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UE/USA : « la viande bovine ne doit pas être une variable d'ajustement »

Inadéquation des normes

« Les professionnels de la viande sont favorables au libre-échange, mais pas à n'importe quel prix », précisait Dominique Langlois, président d'Interbev lors d'un point presse sur “La viande dans les accords de libre-échange UE-États-Unis/Canada/Mercosur”, le 20 mai à Paris, alors même que se tenait du 19 au 23, le 5e round de négociations avec les États-Unis.

Suite à l'accord UE/Canada, ce sont des contingents de 65.000 t de viande bovine qui ont été accordés sans droit de douane. « Avec les États-Unis, ces quotas seront beaucoup plus importants. Les volumes en provenance du Canada, des États-Unis et du Mercosur, suite à la signature des accords de libre-échanges respectifs, pourraient s'afficher de 300 à 600.000 t », estime Dominique Langlois. Avec les Américains, « le combat de la compétitivité est perdu d'avance. La différence de coût de revient est de l'ordre de 30 %, et la parité €/$ n'arrange pas la situation ». De plus, ces pays cibleraient principalement le segment de haute qualité du marché européen de la viande bovine, évalué à 750.000 t. « Cela pourrait également créer de nouvelles concurrences entre États membres, particulièrement préjudiciables pour l'industrie française qui pourrait perdre de nouvelles parts de marché au sein de l'UE. » La filière bovine française consomme 22 % (4,6 Mt) de la production d'aliments composés nationale, selon les chiffres 2013 du Snia.

Le combat de la compétitivité est perdu d'avance contre les États-Unis.

Inadéquation des normes

Par ailleurs, la production américaine ne répond ni à nos normes sanitaires, ni environnementales, ni de bien-être animal. « Alors même que la réglementation sanitaire communautaire est la plus exigeante au niveau mondial, les États-Unis ne remplissent aucune obligation en matière d'identification et de suivi des animaux, et privilégient, notamment, une logique “curative” (traitement des carcasses a posteriori). L'utilisation d'hormones, d'antibiotiques, de farines animales est routinière en matière d'engraissement des bovins. Les rations typiques des feedlots américains sont composées à plus de 80 % de soja et maïs OGM », critique le président d'Interbev. « Avec cet accord, c'est comme si les normes drastiques européennes, et notamment françaises, ne servaient à rien ». Cela vient par exemple en opposition totale avec des actions telles que le lancement de la signature Viandes de France, début 2014, certifiant la viande issue d'un animal né, élevé, abattu et transformé en France, face à la demande des consommateurs d'une plus grande transparence. « Sur une base volontaire, seules les viandes destinées à l'export peuvent entrer dans des filières soumises à un système privé de traçabilité, et dans certains cas spécifiques d'obtenir des informations sur l'alimentations des bovins ».

Interbev demande, a minima, les mêmes critères de réciprocité sur les contraintes de production de viande bovine. C'est à dire plus de transparence, moins de concessions et la préservation et valorisation du savoir-faire des professionnels de la filière.

« La Commission européenne ne considère plus la viande comme un secteur d'avenir. Parce que notre filière est entrée dans une logique de décroissance, elle pense que les importations viendront compenser cet aspect et répondre à la demande. Mais la viande bovine ne doit pas être utilisée comme une variable d'ajustement dans les négociations. Si l'abattage a diminué de 6 % en 2013, nous avons d'autant plus l'obligation de privilégier les filières françaises et européennes ».

Des intérêts UE offensifs sur les produits laitiers

Dans le cadre des négociations pour un accord de libre-échange avec les États-Unis, « l'UE a des intérêts offensifs sur tous les produits laitiers, en particulier sur les fromages », rappelait Gérard Calbrix, chef du service Economie de l'Atla, lors d'une journée sur les marchés mondiaux organisée par l'Institut de l'élevage le 21 mai à Paris. « Elle demande la mise à zéro des droits à l'importation, mais surtout le démantèlement des barrières non tarifaires », notamment le “Grade A” qui interdit tous les produits laitiers frais, ainsi que les ingrédients pour fabriquer ces produits. Par ailleurs, les Américains sont en train de passer une nouvelle réglementation sanitaire, la “FSMA” qui augmenterait les inspections et rendrait l'importateur responsable de la qualité sanitaire des produits importés. « Son coût pourrait devenir une barrière non tarifaire », alerte Gérard Calbrix.

Sur les Indications géographiques (IG), l'UE a préparé une liste de 267 produits qu'elle soumettait lors du 5e round d'échanges du 19 au 23 mai, mais la bataille est loin d'être gagnée car « cela suscite une levée de boucliers outre-Atlantique, avec notamment la formation d'une « Coalition for common names » qui s'oppose à toute reconnaissance des IG ».

Manque de transparence

« La Commission européenne négocie actuellement dans la plus grande opacité l'accord de libre-échange avec les États-Unis (ndlr TTIP) », critique Dominique Langlois. « On a donné un mandat sans retour à la Commission. Outre-Atlantique, les Américains doivent, à chaque cycle de négociations, rendre compte des avancées au Congrès, qui peut alors changer le mandat. Est ce que nous ne devrions pas revenir sur le notre ? D'autant plus qu'il a été donné à une Commission finissante, s'interroge Jean-Marie Fleury, secrétaire général de la FNB. Il va aussi bien falloir regarder le déroulement de la ratification pour le Canada. Ils sont en train de s'interroger la dessus à Bruxelles, et cela fera jurisprudence pour les États-Unis et Mercosur ».

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