L'alimentation animale, la clé de performance productive des animaux
Une alimentation adaptée et une gestion optimisée des fourrages participent à garantir les performances du troupeau laitier et maitriser les coûts de production. Décryptage avec Philippe Andraud, Responsable encadrement- Spécialiste Nutrition à l’EDE Puy-de-Dôme.
Une alimentation adaptée et une gestion optimisée des fourrages participent à garantir les performances du troupeau laitier et maitriser les coûts de production. Décryptage avec Philippe Andraud, Responsable encadrement- Spécialiste Nutrition à l’EDE Puy-de-Dôme.
L’EDE Puy-de-Dôme propose aux éleveurs bovins lait un service conseil alimentation et fourrages. Quel est l’objectif de ce service ?
Philippe Andraud : Ce service que l’on retrouve au sein de l’EDE63, et plus globalement dans l’ensemble des Entreprises départementales de conseil élevage, accompagne les éleveurs laitiers dans l’optimisation de la performance de leur troupeau tout en maîtrisant les coûts alimentaires et en valorisant au mieux les ressources de l’exploitation. Les conseils et suivis que nous apportons aux éleveurs visent plusieurs objectifs : améliorer la production laitière et la qualité du lait, garantir la santé et la longévité des animaux, optimiser l’efficacité alimentaire, réduire les pertes et mieux valoriser les fourrages qui sont produits sur l’exploitation. Le suivi de chacun de ces quatre objectifs est le gage d’un élevage en bonne santé et donc efficace économiquement.
Comment se déroule l’accompagnement des éleveurs bovins ?
PA : Le conseiller EDE débute par la réalisation d’un diagnostic global du troupeau. Pour cela, il va prendre connaissance et analyser les données issues du contrôle laitier et du robot de traite s’il y en a un. Il va également étudier les pratiques alimentaires mises en place sur l’exploitation et évaluer les stocks de fourrages ainsi que leur qualité. Sur ce dernier point, l’EDE Puy-de-Dôme dispose d’Agrinir, un outil doté d’une technologie avancée de spectrométrie dans le proche infrarouge. Cet outil permet de détecter les nutriments du fourrage avant de les analyser précisément ; il aide ainsi l’éleveur à prendre des décisions éclairées en matière d’alimentation de son bétail et de pratiques agronomiques. Dans la phase diagnostic, le conseiller calcule aussi les besoins alimentaires du troupeau selon le stade physiologique et la production pour les différents lots d’animaux.
Tous sont passés au peigne fin : les vaches en lactation, les vaches taries mais aussi les veaux et génisses à des étapes charnières de leur croissance, soit de 0 à 6 mois et de 16 à 20 mois, au moment de l’insémination.
En dehors d’Agrinir, utilisez-vous d’autres outils d’observation et de conseil ?
PA : Nous disposons en effet de divers outils pour la pédagogie et l’objectivité des observations. A titre d’exemple je citerai les données du contrôle laitier qui, complétées par les données tank, révèlent la composition en acides gras, indicateurs de la qualité du rationnement. La mesure du pH urinaire qui permet de confirmer un état d'acidose métabolique sur un troupeau et d’ajuster la ration en fonction du constat. Il existe aussi à disposition des éleveurs : Rumin’al®, logiciel de calcul de ration développé par l’INRAé et les entreprises de conseil élevage, avec les derniers indicateurs 2018.
Enfin, pour garantir une ration homogène, bien mélangée et suffisamment fibreuse, le tamis à ration peut être utilisé. C’est un outil simple et précis qui en quelques minutes permet de contrôler la qualité du mélange de la ration et/ou d’ajuster les réglages de la mélangeuse.
L’ensemble de ces outils est proposé par l’EDE au bénéfice de l’optimisation alimentaire des élevages laitiers.
Une fois les diagnostic et bilan réalisés, quelles sont les autres étapes d’accompagnement et de conseils des éleveurs bovins ?
PA : La phase suivante porte à la fois sur le bilan fourrager et le rationnement. En lien avec l’éleveur et sur la base des données issues du diagnostic, le conseiller élabore le bilan fourrager annuel. Il met en place un plan de cultures fourragères adapté (ensilage, herbe, maïs, légumineuses, etc.) et conseille sur la conservation et la valorisation des fourrages. Par exemple au printemps, des analyses nutritionnels NPK sont préconisées et des conseils fertilisation sont également donnés par le conseiller.
Le suivi alimentation fourrages s’étend donc sur toute l’année ?
PA : En effet, contrairement à nos concurrents dont la présence sur les élevages est plus épisodique et repose sur la vente finale d’un produit ciblé issu de leur activité commerciale, le conseil élevage EDE intervient de manière impartiale et transversale. J’entends par transversalité le fait de combiner production, santé des animaux et efficacité alimentaire pour mieux maitriser le coût alimentaire qui dépend des charges de fourrages et concentrés, mais aussi des minéraux et additifs. Ces deux derniers postes sont d’ailleurs dans certains élevages sujets à des dépenses disproportionnées.
