Technologie de l’alimentation animale
Tecaliman s’appuie sur trente ans de recherche
La production mondiale de produits animaux devrait croître de 70 % dans les vingt prochaines années, rappelait Luc Guyau, président de la FAO, le 16 mars dernier en introduction du Symposium annuel de Tecaliman à Nantes. La disponibilité en eau et en surfaces agricoles, la productivité et l’optimisation de l’utilisation des ressources sont cruciales. Pour répondre au double défi de l’accroissement de la population et de l’évolution des modes de vie, l’industrie de l’alimentation animale française était réunie pour les trente ans de son centre de recherche en technologie Tecaliman.
Exporter le savoir-faire “made in France”
La raréfaction des matières premières sous l’effet « d’aspirateurs » tels que la Chine, la concurrence entre les usages alimentaires et non alimentaires (« feed, food, fuel »), les enjeux énergétiques, la logistique… sont autant de défis en matière de recherche technologique. L’optimisation de chaque ressource via le procédé technologique le plus efficace, la valorisation de matières premières différentes comme les coproduits de l’industrie de l’énergie, l’utilisation d’additifs tels que les enzymes dans des formulations plus complexes que le couple maïs-soja à l’américaine, constituent aussi des avantages du « made in France ». C’est parce que la recherche nutritionnelle des firmes hexagonales parvient à s’exprimer dans une formulation plus complexe et réellement mise en œuvre dans les usines qu’elles exportent ce savoir faire.
Optimiser l’ensemble des ressources, le maître mot
Il reste évidemment à faire sur le marché national aux enjeux d’optimisation prégnants. Dans tous les cas (marché international en forte croissance, marché occidental mature), la technologie est mise à contribution pour valoriser toutes les ressources, assurer la sécurité alimentaire et réduire l’impact environnemental des productions animales. L’utilisation d’enzymes pour valoriser le phosphore des matières premières est un exemple significatif, encore fallait-il mettre en œuvre ces phytases dans les usines. « La mise en marché et l’utilisation d’un additif en alimentation animale ne s’arrête pas au dépôt d’un dossier pour obtenir son autorisation réglementaire. Le producteur d’additifs est également concerné par l’impact de sa mise en œuvre dans la technologie, l’homogénéité des mélanges, le risque de contamination croisée, la stabilité, l’échantillonage, la traçabilité… », résume Jérôme Lamoine, technologue d’Adisseo, qui conduit régulièrement des études avec Tecaliman sur ces points.
« Le processus de fabrication impacte évidemment les caractéristiques des aliments et les performances des animaux qui les consomment », rappelle Alain Guyonvarc’h, directeur de la recherche chez Invivo NSA. « Ainsi, le traitement thermique peut améliorer le statut bactériologique mais aussi altérer les vitamines et les protéines. Les fabricants d’aliments pour animaux doivent arbitrer le coût des traitements technologiques (investissements, consommation d’énergie, autres coûts de fonctionnement) avec les améliorations de la production qu’ils peuvent induire. » Ceci peut les amener à mettre en cause des choix de présentation comme l’extrusion pour certains aliments pour poisson voire la granulation poussée (forte durabilité) de certains aliments pour porcs ou volailles. Car les derniers points de durabilité coûtent cher en énergie.
Réfléchir ensemble à l’utilité de toutes les dépenses
Une telle réflexion, déjà engagée par la profession sur le développement durable, impose d’inclure l’élevage dans le choix : certaines installations agricoles ne peuvent en effet pas accepter de farines. Mais les contraintes techniques ne font pas tout, la présentation d’un granulé très dur a parfois été utilisée comme argument marketing. Il n’en est pas de même partout. Au Mexique, signale Erwan Gillet (Euronutec), les filières sont très intégrées et les usines dédiées : « La quantité d’aliments granulé est moindre qu’en Europe, 40 % contre 90 %. La qualité des granulés est également différente, avec une durabilité de 50 % en moyenne contre 80 à 90% en Europe. » Ce n’est pas le processus lui même que la recherche interroge car elle a déjà répondu à cette question. « Chez les volailles, la granulation améliore la présentation de l’aliment, accroît la prise alimentaire et, in fine, l’efficacité de la production de l’élevage est amélioré. La granulation contribue à l’hygiénisation des aliments », rappelle Michel Lessire, ingénieur de recherche à l’Inra de Tours. La recherche publique poursuit ses travaux sur la nutrition, mais peu sur la technologie elle-même, réellement entre les mains des professionnels qui financent quasiment en totalité leur centre technique.
Tecaliman dispose aussi de la principale base de données internationale en matière de consommation d’énergie dans les usines. Le Club énergie fonctionne en effet depuis plus de vingt ans. Un programme sur les nouveaux moteurs économes est d’ailleurs géré par Tecaliman au niveau européen. « L’air comprimé est un poste sur lequel nous devons encore travailler car les fuites sont généralement nombreuses dans les usines », rappelait Louis Ravé, manager en technologie chez Techna et ancien président du centre technique.