Aller au contenu principal

Les pâtes victimes du lissage des prix

­­­­Montrés du doigt, les prix des pâtes ont pourtant déjà amorcé un reflux

LES PATES ont beaucoup fait parler d’elles ces derniers temps. Les médias les ont désignées comme l’illustration du lent reflux des prix en rayon alors que la ministre de l’Economie, Christine Lagarde, annonçait dès août, tandis que les prix agricoles reculaient, des effets « rapides sur le prix des produits alimentaires ». Or si l’inflation des prix à la consommation à un an s'est nettement modérée, à 0,7 %, le gouvernement s’étonne de la hausse de certains produits de consommation courante, et notamment de certaines pâtes. Sur janvier, leur prix moyen a progressé de 11 % sur 2008, selon une étude Nielsen. Le magazine 60 millions de consommateurs, qui a scruté 1430 références de grandes surfaces, s’étonne de son côté de voir certaines pâtes de marque fortement progresser. Les torsades Barilla ont ainsi renchéri de 12,5 %. Et plusieurs produits Panzani affichent des hausses de plus de 10 %, mais le leader français se classe aussi dans le palmarès des plus fortes baisses (-6,3 % sur les coquillettes). « Il existe quelques augmentations qui interpellent », commentait Luc Chatel, le secrétaire d’Etat à la Consommation. Ce dernier a convoqué, le 24 février à Bercy, les représentants des industriels pour faire la lumière sur la situation, juste avant la fin des négociations tarifaires avec les distributeurs. L'enjeu était d'autant plus grand pour le gouvernement qu'il s'agissait des premières tractations sous le joug de la LME sensée faciliter la baisse. Alors, la filière blé dur est-elle un mauvais élève de la lutte pour le pouvoir d'achat ?

Les pastiers ont dû se justifier à Bercy

Les transformateurs du blé dur ont eu l’occasion « de faire valoir leur position » auprès de Luc Chatel, dans le cadre de la réunion provoquée par le secrétaire d’Etat. Oui, les prix des pâtes ont grimpé de 11 % par rapport à janvier 2008, « mais l’inflation à un an a fortement diminué » durant ces derniers mois (cf. graph), souligne le Sifpaf (Syndicat des industriels fabricants de pâtes alimentaires de France). Comme l’indique le directeur marketing de Nielsen dans une interview à LSA, « elle était de 16 % en décembre ». Ces chiffres montrent que « la baisse des cours des matières premières est en train d’être répercutée par la filière », assure Christine Petit, secrétaire générale du syndicat. En effet, comme le font la plupart des transformateurs, face à la volatilité des marchés, les industriels n'ont pas répercuté tout de suite, ni intégralement, la tension des prix. Ils ne peuvent donc traduire immédiatement la détente. Du fait de ce lissage des prix, les tendances ne s’observent dans les linéaires qu’après « 4 à 6 mois ». Le paquet de 500 g de coquillettes Panzani a ainsi baissé de 8,4 % au cours du dernier trimestre 2008 (0,87 € en décembre contre 0,95 € en septembre) et est « revenu à son niveau de janvier 2008 ». Et le mouvement devrait donc s'accentuer. Un élément à souligner néanmoins : le cours du blé dur n'a pas renoué avec son niveau de début 2007. Et, comme l'a signifié le Sifpaf devant Luc Chatel « s’il a baissé de 36 % entre juillet et décembre 2008, il est reparti à la hausse ». De 190 €/t rendu Lapallice en décembre, il culmine à plus de 220 €/t fin février, soit un rebond de près de 20 % ! Il reste en hausse de 50 à 70 % sur 2006.

En douze ans, la hausse du prix des pâtes est très inférieure à l’inflation

Quel est l'impact des ces fluctuations sur le porte-monnaie des Français, puisque c'est là tout l'enjeu du débat ? L'inflation du prix des pâtes a été quasi nulle de 1997 à 2007, rappelle la représentante des pastiers. Et depuis 1997, la progression est deux fois moins élevée que l'inflation ! En douze ans, le prix d'un paquet de marque n'a donc augmenté que de 12 % soit 20 fois moins que le prix du blé dur. Le budget pâtes des foyers étant d'1,5 € par mois (pour 11kg par foyer/an), en douze ans, les dépenses mensuelles pour les pâtes ne se sont donc alourdies que de 18 cts.

Rappelons que la filière française, déjà confrontée à la concurrence des exportateurs italiens qui détiennent 50 % du marché hexagonal, « est sortie très affaiblie de la crise mondiale spectaculaire et sans précédent » de 2007/2008, avec un prix du blé dur multiplié par trois. « Toutes les sociétés productrices de pâtes ont perdu de l'argent », regrette Christine Petit. La situation fait même vaciller le numéro 3 français, Alpina Savoie, dont la procédure de sauvegarde est prolongée jusqu'en juillet. Et Christine Petit de rappeler : « en 40 ans, l'industrie française est passée de 200 à 5 fabricants ». Et derrière, c'est tout un pan de l'agriculture qui est menacé, alors que la production de blé dur est « vitale pour des régions comme le Sud-Est, où aucune autre culture ne peut se développer de manière rentable ». « Très inquiète pour sa pérennité », la profession a cherché à sensibiliser le gouvernement. Une réflexion est engagée « pour sécuriser la filière” en vue de « préserver les emplois agricoles et alimentaires et pour l'indépendance de la France sur un produit stratégique ».

Les plus lus

Diapositive d'une présentation lors d'une conférence des JTIC 2025 montrant 3 cartes de risques de production de blé tendre en Beauce
Changement climatique : le blé tendre devient une culture risquée en Beauce

Lors de l'édition 2025 des Journées techniques des industries céréalières (JTIC) à Auxerre le 16 octobre, le cabinet Diagorisk…

Marché des engrais : sous tension avec l'application de la taxe MACF au 1er janvier 2026

Mouvementé, Novembre a démarré par un fort regain d’activité sur le marché des engrais dû à des rattrapages, malgré les…

Photo de groupe de l'équipe dirigeante de Maïsadour lors de la conférence de presse du 5 décembre 2025
Maïsadour : après une récolte 2025 difficile, cap vers l’agriculture régénérative

Après une récolte marquée par des conditions climatiques difficiles et de mauvais rendements, le groupe coopératif…

Alimentation animale : malgré la hausse des fabrications, les capacités d’investissement s’effritent

En dépit d’un contexte économique et sanitaire tendu, les fabrications d’aliments pour animaux se maintiennent. Mais la…

Graphique prix colza tournesol France au 24 novembre 2025
Marché des oléagineux du 24 novembre 2025 - Les États-Unis attendent un nouvel accord avec la Chine sur le soja

L’évolution des prix du colza et du tournesol français entre le 21 et le 24 novembre 2025, expliquée par La Dépêche-Le Petit…

manifestants tunisiens avec pancartes réclamant la fermeture des usines de phosphate à Gabès à Paris le 26 octobre 2025
Engrais : les manifestations contre les usines tunisiennes de Gabès n’auront pas d’impact sur le marché des phosphates

Depuis le 10 octobre dernier, la ville de Gabès en Tunisie est agitée par un vaste mouvement populaire réclamant la fermeture…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 958€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site La dépêche – le petit meunier
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez votre revue numérique la dépêche – le petit meunier
Recevez les évolutions des marchés de la journée dans la COTidienne