Yann Lebeau : « Choyer nos acheteurs africains »
France Export Céréales insiste sur le fait que les clients africains, spécialement d'Afrique subsaharienne francophone, doivent recevoir une attention particulière de la part des exportateurs de blé français, sous peine de les voir partir à la concurrence.
Malgré la mauvaise récolte de blé 2016, les exportateurs français doivent tenir leurs positions en Afrique. Pour cela, « les opérateurs hexagonaux devront faire un intense travail de tri et réserver la meilleure qualité aux acheteurs d'Afrique subsaharienne de blé tendre meunier. Il faudra les choyer », alerte Yann Lebeau, responsable du bureau de Casablanca chez France Export Céréales et spécialiste de la zone Maghreb (hors Algérie) et Afrique subsaharienne. L'expert rappelle que les meuniers de ces contrées ont des exigences élevées en termes de protéine notamment.
Les moindres volumes français permettent à d'autres origines de pointer le bout de leur nez. « Si la Côte d'Ivoire a continué à acheter français à 100 % depuis le début de la campagne, on voit que le Cameroun, le Sénégal… commencent à diversifier leurs achats », prévient Yann Lebeau, avec en ligne de mire l'origine mer Noire. On retrouve également des marchandises d'Europe du nord. « Il n'est pas exclu à l'avenir de voir des blés d'origine américaine et d'Argentine alimenter les moulins africains », ajoute Yann Lebeau. L'expert craint que les clients d'Afrique subsaharienne ne prennent trop goût aux autres origines. Toutefois, il ne se veut pas défaitiste. « Si les meilleurs qualités sont réservées, on peut maintenir nos 70 % de parts de marché sur la zone francophone. »
Les États-Unis débarquent au Maroc !
Au nord de l'Afrique, le Maroc devrait peu acheter français cette année. « Alors que nous avions prévu, en début de campagne, d'expédier 2,5 Mt de blé tendre, on devrait finalement y placer seulement 0,3 Mt à 0,5 Mt », regrette Yann Lebeau. Il ajoute que « c'est la première fois depuis dix ans que l'on voit des bateaux de blé américain aller sur le Maroc (...) 0,54 Mt de blé US ont été acquises dernièrement, pour livraison décembre ». L'Allemagne, l'Argentine et la mer Noire seraient également présentes. Toutefois, l'expert ne s'inquiète pas trop de l'avenir. « Les Marocains ont été très satisfaits des volumes français. Il en utilisent encore aujourd'hui, de l'ancienne campagne, pour mélanger avec les nouveaux blés acquis (…) Ils reviendront certainement l'an prochain. »
En Tunisie, « l'Hexagone représente d'habitude 15 à 40 % des im-portations de blé tendre du pays. Pour cette campagne, on sera plutôt à 10 % », projette Yann Lebeau.
Les bas prix : principal déclencheur d'achats tunisiens
La mauvaise collecte tunisienne, évaluée à 0,1 Mt seulement due à la sécheresse (0,7 Mt toutes céréales confondues), obligera le pays à importer de 1 à 1,1 Mt de blé tendre cette année, d'après le spécialiste. Il rappelle la particularité de ce marché : l'État achète 100 % des céréales. Son principal critère de sélection est le prix, devant la qualité. « Cette année, les origines ukrainiennes sont très prisées. » Ainsi, si la France est peu présente cette année, elle pourra y reprendre pied l'an prochain, à condition d'être compétitive sur le prix.