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DANS LE LOIR-ET-CHER
«Nous sommes redevenus des adeptes de la betterave»

Une vingtaine d’éleveurs du Loir-et-Cher redécouvrent, à travers une démarche collective, l’intérêt de la betterave fourragère, dans une zone où on ne l’attend pas forcément.

LES BETTERAVES SONT STOCKÉES sur des plateformes bétonnées. On les couvre
d’une bâche percée qui les protège du gel tout en maintenant une ventilation
par les trous.
LES BETTERAVES SONT STOCKÉES sur des plateformes bétonnées. On les couvre
d’une bâche percée qui les protège du gel tout en maintenant une ventilation
par les trous.
© ADBFM

Le Loir-et-Cher n’est pas une zone traditionnelle de culture de la betterave. Et pourtant, depuis trois ans, elle fait des émules sur ce département. Sous l’impulsion d’une poignée d’éleveurs motivés et de la chambre d’agriculture, un petit groupe de producteurs se réapproprie ce fourrage, qui reste peu valorisé malgré des atouts incontestables. « En 2009, notre groupe comptait huit éleveurs pour 25 hectares emblavés, résume Gilles Dufoix, conseiller à la chambre d’agriculture. Cette année, il rassemble une quinzaine de producteurs qui cultivent 60 ha pour alimenter 25 élevages, essentiellement laitiers, dans le Loir-et-Cher, la Sarthe et l’Eure-et-Loir. »

Tout a commencé après un voyage à l’étranger où l’un des membres du groupe a visité un élevage utilisateur de betteraves fourragères, se rappelle Ludovic Callu, éleveur. « Ce fourrage, appétent et très riche en énergie (1,15 UFL/kg MS), permet d’économiser des concentrés, de diversifier la ration et d’améliorer sa digestibilité. Il a un impact positif sur les taux et la santé des laitières. Et c’est aussi un moyen de sécuriser le système fourrager face au risque climatique, grâce à des rendements réguliers et élevés (10 à 17 tMS/ha). »

Un entrepreneur a investi dans une arracheuse d’occasion

Il n’en fallait pas plus pour motiver les éleveurs du GDA du Perche à introduire ce fourrage dans leurs rations. Mais si la dynamique de groupe était enclenchée, la question de la récolte posait problème. « Dans un périmètre proche, il n’y avait pas de matériel d’arrachage. Du coup, comment faire ? Investir en Cuma, en copropriété, trouver un entrepreneur ? » C’est cette dernière solution qui a été retenue pour une raison de coût et de simplicité du travail. Un entrepreneur local a accepté d’investir dans un matériel d’arrachage d’occasion. « Il tourne dans un rayon de 55 km autour de Mondoubleau et passe 20 heures sur la route en groupant les chantiers », mentionne Gilles Dufoix, en précisant que les frais de récolte facturés aux éleveurs s’élèvent à 250 €/ha.

La conduite de la culture a nécessité un apprentissage technique. « Pour nous, il s’agit d’une culture nouvelle", reconnaît Jérôme Augis, qui cultive 7 ha de betteraves fourragères depuis trois ans pour lui et son voisin. "C’est primordial d’être en groupe et de se faire accompagner. Tout seul, je ne me serais jamais lancé. Nous continuons à nous former, à confronter nos résultats pour améliorer nos pratiques. Le plus délicat, c’est le désherbage. Les produits sélectifs exigent d’intervenir sur des adventices jeunes au stade cotylédon. Il faut se rendre toutes les semaines sur les parcelles jusqu’à un mois et demi après les semis. Après, la culture se conduit facilement. C’est moins stressant qu’un maïs qui réclame de l’eau à la floraison et pour lequel mieux vaut ne pas se louper sur la date de récolte. Avec la betterave, on n’est pas à dix jours près. »

Le groupe approche aussi le coût de production de cette culture. « La betterave revient plus cher à produire qu’un maïs; mais si l’on ramène ce coût aux UFL produits à l’hectare, il peut se rapprocher de celui d’un maïs", indique Gilles Dufoix. En 2009, son coût de production(1) moyen du groupe s’élevait à 712 €/ha (contre 481 €/ha pour le maïs), mais les deux fourrages revenaient à 0,045 €/UFL. En revanche, en 2010, le maïs a été plus compétitif, suite à de faibles taux de matière sèche de la betterave (17 %).