J’ajouterais que l’ensemble de ces actions est indissociable de l’observation du troupeau. Aller dans les cours de fermes, dans les pâturages, voir les bêtes, est un passage essentiel à différentes périodes de l’année. Cela permet d’évaluer la dynamique du troupeau, de détecter les changements de comportement (isolement, apathie…) et les variations d’état corporel. On vérifie ainsi les éventuelles baisses d’appétit, de rumination et l’influence plus ou moins importante des boiteries. Clairement, le conseiller vérifie si le troupeau est en forme, prêt à répondre aux objectifs de l’éleveur. Et tout ceci on ne peut le faire que si on va sur les fermes régulièrement…
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Et les bénéfices pour l’éleveur, quels sont-ils ?
PA : Il y en a quatre bien identifiés : Gain de rentabilité par une meilleure maîtrise du coût alimentaire. Autonomie accrue grâce à une meilleure valorisation des fourrages de l’exploitation. Confort de travail et sérénité grâce à un suivi technique personnalisé. Approche durable : respect du bien-être animal, de l’environnement et de la rentabilité économique.
Notre activité de conseiller troupeau apporte de la sérénité - et la sérénité n’a pas de prix ! - aux éleveurs, de la réactivité à travers le suivi des indicateurs et de la durabilité dans la production.
Ils témoignent
"Un accompagnement précieux"
Jérémy Morel est éleveur laitier, associé avec ses parents dans le Gaec Élevage Morel à la Goutelle. Le cheptel Montbéliard est composé de 90 laitières. La lactation moyenne est de 9 600 kg de lait.
Depuis quelques années, Jérémy a fait le choix du service complet alimentation fourrages proposé par le Conseil élevage EDE Puy-de-Dôme.
Mon objectif de départ était double, améliorer les performances des laitières et maîtriser les coûts alimentaires qui pèsent sur l'exploitation. Philippe Andraud, mon conseiller, a dans un premier temps établi un diagnostic précis de l'élevage. Sa présence sur le terrain à observer les animaux, lui a permis d'évaluer l'état de santé du cheptel, relever les incidents éventuels et les améliorations que nous devions apporter à la fois dans la gestion de nos fourrages et dans l'équilibre des rations.
Ce que j'apprécie dans cet accompagnement c'est la compétence et l'esprit d'analyse du conseiller ; il a l'œil pour détecter les difficultés. Je dirais qu'il a les bons gestes au bon moment. Par exemple il saura exactement si la prise du PH urinaire sur les vaches laitières révèle un état d’instabilité métabolique. C'est un état qu'un éleveur ne repère pas forcément, ou du moins pas à temps…
Cet accompagnement de l'EDE me permet aussi d'avoir très rapidement des analyses de fourrages pour récolter au meilleur stade et établir ensuite une ration hivernale vraiment adaptée. Philippe Andraud passe également en période estivale sur l'exploitation pour établir une ration en complément à la crèche. Et en cas d'aléas climatiques, il y a une grande réactivité des équipes sur des préconisations de circonstance. Cet accompagnement est précieux pour moi. »
"Un œil extérieur et compétent"
Bertrand Vergnol est en Gaec à 4 associés à Avèze. Ils élèvent 120 laitières montbéliardes sur 128 ha dont 80 ha de pâtures autour du bâtiment ; une configuration adaptée à la présence de 2 robots de traite. 75 % de la production est transformée en fromages.
"Nous adhérons au service conseil alimentation et fourrages depuis de nombreuses années. Avant même que l'EDE63 ne développe ce service, nous faisions appel à un nutritionniste privé. Mais il n'y avait pas de suivi, c'était une intervention unique. Lorsqu'il a été créé au sein du contrôle laitier, nous avons tout de suite adhéré. Nous voulions un service plus pointu sur la nutrition du troupeau à base d'herbe afin de maintenir la santé des vaches, réduire les risques sanitaires et assurer une croissance et une production optimales. Le conseiller passe quatre fois par an sur la ferme pour composer, ajuster la ration du troupeau selon les conditions d'âges et physiologiques des animaux. Nous avons par exemple adapté l'alimentation des génisses de 0 à 6 mois avec la préparation d'un mash fermier spécifique.
Au-delà des préconisations qu'il apporte, le conseiller a un œil extérieur intéressant pour nous. En visitant différents élevages, il dispose de repères que nous n'avons pas et qui sont pourtant important à prendre en compte pour adapter la nutrition de nos troupeaux à leurs véritables besoins. C'est un regard plus que positif apporté par le service alimentation et fourrages de l'EDE.