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Meunier, un métier à haut risque

La volatilité, une donnée avec laquelle tous les meuniers ne sont pas sûrs de pouvoir composer et qui accélère la restructuration du secteur

« En 2008, beaucoup de moulins ont dû supporter une augmentation du prix de leur matière première supérieure à leurs fond propres », a expliqué Joseph Nicot, président de l’ANMF (Association nationale de la meunerie française), lors d’une conférence de presse le 26 juin à Paris. Résultat : la concentration du paysage industriel s’accélère. « Sur les 18 derniers mois, 25 des 100 premières entreprises meunières françaises ont changé de main, soit 10 % de la production », a-t-il rappelé.

Les meuniers aspirent à plus de transparence sur le marché à terme européen

Ce n’est pas tant la hausse que la volatilité qui « fragilise les transformateurs », a insisté Joseph Nicot. L’occasion pour celui-ci de pointer du doigt l’effet amplificateur pour l’évolution des prix de l’intervention d’opérateurs financiers sur les marchés à terme. S’il ne dénonce pas leur présence, nécessaire au fonctionnement de ces marchés, le professionnel aspire à davantage de visibilité : « Nous souhaitons avoir accès au nombre de contrats détenus par les opérateurs non-commerciaux sur Euronext, pour anticiper les retournements de tendance. » En effet, « il existe une grande corrélation entre la proportion de contrats qu’ils détiennent et la nervosité du marché » assure le président de l’ANMF. Les fluctuations de 10 % enregistrées au cours d’une campagne, qui prévalaient jusqu’en 2005, ont laissé place à des deltas de 60 % en 2006 et 2007, rappelle l’association. « Le cours du blé ne doit plus être l’objet de spéculations financières sans limites », insiste Joseph Nicot. La meunerie française souhaite alors également « la mise en place de limites de hausse et de baisse sur le marché à terme européen ». A la demande de l’association française et de l’Européen Flour Millers, Bruxelles se pencherait sur la question. A la base de l’alimentation, « le blé n’est pas un produit comme les autres. Comme on cherche à le faire sur les marchés financiers, il est nécessaire de moraliser le marché », insiste le président de l’ANMF. Regrettant la grande dérégulation orchestrée au niveau international, celui-ci appelle par ailleurs une nouvelle fois à la création de stock de précaution en Europe et en France, pour se prémunir notamment des aléas climatiques. Une initiative qui « doit venir du gouvernement » et qui aurait un coût, mais « bien moindre que si aucune précaution n’était prise ! argumente le représentant des meuniers, ajoutant : C’est une assurance.» Enfin l’ANMF suggère une réduction des barrières tarifaires à l’import et à l’export.

Vers des départs anticipés

Face à la volatilité des prix et sur un marché « d’extrême concurrence », « le métier est devenu trop risqué aux yeux de certains, qui ne se trouvent pas suffisamment armés et pourraient anticiper leur sortie du métier », confie Joseph Nicot. Dans cette logique, « ils engagent de moins en moins leurs enfants à les remplacer. » Il faut donc s’attendre à une nouvelle vague de restructuration, selon le représentant des meuniers. Certaines unités vont tout simplement mettre la clef sous la porte en raison « de difficultés financières», liées, une fois encore, à l’instabilité du marché du blé. En 2008 déjà, « 31 moulins ont cessé leur activité ».

Un secteur déjà très concentré

Alors qu’il y a quelques années les moulins étaient rachetés par des coopératives locales, désormais, les transactions sont le fait des groupes meuniers. Une tendance traduisant la concentration de l’aval, qui aspire à des offres d’envergure nationale. En 2008, 13 entreprises ont assuré 72,5 % de l’écrasement tricolore. Quatre d’entre elles, représentant 49 moulins sur les 451 de l’Hexagone (au 31/12), couvrent l’ensemble du pays. Elles ont assuré 55,2 % de l’écrasement. Il s’agit de Nutrixo, Soufflet Meunerie, Ariane Meunerie et Grands Moulins de Strasbourg. A leurs côtés, 9 entreprises (31 moulins) de dimension pluri-régionale ont transformé 17,3 % des blés travaillés par la meunerie française et 69 (76 unités), rayonnant au niveau régional, ont assuré 21,2 % de l’écra­sement. Enfin, on dénombre 294 structures à portée départementale, représentant 6,2 % de l’écrasement français ! Cette multitude de petites unités reflète un réseau des boulangeries artisanales encore dense, de 33.000 clients, et dynamique (cf. " La demande artisanale...") puisqu’elles affichent en 2008 une consommation en légère hausse. La plupart des mouvements attendus dans le paysage meunier devraient d’ailleurs se faire entre les entreprises régionales et les pluri-régionales.

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