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Chronique
La HVE française a-t-elle une place face au bio européen ?

Comment se positionne la HVE française dans le paysage des certifications européennes ? Différences notamment avec la certification Agriculture biologique.

Face à des consommateurs de plus en plus sensibles aux enjeux environnementaux, de nombreux labels, certifications et mentions valorisantes se sont développés, afin de valoriser les produits issus de méthodes de production respectueuses de l’environnement. Mais face au bio, connu de longue date des consommateurs, la HVE française peine à se distinguer.

Répondant à l’objectif de la valorisation des systèmes de production agroécologiques, expressément insérés dans le Code rural (1) depuis 2014 (2), la certification environnementale remplace l’ancienne certification « Agriculture raisonnée ». Initiative nationale créée par la loi Grenelle 2 (3), la certification environnementale distingue les exploitations agricoles utilisant des modes de production particulièrement respectueux de l’environnement.

Suivant une logique progressive, elle se décline en trois niveaux d’exigence, dont le plus élevé correspond à la HVE (Haute Valeur environnementale) (4). Elle garantit l’atteinte, sur l’ensemble de l’exploitation agricole, de seuils de performance environnementale portant sur la préservation de la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et la gestion de la ressource en eau (5).

L’affichage conditionné à des seuils

Même si la certification environnementale s’applique aux exploitations agricoles, les produits bruts et les produits transformés, qui contiennent au moins 95 % de matières premières issues d’exploitations certifiées HVE, peuvent porter la mention « issu d’une exploitation à haute valeur environnementale ». Les autres denrées contenant un ou plusieurs ingrédients agricoles issus de ces exploitations (mais dans une proportion inférieure à 95 %) peuvent également le mentionner, soit immédiatement après le nom de l’ingrédient concerné dans la liste des ingrédients, soit dans une note au bas de cette liste (6) : un seuil et des modalités similaires – voire identiques à ceux fixés par la réglementation européenne encadrant la production biologique et l’étiquetage des produits biologiques (7).

Il convient de rappeler que le mode de production biologique vise non seulement à établir un système durable pour l’agriculture, mais aussi à produire des denrées alimentaires et autres produits agricoles utilisant des procédés qui ne nuisent pas à l’environnement, à la santé humaine, à la santé des végétaux ou à la santé et bien-être des animaux (8). Le cahier des charges associé à la production biologique fixe des exigences applicables, depuis la production des matières premières jusqu’à la distribution des produits, en passant notamment par leur transformation.

Des différences notables de cahier des charges

Les certifications AB et HVE sont donc toutes deux des démarches volontaires, affichant un des objectifs de protection de l’environnement, basées sur des cahiers des charges précis et définis par la réglementation – européenne pour le bio, nationale pour la HVE –, associant des contrôles périodiques, par des organismes agréés par les autorités.

Mais tandis que les termes et le logo AB fournissent des informations sur les caractéristiques globales d’un produit d’origine agricole, la mention HVE valorise davantage l’exploitation dont il est issu. En outre, certaines différences dans les cahiers des charges AB et HVE sont notables : par exemple, l’utilisation des OGM et des pesticides de synthèse est strictement interdite en production biologique, mais n’est pas requise pour la certification HVE ; tandis que les utilisations, parfois massives, de cuivre ou de soufre sont tolérées en bio, mais pourraient déclasser une exploitation HVE.

Finalement, la multiplication des mentions valorisantes n’est pas critiquable en tant que telle, puisqu’elle offre au consommateur un choix de produits toujours plus varié, mais encore faudrait-il qu’il connaisse et puisse être en mesure de comprendre précisément les caractéristiques précises associées à chacune de ces mentions, ce qui reste encore loin d’être acquis.

(1) Article L1 § II du Code rural et de la pêche maritime.
(2) Loi no 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
(3) Loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.
(4) Article L 611-6 du Code rural et de la pêche maritime.
(5) Article D 617-4 du Code rural ; arrêté du 20 juin 2011 portant application de l’article D 617-4 du Code rural et de la pêche maritime et arrêtant les seuils de performance environnementale relatifs à la certification environnementale des exploitations agricoles et les indicateurs les mesurant.
(6) Article R641-57-1.
(7) Règlement (CE) no 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques, Journal officiel L 189, 20.7.2007, p. 1.
(8) Règlement (CE) no 834/2007, article 3.

Cabinet Keller & Heckman

Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaires, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avocate associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est chargée de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux, auprès des industries de l’agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l’Union européenne. Caroline Commandeur, avocate collaboratrice, collabore avec l’équipe de Katia Merten-Lentz.

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