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Bière : et si les brasseurs pouvaient vendre sans licence?

A un moment difficile économiquement parlant pour le secteur brassicole, une nouvelle proposition de loi favorisant la vente des productions est proposée.

Un nouveau texte de loi pourrait autoriser les brasseuses et les brasseurs à pouvoir vendre leur production sans demander de licence.
© Rodolphe de Céglie

Le sénateur du département du Nord Jean Pierre Decool a présenté (le 9 juin 2023) un texte de loi (n° 718) « permettant aux brasseurs de bière de vendre les produits issus de leurs productions sans licence ». Cette idée rapprocherait le statut des producteurs et productrices de bière de celui des producteurs et productrices de vins récoltants – récoltantes.

Rapprocher le statut des brasseries de celui des vignerons récoltants

C’est pourquoi cette proposition de loi à article unique est présentée dans le cadre du Code général des impôts, au premier alinéa de l’article 502 dudit code. Le libellé prendrait la forme suivante : au premier alinéa de l’article 502 du code général des impôts, après le mot « récolte », sont insérés les mots « ou de bières issues de sa production ». Le même article de la nouvelle proposition propose également que la perte de recettes pour l’État résultant de la vente sans licence « est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services ».

Depuis le 1er juillet 1979, la loi permet aux producteurs de vin récoltants de vendre leurs productions sans devoir détenir une licence. « Le choix du législateur se comprend. Eu égard au regain de la filière brassicole, il serait opportun d'appliquer ce même régime aux brasseurs » enchaîne le texte. Ce même article 502 précise que « toute personne se livrant à la vente au détail de boisson ne provenant pas de sa récolte exerce son activité en qualité de débitant de boissons ». Ainsi, les propriétaires récoltants, ne sont pas soumis à l'obligation déclarative prévue à l'article L. 3332-4-1 du code de la santé publique, ceci quel que soit le lieu de vente de leurs produits, installation permanente ou foire et marché et n'ont ainsi pas à justifier de la possession d'une licence.

Essor des brasseries dans l’Hexagone, mais conjoncture économique contraire

Dans son exposé des motifs, le sénateur nordiste rappelle qu’en « 1910, il y avait 1 929 brasseries dans le nord de la France et 2 827 sur l'ensemble du territoire national, signe d'une activité économique conséquente. Cependant, lors de Première Guerre mondiale, de nombreuses brasseries, présentes sur les lignes de front, ont été détruites, réduisant leur nombre à 919. Le goût des consommateurs a changé, la fermentation basse s'est généralisée et des évolutions techniques se sont opérées. La Seconde Guerre mondiale a accéléré plus encore le mouvement. En 1947, 503 brasseries sont encore en fonction. En 1950, il n'en reste plus que 116. En 1976, seules 23 brasseries en France sont recensées ».

Il met aussi en avant le nouveau dynamisme dans ce secteur apparu ces dernières années. « Le secteur de la bière connaît aujourd'hui une transformation sans précédent. En effet, de nouveaux acteurs et de nouvelles recettes, ainsi que de nouveaux processus de fabrication favorisent l'essor des microbrasseries. Au début des années 80, ces changements ont rapidement conquis l'Europe. Cet essor répond à une volonté plus générale du consommateur d'aller vers des produits diversifiés, goûteux, naturels et locaux. C'est à l'année 1985, date de la création de la brasserie Coreff à Morlaix dans le Finistère que l'on attribue le début du renouveau de la brasserie française. Cet événement sera suivi, l'année suivante, par la création du premier site des 3 Brasseurs à Lille, enseigne aujourd'hui présente dans de nombreuses villes en France. Aujourd'hui, 2 300 brasseries sont recensées dans tous les départements français de métropole et d'outre-mer, preuve d'un regain considérable de cette activité économique. On compte plus de 5 000 marques de bière différentes. L'art de déguster et de parler de la bière s'est développé, un vocabulaire précis s'est imposé. Certes, le vin reste incontournable, cependant, les brasseries ont repeuplé tous les départements. La France est désormais leader de l'Union européenne en nombre de sites de production, le 8e pays producteur de bières en Europe. Notons aussi, 70 % des bières consommées en France sont produites en France » peut-on lire dans cet exposé ».

Lire aussi : Bières : des difficultés avérées pour la filière

Cependant, l’année 2023 devient complexe pour nombre de ces jeunes entreprises encore en phase d’investissement, en plein remboursement de leurs infrastructures et matériels de production et/ou en phase de conquête de leur marché. « Au total, plus des 2/3 de nos brasseurs constatent que leur entreprise va plus mal au 1er semestre 2023 qu'au semestre précédent. En effet, ces dernières subissent l'inflation, notamment due à l'augmentation du prix du verre. Une brasserie sur dix déclare envisager une fermeture définitive cette année, comme le révèle la nouvelle enquête réalisée par Brasseurs de France et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). La filière brassicole, étant inscrite au patrimoine culturel, gastronomique et paysager de la France, il est nécessaire de la protéger » précise le texte.

Le Syndicat national des brasseries indépendantes (SNBI) a déclaré se réjouir de cette initiative sénatoriale, déclarant par ailleurs porter cette proposition depuis 2018.  « En cette période particulièrement compliquée pour les brasseuses et brasseurs, le SNBI va tout faire pour que ce projet de loi soit présenté et aille jusqu'au bout » précise encore le syndicat dans un communiqué.

« C’est un sujet important pour les brasseuses et les brasseurs et nous accueillons avec beaucoup de bienveillance cette possibilité d’évolution législative » souligne Magali Filhue, déléguée générale de Brasseurs de France.

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