37 en 2010, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Parmi les intrants consommés par ces installations, soit environ 14,673 millions de tonnes de matières brutes (toutes matières premières confondues : effluents d’élevages, déchets de l’agroalimentaire…), 5,5 % d’entre eux seraient des cultures principales dédiées, soit quelque 816 000 tonnes de matières brutes (cf. diagramme circulaire).

 

 

Malheureusement, les volumes présentés résultent d'estimations imprécises. FAM a en réalité procédé à une extrapolation sur les treize grandes régions françaises de données obtenues auprès des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) de cinq régions : Bretagne, Normandie, Auvergne-Rhône-Alpes, Grand Est et Pays de la Loire.

FAM conclut d’ailleurs son étude en recommandant « la mise en place d’un dispositif robuste et pérenne de collecte exhaustive d’informations sur les approvisionnements en biomasse des installations de méthanisation en fonctionnement, et sur les plans d’approvisionnement des unités en projet à un instant T est indispensable. »

Pas plus de 15 % de cultures dédiées dans les méthaniseurs

La réglementation française limite l’usage de cultures dédiées aux méthaniseurs. Un maximum de 15 % de ces dernières peuvent y être incorporées. De plus, « même sous le seuil de 15 %, le prix payé du biogaz produit subit une décote », précise Guillaume Ponsin. Le modèle français diffère de l'allemand, qui prône l’atteinte d’objectif de production d’énergie, peu importent les matières premières utilisées, du moment qu’elles sont renouvelables et remplacent l’énergie atomique. Aujourd’hui, selon l’Agence des ressources renouvelables (FNR) du ministère fédéral de l’Alimentation et de l’Agriculture allemand, 1,6 Mha de cultures, dont 877 000 ha de maïs, alimentent plus de 9 000 méthaniseurs allemands.

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