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Marchés des bioénergies
Un manque de visibilité sur le plan politique, selon ses acteurs

Le 5e colloque national sur la biomasse a été organisé par le Syndicat des énergies renouvelables (Ser), le 30 juin à Paris. Avec un message clair à la clé : la mise en place de politiques publiques stables pour investir et se projeter à l'horizon 2030.

La biomasse est une ressource de plus en plus convoitée. Selon le Ser, à l'heure actuelle, 65 % de la consommation d'énergie renouvelable est issue des bioénergies (dont 45 % du bois-énergie, 11 % des biocarburants, 7 % de la combustion des déchets ménagers et 2 % du biogaz). Les 35 % restant proviennent des énérgies hydraulique et solaire, principalement. Pour autant, la faiblesse du baril de pétrole freine la compétitivité de ces marchés d'avenir. Mais pas que...

Il faut une cohérence des politiques publiques, selon Michel Griffon

” « Je veux insister sur un point, il faut une cohérence des politiques publiques, car il faut avoir une vision intégrée et prospective de la biosphère », observe en préambule Michel Griffon, ingénieur agronome. Même son de cloche pour Fabrice Boissier, directeur général délégué de l'Ademe : « Notre filière biomasse doit se mettre à travailler ensemble. »

Le facteur Iluc, un faux problème ?

« Quand on fait des biocarburants à base de blé ou de maïs, on en restitue la moitié sous forme de produits à destination animale », souligne Alain Brinon, ajoutant : « Nous avons d'autres voies pour compenser ce facteur Iluc (changements indirects d'affectation des sols) comme l'augmentation des rendements, avec la betterave pour exemple ». À l'heure actuelle, les biocarburants représentent 2 % de la surface agricole mondiale, et en Europe 3 %, si l'on prend en compte les productions de tourteaux et de drêches, selon lui. Pour Jérôme Bignon, président de l'association de bioéthanol ePURE, « le besoin de cohérence et de visibilité dans les politiques publiques est fort. La communication prévaut malheureusement sur le cartésien. »

Selon Olivier David, chef du département à l'Énergie et aux changements climatiques au ministère de l'Écologie, « La visibilité sera permise grâce à la PPE (Programmation pluriannuelle de l'énergie) qui est en cours d'élaboration. Elle traitera de l'ensemble des secteurs (gaz, éléctricité, chaleur), et ce sera sa grande force. »

Les biocarburants, une réponse à l'excédent d'huile...

« Le marché de l'huile alimentaire est un marché qui régresse en France d'1 % par an environ. En utilisant de l'huile pour faire du Diester, on a développé la demande d'huile et ainsi généré des millions de tonnes de tourteaux », explique Michel Boucly, directeur général adjoint chez Sofiprotéol.

« Depuis la nuit des temps, on valorise plus la fraction huile que la protéine. L'huile, c'était 80 % de la valeur de la graine. Hors, depuis trois ans, la protéine est passée de 20 % à 35 % de la valeur de la graine. L'étude prospective à l'horizon 2030, qui a été menée, a montré que même si on triplait l'utilisation de l'huile, on aurait toujours un excédent compte tenu de la forte production d'huile de palme. Hors, celle-ci a un défaut majeur, elle n'apporte pas de protéine. À l'heure actuelle, 75 % du biodiesel produit chez Sofiprotéol est issu du colza. Lui aussi souhaite un appui des instances publiques, mais il a néanmoins le sentiment qu'en France, « le secteur des bioénérgies est en train de s'affirmer ».

... et un marché croissant

Selon Adam Brow, analyste senior à l'IAE (Agence internationale de l'énergie), le marché des biocarburants va croître de 2,6 % par an jusqu'en 2020, notamment grâce aux politiques publiques. Dans un scénario des plus optimistes, l'IAE prévoit même un taux d'incorporation de 27 % de l'énergie végétale en 2050. Pour Pascal Barthélémy, directeur général adjoint à l'Ipfen, ce chiffre est «trop élevé, sachant qu'aujourd'hui, on est à 3,5 % ».

Concernant le biodiesel, Alain Brinon, directeur général de Saipol, rappelle que « la production mondial de biodiesel est légèrement inférieure à 30 Mt, dont près de 40 % faite en Europe. Elle s'est fortement développée. En 2005/2006, on était à 25 % de ce que l'on est aujourd'hui. Depuis 2010, on tourne autour de 10-1112 Mt en Europe pour une capacité de production de 20 Mt. » L'Europe est un gros consommateur et importateur de gasoil. Les autres pays producteurs (Amérique, Asie) trouvent en Europe des débouchés naturels. Par ailleurs, concernant l'éthanol, il est à noter que près de 80 % est utilisé en carburation, à partir de 90 % de céréales européennes et 10 % de maïs ukrainien ».

La méthanisation en déclin

« Beaucoup veulent se lancer dans la méthanisation, mais d'un point de vue économique, la filière est très fragile. Les fermetures de sites et les licenciements dans les entreprises en témoignent », souligne d'entrée Sébastien Couzy. La filière pourrait toutefois repartir, avec des tarifs de cogénération prévus à la hausse à partir de janvier 2016. Néanmoins, la liste des points de blocage semble encore longue. « Dans certaines unités de méthanisation, les business plan de post-recette ont été surestimés, la question du digestat considéré comme un déchet rend difficile sa valorisation, et les fournisseurs de matériel sont en grande partie des entreprises étrangères. Le service après-vente n'est pas optimal », énumère Jean-Louis Bal, président du Ser. « Pour obtenir un bon tarif, il faudrait l'augmenter d'un minima de 20 % à subvention équivalente », conclut Sébastien Couzy.

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