Intégrer la betterave le plus longtemps possible dans la ration

Autre challenge que se lancent les éleveurs : intégrer les betteraves le plus longtemps possible dans la ration. «Nous voudrions poursuivre la distribution l’été quand le prix du lait est incitatif pour profiter plein pot de l’effet taux, souligne Ludovic Callu. En début de lactation, les betteraves se montrent particulièrement intéressantes pour couvrir le déficit énergétique, en améliorant la concentration énergétique de la ration. Surtout s’il fait chaud et que les vaches mangent moins. » Les éleveurs misent sur deux stratégies. Un allongement de la durée de conservation du fourrage (si possible jusqu’au 1er juillet) et un arrachage précoce (mi-août) d’une partie de la récolte pour bénéficier d’une petit stock avant la mi-octobre. «Même si le rendement n’est pas optimal, cette solution permettrait de faire la soudure, en sachant que l’effet sur les taux perdure près d’un mois après l’arrêt de distribution des betteraves. » L’association pour le développement de la betterave fourragère teste actuellement la conservation longue durée via le stockage en boudins d’un mélange à base de betteraves entières, fourrage grossier et paille. De son côté, Ludovic Callu expérimente une autre voie de conservation en essayant de reproduire l’effet « cave » qui permet un maintien du fourrage au frais (lire page 104). (1) intrants+ frais de récolte

Les pierres éliminées du tas par flottation hydraulique

Comment se débarrasser des pierres récoltées avec les betteraves, et qui cassent les couteaux des bols mélangeurs ? Avec un épierreur à flottation hydraulique ! Un prototype dérivé d’un système utilisé dans l’industrie sucrière a été mis au point en lien avec un bureau d’études. « Nous l’avons testé sur deux tonnes de fourrage au printemps dernier, et il donne entière satisfaction, se félicite Ludovic Callu. Quelle que soit la taille des pierres et celle des betteraves, le résultat est au rendez-vous : le fourrage qui en sort est 100 % exempt de pierre. »

L’appareil fonctionne sur le principe de la différence de densité entre betteraves et pierres. Concrètement, le tas est chargé au godet dans une trémie, au fond de laquelle se trouve une baignoire à bulles (6 m3). Au fond de ce bain, un tapis évacue les pierres qui coulent, pendant qu’en surface, un autre tapis récupère les betteraves qui remontent. Malin, non ?

 

Un effet positif sur les taux

Les vaches raffolent des betteraves fourragères ! Mais attention, il faut les intégrer progressivement dans la ration. « Je commence avec 0,5 kg MS/jour et je monte à 3 kg MS au bout de 15 jours », explique Jérôme Augis.

La ration de ses 65 Prim’holstein à 9 000 kg se compose de 9 kg d’ensilage de maïs, 6 kg d’ensilage d’herbe et 1,5 kg de foin. « En plus du correcteur azoté, et des céréales pour les VHP, j’apporte 80 g d’urée. »

Bon marché, cette forme d’azote très soluble permet de bien valoriser les sucres solubles de la betterave. « La première année, je n’avais pas incorporé d’urée tout de suite et j’ai vu la différence. Sans urée, le lait et les taux n’ont pas aussi bien répondu. »

Les betteraves sont distribuées entières au godet désileur à pâles au-dessus du maïs. Elles favorisent l’ingestion et la reprise d’état des bêtes. L’effet sur les taux est net. « J’ai gagné 1 point de TB et 2 points de TP deux ans consécutifs. Je tourne à 33,9 de TP en moyenne sur la dernière campagne. »

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