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Charges
Une taxe sur la bière difficile à avaler

Pour financer la sécurité sociale, la taxe sur la bière serait plus que doublée. Les brasseurs français redoutent de lourdes conséquences.

LA TAXATION des bières, ou droit d’accise, pourrait plus que doubler l’an prochain et rapporterait 480 M€ à l’état, selon le projet de loi de finance de la sécurité sociale pour 2013. Pour les brasseries produisant plus de 200.000 hl/an, de 2,75 €/hl par degré pour les bières ayant un taux d’alcool supérieur à 2,8 %, la taxe passerait à 7,20 €. Les entreprises de plus petite taille contribueraient à l’effort dans les mêmes proportions, mais à des taux différents. Un coup de massue pour le secteur brassicole, seul à être touché parmi les filières de boissons alcoolisées. Celui-ci s’inquiète pour son avenir, alors que la consommation de bière dans l’Hexagone a déjà fondu de 30 % en trente ans. Un Français boit en moyenne 30 l/an, loin derrière ses voisins allemand, belge ou britannique qui en consomment une centaine. Une mesure injuste, sachant que la bière « ne représente que 16 % de la consommation d’alcool en France », contre 59 % pour le vin et 25 % pour les spiritueux, estiment les Brasseurs de France dans un communiqué du 2 octobre.

« Une mesure insensée, injuste et dangereuse » selon les Brasseurs de France
    « C’est une catastrophe pour l’ensemble de la filière, déplore Pascal Chèvremont, délégué général des Brasseurs de France. On tue dans l’œuf le développement du secteur, car, avec un pouvoir d’achat restreint, la consommation va diminuer. » « L’état n’aura pas les 480 M€ » escomptés, a-t-il assuré, lors d’un point presse.
    « Je n’ai jamais connu de telle hausse de toute ma vie professionnelle. Quelles seront les conséquences d’une augmentation de 20/25 % sur nos produits ? », s’interroge pour sa part Gérard Laloi, président de Brasseurs de France. Ce dernier dénonce aussi le manque de cohérence de la mesure au regard des objectifs fixés par le gouvernement en matière d’emploi et de soutien au pouvoir d’achat. Celui-ci serait mis à mal compte tenu du caractère populaire de la consommation de bière. Si la demande baisse encore, quel en sera l’impact sur la santé des entreprises ? Les grosses brasseries (+200.000 hl/an) ont misé ces dernières années sur l’optimisation des gammes. Mais « l’examen législatif des conditions de production et des taxes les pousseront peut-être à partir de France », redoute Gérard Laloi.
    Pour les entreprises familiales, de loin les plus nombreuses avec les microbrasseries (environ 400 structures auraient été créées en vingt ans), la situation pourrait être plus difficile. « Nos marges vont en prendre un coup. Cette taxe freinera l’emploi et l’investissement. Avec la hausse des matières premières à répercuter, nous n’avions pas besoin de celà », déplore Raymond Duyck, président de la Commission des petits brasseurs au sein de Brasseurs de France.
    Malgré des volumes en régression depuis plusieurs années, le secteur se montre dynamique avec 16 Mhl de bière produits chaque année (pour une capacité d’environ 22 Mhl/an) dont près de 2 Mhl destinés à l’export, selon Gérard Laloi. Un secteur qui représente 65.000 emplois sur l’ensemble de la filière pour 3.000 emplois directs répartis au sein de 450 PME.

Impact différent selon le produit, son circuit de distribution et la taille des entreprises
    La taxe ne touchera pas toutes les gammes de bière puisqu’elle sera fonction de la quantité d’alcool. Ainsi, les bières les plus fortes seront plus touchées par les hausses de prix que les produits standard présentant un taux d’alcool entre 4 et 5 %. Ce sont donc les bières dites “de spécialité”, présentant d’ailleurs les meilleures progressions en volumes actuellement, qui seront les plus taxées. De même, suivant les circuits de distribution, la hausse ne sera pas ressentie de la même façon par le consommateur final. Au comptoir, le demi d’une bière classique (prix moyen de 2,631 e) ne progresserait que de 5 centimes, quand « un pack de 6 bières pourrait voir son prix enfler de 20 à 25 % », selon Gérard Laloi, voire davantage pour les premiers prix. Un minimum de 15 % de progression fait l’unanimité.
    Bénéficiant d’une taxation réduite, les brasseries produisant moins de 200.000 hl/an, seront également touchées par le projet de loi. Leur taux d’imposition, entre 1,38 à 2,07 €/hl/ degré d’alcool aujourd’hui, augmenterait dans les mêmes proportions.

Limiter une distorsion de concurrence favorable à la France
    Le ministre du Budget, Jérôme Cahusac, a justifié cette taxe par deux raisons principales. D’abord, le constat « d’une alcoolisation excessive, notamment de la jeunesse, plutôt avec de la bière qu’avec le vin ». Ensuite, le bas niveau de la taxation des bières produites sur le sol français, « un des plus faibles en Europe. En Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas, ces droits sont beaucoup plus élevés que ce qu’ils seront en France si le Parlement vote la disposition », a déclaré le ministre. Conserver un tel avantage compétitif au sein de l’UE serait dommage, en effet !

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