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Un croisement Holstein x jersiaise x normande encourageant à Trévarez

La station expérimentale des chambres d’agriculture de Bretagne(1) teste depuis 2015 ce croisement trois voies sur son troupeau conduit en système bio. Le premier bilan est plutôt prometteur.

Pour répondre au questionnement d’un certain nombre d’éleveurs et tenter d’améliorer les performances de son troupeau de Holstein soumis à un régime contraignant (peu de concentrés, autonomie en protéines…), la ferme expérimentale de Trévarez dans le Finistère a commencé à expérimenter le croisement trois voies Holstein x jersiaise x normande en 2015. Meilleure fertilité, moins de vaches non vues en chaleurs, baisse de l’âge au premier vêlage… les premiers résultats sont plutôt favorables au croisement. Ils devront être confirmés, notamment sur le plan économique.

Des résultats d’insémination améliorés

Globalement, les vêlages (troupeau actuellement avec 40 % de primipares) se passent bien même lors d’inséminations de croisées jersiaises avec du normand. Idem pour les vêlages issus de croisements viande. « Sur 309 vêlages, la part de vêlages sans aide est en moyenne équivalente à celle d’avant croisement (76 %), malgré davantage de vêlages de primipares et de veaux issus de taureaux viande. Nous avons aussi eu plus de veaux femelles », souligne Guylaine Trou, de la chambre d’agriculture de Bretagne. Le croisement a permis de gagner deux mois sur l’âge au premier vêlage (de 27 à 25 mois).

Les taux de réussite en première insémination ont été améliorés chez les vaches (55 % contre 33 %) et les génisses (56 % contre 43 %) malgré une part de semences sexées élevée (75 % sur génisses et 23 % sur vaches). La proportion de vaches non inséminées, car non vues en chaleur, est passée de 27 % en moyenne sur la période 2016 jusqu’au printemps 2019, sur un troupeau majoritairement prim’Holstein, à 5 % entre l’automne 2019 et 2022, avec 100 % de croisées. « Le sens du croisement ne semble pas entraîner de différences. »

L’écart se creuse sur le lait en deuxième lactation

Sans surprise, la production moyenne par vache est inférieure à celle des prim’Holstein : 3 974 kg de lait en 305 jours, soit une baisse de 150 kg de lait pour les F1 en première lactation. En contrepartie les taux ont augmenté : 46,8 g/kg de lait soit +6 points pour le TB et 33 g/kg, soit +3 points pour le TP. « En deuxième lactation, l’écart se creuse sur le lait avec une baisse de 650 kg par vache (5 248 kg contre 5 894 kg). Le gain sur les taux reste similaire », précise sa collègue Estelle Cloet.

Les croisées produisent autant, voire un peu plus de matière utile que les prim’Holstein. Le produit lait est supérieur ou égal pour les F1 sur les deux premières lactations par rapport aux Holstein. Il semble inférieur pour les animaux de génération 2.

La capacité des croisées à valoriser l’herbe pâturée s’est confirmée. « Elles produisent autant de lait que les Holstein au pâturage. Mais elles sont plus pénalisées quand la ration hivernale manque d’azote », observent Estelle Cloet et Guylaine Trou.

Un système pâturant et économe

Cette expérimentation a été menée dans les conditions particulières de l’élevage. Les vêlages sont groupés sur deux périodes de trois mois, à l’automne et au printemps. Les animaux sont conduits dans un système bio très pâturant (60 % d’herbe pâturée dans la ration annuelle) et économe en concentrés (600 kg/VL/an) maximisant l’autonomie. Les vaches (60 Holstein à 5 500 kg de lait) sont traites au robot.

