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Pour faire un bon fromage, il faut que les vaches mangent un maximum d'herbe

Des scientifiques de l'INRAE et de VetAgro Sup ont analysé les conséquences des modifications du régime alimentaire des vaches sur la qualité du lait, et in fine sur celles des fromages. Leurs travaux publiés récemment dans Journal of Dairy Science montrent l'intérêt de l'herbe dans la ration.

L'élevage à l'herbe est source de fromages de qualité.
© Sophie Chatenet

Les éleveurs laitiers sécurisent l'alimentation de leur troupeau en implantant des plantes fourragères

Alors que le changement climatique provoque des sécheresses de plus en plus fréquentes et intenses, fragilisant la quantité et la qualité de l'herbe pâturée ou récoltée, les éleveurs laitiers ont le souci légitime de sécuriser l'alimentation de leur troupeau. Y compris dans le Massif central, au-delà du stockage de foin classique, ils misent sur la culture de plantes fourragères, comme le maïs, qui peuvent être introduits dans les rations. Ces pratiques, jusqu’alors marginales dans les zones de production fromagère, posent de nombreuses questions aux filières fromagères locales, dont celle cruciale de la qualité des produits

Une étude conduite à l'Herbipôle de Marcenat dans le Cantal

Afin d'y voir plus clair, les équipes de l'Herbipôle Inrae de Marcenat dans le Cantal a conduit une étude dans le cadre du projet de recherche TANDEM, piloté par l'UMR Fromages. Cette étude a associé de nombreux partenaires dont le Pôle Fromager AOP Massif Central, les chambres d’agriculture du Puy-de-Dôme et du Cantal, l'Institut de l’élevage, l'Interprofession Saint-Nectaire, le Comité interprofessionnel fromages cantal, et des producteurs laitiers.

Lire aussi AOP cantal : maïs ou pas pendant le pâturage ?

C'est quoi un Herbipôle ?

L’Herbipôle est une plateforme expérimentale pluridisciplinaire de recherche sur les herbivores et les prairies à vocation régionale, nationale et européenne, largement ouverte vers les partenaires scientifiques et professionnels et fédérant sur un même dispositif des approches et des disciplines scientifiques complémentaires. Les finalités des projets de recherche conduits sur l’Herbipôle concernent les systèmes d’élevage de ruminants en zone herbagère de montagne, préservant leur bien-être et en relation avec les qualités de leurs produits (lait, fromages et viande) et leurs impacts sur l’environnement. L’Herbipôle rassemble l’ensemble des installations expérimentales INRAE de ruminants en Auvergne-Rhône-Alpes qui sont réparties sur 3 sites : Laqueuille et Theix dans le Puy-de-Dôme et Marcenat dans le Cantal. L’unité se compose de 75 agents permanents. Les troupeaux expérimentaux regroupent 900 bovins et 800 ovins répartis sur plus de 1100 ha de prairies situées à une altitude variant de 850 à 1500 m.

Des fromages plus riches en oméga-3 quand les vaches sont nourries à l'herbe

Ainsi, durant quatre mois, quatre lots de dix vaches laitières ont reçu des régimes alimentaires caractéristiques des combinaisons de pratiques mises en place par les éleveurs de la région pour s’adapter au changement climatique et aux sécheresses.

  • Deux lots recevaient des rations à base d’herbe pâturée : le premier était alimenté avec 75 % d’herbe pâturée tandis que le second recevait 50 % de foin au bâtiment pour simuler une réduction de la disponibilité en herbe liée à une sécheresse.
  • Les 2 autres lots ont reçu des rations à base d’ensilage de maïs : l’un mangeait 75 % de cette ration et 25 % d’herbe pâturée et l’autre n’avait plus d’herbe accessible au pâturage et recevait 100 % de ration à base d’ensilage de maïs.
  • Le lait de chaque lot a été collecté pour fabriquer des fromages de type cantal AOP. Différents échantillons de lait et de fromage ont été prélevés et analysés afin de caractériser leurs qualités nutritionnelles et sensorielles.
  • " Les résultats montrent que plus les vaches mangent d’herbe, plus les laits et les fromages sont riches en acides gras oméga 3, favorables à la santé humaine. Un jury de 10 consommateurs-experts de l’évaluation sensorielle des fromages cantal a noté le goût, l’arôme, l’odeur et la texture* des fromages. Quand les vaches se nourrissent d’herbe au pâturage les fromages sont plus fondants, plus jaunes et plus aromatiques, tandis que lorsqu’elles mangent peu ou pas d’herbe les fromages sont plus blancs, plus fermes et ont des goûts moins prononcés ", explique Matthieu Bouchon, ingénieur en charge des expérimentations à l'herbipôle INRAE de Marcenat.

Lire aussi Les fromages au lait cru, la potion magique de l'immunité

Maintenir de l’herbe fraîche dans les régimes à base de maïs, même en quantité limitée, est crucial pour ne pas trop détériorer la qualité nutritionnelle et sensorielle du fromage

" Dans les systèmes à base d'herbe, la pratique traditionnelle de complémenter les vaches avec du foin peut permettre de faire face à un épisode de sécheresse tout en ayant un impact plus limité sur les qualités des fromages", poursuit le professionnel.

De nombreux autres échantillons, du sol des prairies aux fèces de rats ayant mangé les fromages, en passant par la surface de l’herbe et de la mamelle de la vache, ont également été prélevés. Leur analyse permettra d’évaluer les flux microbiens qui s’opèrent le long de la chaîne agri-agroalimentaire selon l’alimentation des vaches et d’étudier comment ces changements de pratiques seraient susceptibles d’impacter le microbiote intestinal des consommateurs. Les résultats seront partagés dans une prochaine publication.

Pour aller plus loin Le projet AP3C : 85 indicateurs pour adapter l'agriculture face au changement climatique

* 28 critères ont été évalués, avec une notation de 0 (faible intensité) à 10 (forte intensité) : 1 pour la couleur, 10 pour l’odeur (lactique, fruité, etc.), 4 pour le goût (salé, amer, etc.), 8 les arômes, 5 pour la texture (fondant, ferme, etc.).

 

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