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La meunerie scrute l’évolution de la Pac

Réunis à Strasbourg, les adhérents de l’ANMF se sont penchés sur le bilan de santé de la Pac qui s’oriente vers une libéralisation accrue du marché du blé

L’ASSOCIATION nationale de la meunerie française (ANMF) a tenu sa convention annuelle le 26 septembre à Strasbourg, au Parlement européen. Un lieu cadrant tout à fait avec l’actualité alors que la France préside l’UE et que s’était tenu, quelques jours auparavant à Annecy, un conseil informel de l’Agriculture pour préparer l’après-2013. Le choix du thème des interventions allait alors de soit : les meuniers ont passé au crible les orientations prises par le bilan de santé de la Pac. « Son évolution sera déterminante dans les variations de prix, elles-mêmes essentielles pour nous » résume Joseph Nicot, président de l’ANMF.

La sérénité n’est pas encore d’actualité

Les meuniers se sont retrouvés dans une ambiance apaisée, loin de la tempête de l’an dernier et du blé à 300 €/t. Apaisée, mais pas encore sereine. 2007 a bouleversé les habitudes des meuniers qui ont dû composer avec la volatilité, devenue lot commun. L’année a été marquée par de nombreuses restructurations. Mais le contrecoup des nouvelles lois du marché et de la flambée n’a pas fini de se faire sentir. « Je ne profite pas encore de la détente des cours », témoigne un meunier couvert à des prix supérieurs à ceux actuels. Plus encore, l’instabilité, couplée aux différentes politiques d’achats, créée des inégalités. En effet, si certains se sont engagés sur les longueurs avant le repli du marché, d’autres ont acheté leur blé récemment à des cours bien inférieurs. Une situation qui leur permet de pratiquer des politiques de prix « agressives ». Résultat, le marché des farines se montre « très concurrentiel ». L’ambiance est donc toujours tendue pour les meuniers. Commander du blé est devenu synonyme de « coup de Poker ». D’ailleurs, les industriels ne raisonnent plus le bilan de leur poste matières premières au coup par coup, mais plus que jamais en prix moyens annuels.

Constituer des stocks stratégiques

Assortie d’une kyrielle d’outils de gestion des marchés, la Pac, et les décisions de la Commission européenne, jouent un rôle déterminant dans l’évolution des prix. La plupart des leviers d’action sont remis en cause dans le cadre du bilan de santé, qui devrait aboutir fin novembre. Concernés au premier chef, les meuniers français prennent position dans le débat communautaire.

L’intervention est en particulier sur la sellette. Bruxelles veut la limiter au blé et mettre en place un système d’adjudications et de prix variable. Ce dispositif suffirait selon elle à garantir un filet de sécurité pour tous les marchés céréaliers. Pour les meuniers, « il faut soit ne rien changer, soit supprimer le système », explique Joseph Nicot. En effet, le principe d’adjudication « génèrerait trop d’incertitudes » et n’offrirait « pas suffisamment de visibilité aux opérateurs ». De plus, « nous nous sommes familiarisés avec les outils de couverture des risques tels que le marché à terme. Nous commençons à mieux nous y débrouiller », témoigne le président de l’ANMF, redoutant « un système d’intervention, au bon vouloir de la Commission, qui viendrait perturber les marchés ». Entre volatilité et développement de la demande, il est, selon le représentant des meuniers, « trop dangereux de rester sans filet de sécurité, comme cela a été le cas l’an dernier ». La profession plaide alors pour « la constitution de stocks stratégiques dans les pays européens » pour réguler les marchés et « éviter » d’éventuelles « ruptures d’approvisionnement ». Les moulins pourraient être mis à contribution, comme cela a été le cas par le passé.

Les minotiers français souhaitent par ailleurs que Bruxelles n’exclue pas d’appliquer des taxes à l’exportation. « Afficher une position défavorable » comme elle l’a fait « en début de campagne dernière( …) a encouragé la spéculation ». Mais, d’après Eric Giry, représentant du ministère de l’Agriculture, « la Commission répugnera de plus en plus à les utiliser » car c’est « un des outils les plus contestés à l’OMC ».

Pour augmenter la production céréalière, l’UE a supprimé l’an dernier la jachère obligatoire. Une initiative saluée par les industriels français et préalablement défendue, auprès des instances européennes, par le Gam. Cet organisme, qui représente les 25 associations meunières des Etats membres, a également obtenu la suspension des droits à l’importation pour conférer « plus de fluidité au marché », précise son président, Rolf Brack, dirigeant du groupe meunier allemand, VK Muehlen. Le Gam a également œuvré pour l’abrogation de la subvention de 45€/ha accordée à la production de blé destiné à la filière bioéthanol. « Ces aides importantes peuvent conduire à une réduction des disponibilités des céréales alimentaires » estime l’ANMF. Celle-ci défend donc « la proposition de la Commission d’abolir le plan actuel de soutien (…) et de renforcer la recherche » sur les agrocarburants de 2 nde génération.

Pour Rolf Brack, l’ensemble des mesures visant à favoriser la production de céréales pour l’alimentaire ne suffiront pas à répondre à l’accroissement annoncé de la demande mondiale. « Les surfaces n’étant pas extensibles », pour relever le « défi »de nourrir la planète, il faut selon lui « utiliser des OGM ». Les meuniers hexagonaux ont semblé étonnés d’une telle suggestion, voire même de l’existence de ce type de blé. Près de 72 % des Français ne souhaitent pas voir les OGM atterrir dans leurs assiettes. Avec un produit aussi empreint de tradition que le pain, gageons que nous ne sommes pas prêts de croquer des tartines transgéniques.

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