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Installation : « J’ai monté mon atelier lait de toutes pièces »

Dans le Gers, Clément Nédellec a créé un atelier lait inspiré de la Nouvelle-Zélande dans l’exploitation familiale autrefois dédiée aux charolaises et aux céréales. En système tout herbe et en monotraite, il est pleinement satisfait de son installation. Sa compagne va le rejoindre.

En mars 2017 a lieu la première traite au Gaec de Loran, dans le Gers. Depuis 1973, trois générations y produisaient en polyculture élevage de la viande bovine de charolaises et des céréales. Avec l’installation de Clément, la ferme a pris un nouveau tournant.

Avec un BTS en production animale en poche et un an de découverte du système laitier néozélandais, l’éleveur revient dans la ferme gersoise pour s’y installer. Déjà, ses parents ont amorcé des réflexions sur la conduite de l’exploitation, l’herbe et le pâturage tournant.

« Nos rendements en céréales, même en irrigué, n’étaient pas particulièrement satisfaisants alors nous nous sommes demandé comment faire de l’argent avec de l’herbe. La réponse a été le lait », se souvient Clément Nédellec. La passion des vaches a aussi fait pencher la balance.

Être persévérant, une qualité pour s’installer

Son père, chef d’exploitation, et sa mère, salariée, l’épaulent dans ses démarches du parcours à l’installation et la création de l’atelier lait. « Ils m’ont fait confiance », retrace-t-il.

« Nous souhaiterions susciter des vocations pour avoir plus de collègues »

« J’imagine mal un hors cadre ou un non issu du milieu agricole pouvoir faire face aux contraintes administratives de l’installation, déplore Jasmine, sa mère. Heureusement que nous étions trois ! » L’aide sera précieuse : se lancer dans le lait dans le Gers n’est pas chose aisée. Rares sont les conseillers du territoire calés sur le sujet.

Des difficultés pour trouver un collecteur

Un autre défi de taille s’est posé : trouver un collecteur. Alors que « la tournée de Lactalis, Danone et Sodiaal passe à un kilomètre de la ferme et Savencia à peine plus loin », le producteur fait face à des refus. « Seul Sodiaal était d’accord, mais le montant des parts sociales de la coopérative nous a refroidis. »

Les premières génisses sont achetées pour les habituer à la ferme. Soixante génisses jersiaises sont importées du Danemark et onze génisses prim’Holstein sont achetés à un voisin. Ces dernières ne resteront que deux saisons. S’y ajouteront dix-huit vaches jersiaises prêtes à vêler achetées à un éleveur de la région de Limoges.

« Six mois avant la première traite de 90 vaches, nous n’avions pas de collecteur. Nous avons dû faire jouer les politiques locaux », avoue Clément Nédellec. Finalement, l’exploitation sera collectée pendant un an et demi par Danone avant de passer chez Biolait. Attiré par leur modèle de gouvernance, cela a déclenché leur conversion en bio.

Un système 100 % pâturage en monotraite

L’expérience en Nouvelle-Zélande a été décisive dans le choix du système 100 % herbager. Les, désormais, 200 jersiaises choisies pour leur gabarit adaptée au pâturage, leur taux et la facilité de reproduction sont conduites en un seul lot en monotraite. Les vêlages sont groupés au printemps. La salle de traite est fermée trois mois de l’année.

 

 
Vache Jersiaise
© A. Juanchich

« C’est la météo qui décide. En 2021, nous avons fermé la laiterie le 25 novembre. En 2022, le 12 décembre. Nous produisons du lait quand il y a de l’herbe », résume Clément Nédellec. Le seul ajout dans la ration est un demi-kilogramme de maïs grain distribué lors de la traite.

