Alimentation animale : vous avez tout à gagner à nourrir vraiment vos vaches laitières à volonté
Êtes-vous sûr que vos vaches sont bien nourries à volonté? Cette condition est essentielle pour améliorer la production laitière en valorisant au maximum les fourrages. Le robot d'alimentation et le repousse-fourrage y contribuent.
Êtes-vous sûr que vos vaches sont bien nourries à volonté? Cette condition est essentielle pour améliorer la production laitière en valorisant au maximum les fourrages. Le robot d'alimentation et le repousse-fourrage y contribuent.


Pas de bon calcul de ration sans une distribution à volonté
Pour améliorer l'efficacité de la ration des vaches laitières, « rien ne sert de peaufiner l’équilibre d’une ration si celle-ci n’est pas distribuée à volonté aux vaches », souligne Julien Jurquet, responsable alimentation et nutrition des bovins à l’Idele.
« En effet, pour le calcul d’une ration, l’ingestion est la donnée de base, poursuit-il. Et le modèle Inrae de rationnement prédit l’ingestion des vaches selon leur poids, leur stade de lactation, leur production laitière potentielle … et sur le postulat que les animaux sont nourris à volonté. Mais sur le terrain, ce n’est pas souvent le cas. Or, si on se trompe sur les quantités ingérées, la ration ne correspondra pas aux besoins : soit les vaches seront sous-alimentées, soit il y aura du gaspillage. »
Avant de se demander s'il est opportun d'ajouter du concentré de production pour faire plus de lait, il faut d'abord savoir si les vaches disposent bel et bien d'une ration de base à volonté. « Si la production laitière augmente beaucoup suite à l’ajout de concentré, cela indique que les vaches étaient sous-alimentées en ration principale. Dit autrement, alimenter à volonté avec la ration de base favorise la consommation des fourrages et permet de limiter le recours aux concentrés, par rapport à une situation où la ration n’est pas à volonté », développe Julien Jurquet.
Avec une ration suffisante en quantité et repoussée régulièrement, les vaches savent qu’elles ne manqueront pas et peuvent étaler leurs prises alimentaires. À l’inverse, quand la ration est limitée, les vaches peuvent chercher à compenser un manque en mangeant davantage en un gros repas. Si la ration est riche en amidon et faible en fibre – bref acidogène –, ce comportement provoque plus facilement des déviations fermentaires, voire de l'acidose.
«À volonté» n’est pas qu’une question de quantité
Il peut y avoir suffisamment de ration en quantité journalière distribuée, mais certaines vaches manqueront de ration à cause de phénomènes de compétition entre vaches, quand il y a moins d’une place à l’auge par vache. Les vaches peuvent aussi manquer parce qu'une partie de la ration n’est plus préhensible, quand le fourrage n’est pas repoussé régulièrement.
Pour distribuer à volonté sans gaspiller de la ration, un bon indicateur est ce qu’il reste dans la table d’alimentation. « S’il ne reste plus rien d’attrapable par les vaches, c’est que la ration n’est pas à volonté. À ce stade, on ne sait pas encore combien il manque, mais on sait que du concentré de production aurait pu être économisé », expose Julien Jurquet.

Pour évaluer la quantité de fourrage manquante, la caméra timelapse est un outil. « L’éleveur verra alors à partir de quand l’auge est vide. Cela permet aussi de voir s’il y a de la concurrence entre les vaches. »
Accepter environ 5% de restes
Pour corriger le tir, le conseiller préconise d’y aller à tâtons, en distribuant un peu plus de ration, et en observant s’il y a des restes ou pas. « On vise environ 5 % de refus – il faudrait parler plutôt de restes – consommables et attrapables par la vache. Par exemple, si je distribue 2 tonnes par jour, il faut qu’il reste environ 100 kg de refus dans l’auge. Pour faire bien, il faut régulièrement repousser la ration. D’où l’intérêt du repousse fourrage ou carrément d’un robot qui distribue plusieurs fois dans la journée. »
Robot et repousse-fourrage aident à nourrir «à volonté»
Dominique Landais, consultant nutrition et robot chez Seenovia, pointe que souvent dans les fermes non robotisées, « les vaches ne sont pas nourries à volonté, car cela implique d'accepter qu'il y ait au moins 5% de restes : les restes sont des refus liés à la satiété de l'animal et non à la qualité ou à l'appétence de la ration. Souvent, les éleveurs ne veulent pas retirer autant d'aliments ‘sains'. Quand le robot d'alimentation est là, c'est lui qui gère. Il est programmé pour distribuer la ration à volonté et l'éleveur est bien obligé de l'accepter. »
Julien Jurquet reconnaît que « le robot d’alimentation facilite l’alimentation à volonté les vaches. La fréquence de distribution, plus élevée qu’en système non automatisé, aide à garder l’auge remplie malgré des quantités distribuées plus faibles à chaque passage. Le robot lève ainsi un facteur limitant de la production laitière, qui est l’ingestion. »
Pour autant, « Si l’installation d’un robot d’alimentation se traduit par des vaches produisant davantage de lait, c’est que la situation de départ n’était pas optimale : la ration de base n’était pas distribuée à volonté ou les phénomènes de compétition conduisaient une partie du troupeau à ne pas être à volonté, nuance Julien Jurquet. Si les apports et l’accès à la ration sont restés les mêmes, il n’y a pas de raison pour que les vaches produisent davantage. »
C'est ce qui s'est passé lors de l'expérimentation à la ferme Arvalis de La Jaillière en 2009, où les refus représentaient 7% de la ration distribuée pour le lot témoin avec une seule distribution par jour. L'augmentation de la fréquence de distribution n'avait pas amélioré l'ingestion.
À Retenir
Le trio gagnant pour une bonne ingestion est : une ration de base distribuée à volonté, avec des fourrages bien conservés et bien préparés avec des brins courts.
Le robot d'alimentation : un amplificateur, en bien ou en mal
« Le robot d'alimentation est, comme tous les systèmes d'automatisation, un amplificateur technique, en positif ou en négatif, plante Dominique Landais, consultant nutrition et robot chez Seenovia. J'ai constaté des situations où il y avait une détérioration de l'ingestion et de la production laitière. Par exemple, si les vaches peuvent trier dans la ration, elles consommeront une ration différente dans la journée ou entre elles. Certaines vaches « dominantes » consommeront trop de concentrés et d’autres « dominées » trop de fibres. Si la préparation de la ration n'est pas rectifiée, la situation ne peut que se dégrader. »

Selon le conseiller, le robot peut avoir un effet positif indirect. « Il génère des données et l'indicateur d'efficacité alimentaire. Le suivi est donc facilité. Si l'efficacité alimentaire tombe sous 1,30 litre de lait produit par kilo de matière sèche ingérée, cela alerte l'éleveur. Il peut alors analyser les données, afin de trouver des solutions, pour améliorer la conservation des fourrages et la présentation de la ration : une longueur des brins à l’auge de 30 mm pour l'herbe conservée idéalement, et 10 mm pour l'ensilage de maïs, un taux de MS de 35-38% à l'auge. Tout mis bout à bout, cela permet d'améliorer l'efficacité alimentaire. Ce travail est bien évidemment possible sans robot d'alimentation. Le robot, en levant des contraintes de temps et de pénibilité, et en permettant de piloter, facilite ce travail. »