Mieux utiliser les médicaments avec la pharmacovigilance
L’Anses rappelle que le signalement, par les vétérinaires ou les éleveurs d’effets indésirables suite à l’utilisation de médicaments vétérinaires, aide à mieux connaître ces médicaments.
Il est important que tout effet indésirable observé suite à l’utilisation d’un médicament vétérinaire fasse l’objet d’une déclaration de pharmacovigilance via le vétérinaire de l’élevage ou directement par l’éleveur. Ces déclarations individuelles sont ensuite analysées par l’Anses-ANMV (Agence nationale du médicament vétérinaire) ou le CPVL (Centre de pharmacovigilance vétérinaire de Lyon). Comparativement à d’autres espèces, la filière ovine ne déclare que peu d’effets indésirables. Cela concourt à rendre l’analyse délicate car les éléments disponibles sont peu nombreux.
Néanmoins, trois cas issus de déclarations récentes rappellent la nécessité de bien lire les notices des médicaments et de respecter les bonnes pratiques d’administration afin de garantir leur utilisation sans risque pour les élevages.
1 De nombreux abcès après une vaccination sans précaution contre le piétin
700 moutons croisés Mérinos ont reçu une dose de vaccin afin de prévenir le piétin. Compte tenu du nombre d’animaux à vacciner, l’antisepsie avant l’injection n’a pas été optimale, et les injections ont été effectuées sans contention à divers endroits du corps (encolure, dos…). Dix jours plus tard, chez environ 240 moutons, un gonflement est apparu au niveau du site d’injection, évoluant en quelques jours en abcès, ulcère puis nécrose. Le vétérinaire a cureté et désinfecté les abcès de façon à permettre la cicatrisation, mais elle n’est pas effective pour tous : trois mois plus tard, 200 moutons sont guéris mais ont des cicatrices, 40 présentent encore une plaie ulcérée.
Comme indiqué dans sa notice, le vaccin contre le piétin est connu pour provoquer des réactions locales au point d’injection se traduisant par une enflure. En cas de contamination par des germes présents sur la peau au moment de l’injection, des abcès purulents peuvent se former. Il est recommandé d’utiliser des seringues et des aiguilles stériles lors des vaccinations notamment contre le piétin. Une bonne contention des animaux est également nécessaire pour bien réaliser l’injection en sous-cutanée dans une zone de peau propre, si possible au moins six semaines après la tonte.
2 Des cas de cécité suite à une surdose d’antiparasitaire interne
Un lot de 400 agnelles de race Lacaune pesant entre 35 et 50 kg a été traité contre les vers avec un vermifuge contenant du closantel. Tous les animaux ont reçu une dose de 20 ml par la bouche au moyen d’un pistolet automatique. Deux jours plus tard, une vingtaine d’agnelles, surtout les plus petites, présentaient un abattement et étaient devenues aveugles. Six sont finalement mortes. Ces symptômes sont classiques d’une toxicité liée au médicament. La posologie de celui-ci est de 2 ml/10 kg de poids vif. Les agnelles pesant entre 35 et 50 kg ont donc reçu deux à trois fois la dose recommandée. Lors de traitement collectif, l’utilisation de seringue automatique est un gage d’efficacité. Il faut toutefois veiller à disposer d’un matériel capable de délivrer la bonne posologie et qui peut être réglé pour s’adapter au poids de chaque animal.
3 Des mammites suraiguës après l’administration d’un produit de tarissement sans respect des règles d’asepsie
Entre mi-juillet et mi-septembre, les 200 brebis laitières d’un même élevage ont été traitées au tarissement avec des seringues intramammaires d’antibiotique. Dans les jours qui ont suivi, de nombreuses brebis ont présenté des mammites sévères et six sont mortes malgré les traitements mis en place. Après une étude approfondie, il s’avère que les conditions d’hygiène, notamment la désinfection des trayons, n’ont pas toujours été respectées lors du traitement, faute de temps. Les analyses bactériologiques ont révélé la présence de Pseudomonas aeruginosa dans la mamelle des brebis mortes, germe qui n’est pas sensible à l’antibiotique présent dans le produit de tarissement. L’administration de produit de tarissement sans désinfection préalable des trayons peut être responsable de l’introduction dans la mamelle de germes contre lesquels l’antibiotique contenu dans le médicament n’est pas actif. Il est donc important de respecter scrupuleusement les règles d’hygiène mentionnées dans la notice et d’utiliser les serviettes nettoyantes fournies avec le produit.
La pharmacovigilance vétérinaire surveille les médicaments commercialisés
La surveillance continue des risques et des bénéfices des médicaments commercialisés est réalisée grâce au système de pharmacovigilance, contribuant ainsi à l’amélioration constante de la connaissance de ces médicaments. L’objectif de la pharmacovigilance est de pouvoir détecter le plus rapidement possible tout signal émergent, qu’il s’agisse d’un effet indésirable inattendu, ou bien attendu mais dont la fréquence ou la gravité est inattendue, et de prendre ensuite les mesures adéquates de gestion du risque (modification de l’autorisation du médicament, suspension…). Un effet indésirable attendu est un effet indésirable déjà connu et mentionné dans la notice du médicament. Un effet indésirable inattendu est un effet indésirable qui n’a encore jamais été observé suite à l’administration du médicament. Des analyses et des investigations plus poussées sont généralement nécessaires pour établir le rôle précis du médicament dans la survenue de cet effet.
En savoir plus
Comment déclarer les suspicions d’événements indésirables ?
La déclaration des événements observés peut se faire via le vétérinaire qui suit l’élevage ou directement par internet sur pharmacovigilance-anmv.anses.fr. L’éleveur peut aussi télécharger et remplir un formulaire à renvoyer au CPVL. Il peut enfin déclarer par téléphone (04 78 87 10 40) mais cet appel doit être suivi d’un retour par courrier de la fiche de déclaration envoyée par le CPVL. Il est important de remplir la déclaration de la façon la plus précise et la plus détaillée possible, afin de permettre une exploitation optimale des données. S’ils sont disponibles, les examens de laboratoire, rapports d’autopsie, photos ou toute autre donnée pertinente doivent être joints au dossier, et les diagnostics différentiels plausibles pris en considération.