Fiche élevage

400 animaux (216 laitières, 120 veaux dont 50 pour le renouvellement, 13 taureaux et 50 génisses d’un an)

216 ha en tout herbe dont 180 hectares irrigués

750 000 l produits dont 600 000 l livrés à Biolait et 150 000 l dédiés aux veaux

3 500 l/VL/an avec 55 de TP et 42 de TB

4 équivalents temps plein dont 2 associés

Plus d’un million d’euros d’investissements

 

 
salle de traite
La traite dure 2 heures à deux à partir de 7 h/7 h 30 du matin. © A. Juanchich

Pour y arriver, il a fallu transformer l’exploitation et investir en commençant par construire de toutes pièces la salle de traite. En 2016, le choix se porte sur une 2x20 simple équipement pour un total de 200 000 euros incluant le terrassement, le bâtiment, le tank… Un équipement un peu sous-dimensionné pour un troupeau de plus de 200 vaches mais « au début, nous ne savions pas que nous allions autant augmenter la taille du cheptel et abandonner totalement la production de céréales pour mettre tout en herbe », explique l’éleveur.

 

 
bâtiment d'élevage en aire paillée sans bardage
Les vaches étant le plus clair de leur temps au pâturage, les éleveurs ont choisi de construire un bâtiment simple, sans bardage, sur aire paillée. Il sera financé en partie par des panneaux photovoltaïques. © A. Juanchich

Un nouveau bâtiment tout ouvert de 150 m par 20 m en aire paillée sera également construit en 2022 pour loger les vaches. « Comme les résultats économiques étaient là, nous avons pu remplacer le bâtiment vétuste autrefois dédié aux charolaises au bout de la cinquième année. » Son coût est de 750 000 euros dont la moitié pour y installer des panneaux photovoltaïques. « Nous voulions un bâtiment simple avec zéro bardage car les vaches ne sont que très peu en bâtiment. En prenant en compte le photovoltaïque et les subventions, il nous revient à 2 000 euros par an. »

La banque soutient rapidement le projet. « En système classique, elle n’aurait pas suivi », glisse Jasmine. Le coût de la reprise a été de 22 500 euros dans l’EARL qui a ensuite été transformée en Gaec.

Une nouvelle installation à venir

Une autre installation est prévue sur l’exploitation : celle de la compagne de Clément, Hélène, vétérinaire, qui travaille déjà à 25 % sur la ferme. « Les conditions de travail sont bonnes, c’est pour ça qu’elle va s’installer », explique Clément Nédellec. « Nous sommes des éleveurs heureux. Il est possible de vivre d’un métier que l’on aime », abondent ses parents.

Les deux associés se versent chacun en moyenne 2 000 euros par mois en pleine période d’amortissement. Et de nombreux projets sont à l’étude : prérefroidisseur, panneau solaire sur la laiterie et plantation de nombreuses haies.

Lire aussi : « Je n’aurais jamais pensé m’installer »

« La valorisation de nos veaux et réformes jersiais est au rendez-vous »

 

 
Veau jersiais couchés au prè
Le Gaec a trouvé deux débouchés lui permettant de valoriser ses veaux jersiais ainsi que ses vaches de réforme. © A. Juanchich

Un des points faibles de la jersiaise, c’est le coproduit viande. Veaux et réformes sont désormais bien valorisés grâce à des professionnels qui mettent en avant la qualité de cette viande.

« Avec les jersiaises, les mâles étaient un problème. Les premières années, nous avons perdu de l’argent, explique Clément Nédellec. Maintenant, nous arrivons à rémunérer notre travail. »

Tous les veaux sont gardés. Ils sont nourris avec 150 000 litres issus de l’exploitation puis, après sevrage, à l’herbe au pâturage. Ils sont vendus sevrés, castrés et écornés à l’entreprise JA gastronomie à 5 mois pour 400 euros par veau. « Cela a été une chance de les rencontrer car c’est très compliqué de vendre des veaux jersiais, même lorsque nous les croisions avec du Hereford. »

Les réformes pour un boucher de Toulouse

De leur côté, les vaches de réforme sont engraissées à l’herbe uniquement. Elles sont vendues grasses à environ 220 kg de carcasse en moyenne en direct à un boucher de Toulouse.

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