« Avec ces contraintes, les résultats de reproduction et l’état d’engraissement de nos Holstein n’étaient pas optimaux », relate Guylaine Trou. « Nous sommes rapidement partis sur du croisement trois voies plutôt que deux voies pour maximiser l’effet d’hétérosis. »

Côté races, le choix s’est porté sur la normande et la jersiaise. « Nous avons retenu la normande parce que nous voulions utiliser une race qui avait une origine dans l’Ouest. Aussi parce que son niveau de production laitière reste correct, bien qu’inférieur à celui d’une Holstein. La normande ramène des taux, du format et des muscles. C’est une race fertile. Nous choisissons des taureaux normands parmi les mieux indexés en membres », expose Guylaine Trou.

La jersiaise a été choisie pour ses taux, sa rusticité et son adaptation au système herbager. Côté bémols, Guylaine Trou mentionne l’introduction d’une hétérogénéité de gabarit au sein du troupeau et le problème de valorisation des veaux mâles. « D’où l’utilisation de semences sexées pour assurer le renouvellement et l’insémination du reste des femelles avec des taureaux de race Inra 95 ou blanc bleu. »

Un travail de longue haleine

Une fois les races choisies, s’est posée la question de l’ordre de leur utilisation dans la rotation. « Comme nous n’avions pas la réponse à cette question, nous avons décidé de tester les deux sens de croisement. » Les Holstein qui produisaient plus de lait mais avec des taux faibles ont été inséminées en jersiaise. Celles qui avaient du taux, mais moins de lait ont été inséminées en normande.

Pour obtenir rapidement des animaux « trois voies », le taux de renouvellement du troupeau a été important (40 %) au début de l’expérimentation. La semence sexée a été utilisée en première et seconde insémination sur toutes les génisses et en première insémination sur les vaches les plus fertiles. Malgré cette stratégie, les premières croisées de troisième génération ne sont entrées en lactation que cet automne. « C’est un travail de longue haleine », prévient Guylaine Trou.

(1) Avec la participation d’Innoval et de l’Institut de l’élevage.

Des tests pour valoriser les veaux

 

 
La valorisation en génisses ou bœufs de certains veaux croisés non vendus est à l'étude.
La valorisation en génisses ou bœufs de certains veaux croisés non vendus est à l'étude. © E. Cloet

 

Les veaux croisés dont le père était de race laitière se sont moins bien vendus que les Holstein, surtout lorsqu’ils étaient typés jersiais (64 € contre 91 €) en moyenne sur la période 2016 à 2021. L’écart de prix est encore plus élevé lorsqu’un croisement viande est intégré : 106 € pour des croisés lait puis viande contre 230 € pour des croisés Holstein avec une race à viande. « Depuis ce printemps, nous étudions comment valoriser certains de nos veaux croisés s’ils ne peuvent pas être vendus. Notre objectif est de produire quelques génisses ou bœufs élevés avec un maximum d’herbe et peu de concentrés », indique Guylaine Trou.

À retenir

]]> Amélioration du taux de réussite à l’IA

]]> Plus de vaches inséminées

]]> Baisse de l’âge au 1er vêlage de 27 à 25 mois

]]> Bonnes conditions de vêlage

]]> Produit lait similaire car moins de lait mais plus de taux

]]> Meilleure valorisation du pâturage

]]> Baisse du produit viande

Des taureaux laitiers et positifs en fonctionnels

Les deux races choisies pour croiser les Holstein ayant un plus faible potentiel laitier, les taureaux sont sélectionnés parmi les mieux indexés en lait. Les index fonctionnels doivent tous être positifs. Les taux, les membres et la facilité de vêlage complètent les critères de choix.

Le saviez-vous ?

Les objectifs de poids à atteindre à l’insémination correspondent à la moyenne de ceux des parents. « Les F1 Holstein x jersiaise sont inséminées quand elles font plus de 305 kg contre 380 kg pour les F1 Holstein x normand. Quand nous passons à la deuxième génération, les F1 croisées avec du jersiais sont inséminées à partir de 305 kg et celles avec du normand à plus de 345 kg », précise Estelle Cloet, de la chambre d’agriculture de Bretagne.

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