Sébastien Merle : dans les pas de l’excellence limousine
L’éleveur de Quézac (Cantal), lauréat du Sabot de bronze en race limousine, a consolidé et modernisé le travail de sélection génétique de ses prédécesseurs en y ajoutant une conduite rigoureuse
L’éleveur de Quézac (Cantal), lauréat du Sabot de bronze en race limousine, a consolidé et modernisé le travail de sélection génétique de ses prédécesseurs en y ajoutant une conduite rigoureuse

Même auréolé d’un Sabot de bronze qui vient récompenser les performances à la fois génétiques et techniques de son élevage et le travail conduit de concert avec sa conseillère, Lucie Lacassagne, Sébastien Merle juge qu’il lui reste toujours des marges de progrès : sur les aptitudes fonctionnelles et laitières de son cheptel limousin ainsi que sur les qualités raciales de ses animaux. En regardant dans le rétroviseur, l’éleveur sélectionneur de la Vitarelle à Quézac, installé hors cadre familial en 2014, mesure aussi le chemin parcouru : “J’ai gagné en morphologie, en volume, mais aussi en docilité”, avec des animaux déjà dociles aujourd’hui “très dociles”.
Un critère qui ne doit rien au hasard : tous les reproducteurs vendus pour l’élevage sont en effet dressés une fois sevrés selon la méthode Souvignet. C’est systématique pour les mâles, plus difficile pour les femelles, reconnaît Sébastien Merle qui sait que cette étape chronophage est incontournable pour présenter des bêtes lors des ventes organisées par ses partenaires commerciaux : KBS Genetic en premier lieu, la coopérative Natera et les stations Gelioc et Lanaud également. Cette docilité est aussi recherchée des particuliers qui apprécient la génétique et la morphologie des reproducteurs nés sur l’exploitation.
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Mortalité des veaux divisée par dix
Mais au-delà ce dressage, c’est une patiente et rigoureuse démarche de sélection et une conduite très technique qui valent à Sébastien Merle des performances notables, en s’appuyant sur les bases génétiques solides de l’élevage Couve dont il a repris à son installation le cheptel de souche (40 mères sur 40 hectares). Un cheptel inscrit au Herd-book limousin et au contrôle de performances depuis plus de 35 ans et que l’éleveur a agrandi progressivement, en misant sur son propre renouvellement. Sur la dernière campagne, ce sont ainsi 63 vêlages qui ont été enregistrés. La SAU a suivi cette évolution avec désormais 66 ha d’un parcellaire regroupé.
La moitié des veaux mâles, triés en début d’hiver, est vendue pour la reproduction, tout comme la moitié des génisses ; le reste des veaux est repoussé jusqu’à 420-430 kg pour l’export, le reste de génisses est conservé pour le renouvellement. Deux à trois vaches de reforme sont par ailleurs engraissées chaque année pour la vente directe sous forme de colis de viande.
Le recours aux détecteurs de vêlages (90 % groupés à l’automne) a permis une diminution drastique du taux de mortalité des veaux, passé de 10 % en 2021 à 1,5 % en 2024. Ajoutée à une ration et une minéralisation mieux adaptées aux besoins des vaches, la surveillance efficace lors de la période de reproduction a aussi permis d’atteindre un IVV(1) moyen (366 jours) toujours inférieur à la moyenne raciale. Le taux de vêlage sur les cinq dernières campagnes est en outre supérieur à 100 (soit l’objectif un veau/vache/an), gage de gains en termes de productivité, relève Sébastien Merle.
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Les meilleures souches prélevées pour l’IA
Ce dernier réalise lui-même ses schémas d’accouplement en utilisant des doses de ses reproducteurs les plus prometteurs prélevés avant les ventes. Il en va de même pour une partie des taureaux extérieurs achetés en ferme ou en station, seul ou en copropriété via le GIE Cantalim. Les doses sont alors conservées dans la cuve d’azote liquide dont il s’est équipé pour procéder lui-même aux inséminations, avec un taux d’IA qui a atteint 37 % l’an dernier. Critères privilégiés dans le choix de ces taureaux : “l’animal que tout le monde recherche”, sourit l’agriculteur, attentif à la morphologie avec “des bassins carrés et des bons dessus”, mais aussi aux facilités de naissance et capacités d’allaitement. Tout en reconnaissant que la génétique n’est pas une science exacte - “on a parfois de bonnes surprises mais aussi des mauvaises...” - Sébastien juge que “remettre du sang de chez nous permet de progresser plus vite même si on est plus limité dans l’utilisation”.

Du polled sans sacrifier aux exigences de sélection
Parmi ses meilleurs taureaux, l’éleveur quézacois cite Tarzan, champion jeune à l’inter-régional d’Issoire, et Uranium P, un taureau polled hétérozygote. L’objectif est en effet d’atteindre 20 % de sans corne pour deux raisons : répondre à une demande forte du marché (à l’export) et s’éviter la corvée de l’écornage. Mais pas question de dégrader les critères de sélection au bénéfice d’une lignée polled.
Cette stratégie de sélection se traduit dans l’évolution génétique de l’ascendance paternelle avec des index Isevr et Ivmat supérieurs à 100, et de trois points plus élevés que la moyenne de la race (tout comme l’index de croissance). Une croissance en progression constante avec des PAT(2) 210 j de 341 kilos pour les veaux mâles en 2023, 299 kg pour les velles. Le net recul observé en 2024 résulte du passage de la FCO au sein du cheptel en 2023.
Arrivé au terme de dix ans en régime de croisière, Sébastien Merle entend continuer à améliorer son cheptel et à vendre un maximum de reproducteurs tout en gardant toujours une quinzaine de génisses “qui font progresser le cheptel”.
(1) Intervalle vêlage-vêlage.
(2) Poids âge type.