Malteries Franco-Belges
La torréfaction, un savoir-faire qui donne du caractère
Le site de Pithiviers des Malteries Soufflet torréfie ses malts pour permettre aux brasseurs, mais aussi aux boulangers, de proposer des produits plus typés.




Encore un prélèvement de quelques grains dorés pour vérifier si la couleur recherchée est atteinte. à l’œil, cela semble bon. Une analyse rapide pour vérifier si la teinte répond à l’objectif. Un peu juste. Le spécialiste modère un peu la flamme et patiente à nouveau. L’opérateur chargé de la torréfaction des céréales sur l’unique unité française de cette spécialité reste patiemment posté à la sortie « de la boule ». Et pour cause : « La montée en couleur s’opère rapidement. Cela se joue à la minute ! », confie Erwan Troalen, ex-brasseur qui orchestre le site de Pithiviers (45), propriété des Malteries Soufflet. « La torréfaction est un art, estime Nicolas Rosa, directeur commercial adjoint de la division Malterie du groupe Soufflet. « Cette transformation nécessite des compétences difficiles à trouver », souligne-t-il. De fait, « nous nous sommes formés sur place avec les anciens », témoigne Pierre Vagner, responsable de l’atelier. Les techniciens jouent sur deux paramètres pour donner couleur et saveur à leurs malts : la chaleur et le temps. « De 3.000 t, il y a dix ans, la production s’élève à 9.500 t/an aujourd’hui », rapporte Erwan Troalen. Sur un marché de la bière arrivé à maturité, la qualité s’est diversifiée. Et les malts spéciaux fabriqués sur Pithiviers permettent de concocter des produits plus typés. La renaissance de la brasserie artisanale, qui cherche justement à se démarquer, alimente cet essor. « Le jeu des assemblages confère une grande latitude et diversité de recettes propres à chaque brasseur », explique Nicolas Rosa, précisant qu’une bière comprend au moins 65 % de malts Pilsen, donc non torréfiés.
Des malts Caramels ou Colorants
L’atelier confectionne deux catégories de malts. « Les Caramels confèrent arômes et couleurs », précise le responsable commercial des malteries. Ils sont réalisés à partir de “malts verts”, passés directement en torréfaction après germination, sans étape de touraillage (l’étape final de séchage qui stabilise le grain malté). Ils sont soumis à des températures pouvant atteindre 230 °C pendant deux heures environ. L’usine consacre deux torréfacteurs à cette production. De 3 t en entrée, 2,5 t de malts torréfiés sont récupérées en sortie. Les radicelles des “malts verts”, récupérées habituellement après le touraillage, alimentent la nutrition animale. Les malts Colorants, fabriqués sur un autre poste, sont, eux, utilisés par les brasseurs principalement pour moduler les teintes de leurs productions. Ils sont obtenus par passage des malts Pilsen dans la boule de torréfaction. Pour le stockage, un « test de couleur permet de qualifier chaque lot. Nous procédons ensuite à un assemblage entre les lots d’une même gamme de couleur. » Le plus sombre, le “black malt” d’orge, affiche un indice de couleur de 1.300, et le Caramel “Tourambré” autour de 50.
Les Malteries Soufflet proposent une gamme de 26 malts, dont 12 torréfiés et de nombreux spéciaux, y compris de blé, de seigle ou de maïs. La gamme intègre en outre 6 malts bio, produits sur le site certifié d’Arcis-sur-Aube.
Une autre filiale du groupe champenois, AIT Ingrédients, qui commercialise des farines spéciales à l’attention de la BVP, valorise ces malts par le biais de la micronisation. « Plus d’un quart de la production est destinée à l’industrie meunière, qui a largement participé au développement de la gamme », précise Nicolas Rosa. Conditionnés en sacs de 25 kg ou en big-bags, les malts alimentent une plateforme logistique, implantée dans l’Aisne, pour plus de réactivité dans l’approvisionnement des clients, mais aussi pour faciliter la logistique de Pithiviers. Mais les malts spéciaux partent aussi en conteneurs, notamment vers l’Amérique du Nord, une grande cliente.