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Soufflet accompagne la renaissance de la brasserie artisanale
« Un arôme de cerise, avec des notes de noix et de biscuit. » Jean-Philippe Malle évoque sa bière brune avec la passion et la précision du viticulteur. Ce maître brasseur œuvre en plein cœur de la capitale, à la brasserie O’Neil. Montée à la fin des années 90, cette unité, la première de Paris, est le reflet d’une tendance enclenchée au début du XXIe siècle : la renaissance de la brasserie artisanale. « Un phénomène qui est là pour durer », estimait Nicolas Rosa, directeur adjoint de la division Brasserie du groupe Soufflet, le 28 août lors d’un point presse. L’entreprise auboise s’efforce d’accompagner le mouvement.
Déjà plus de 500 entreprises
Il y a un peu plus de cent ans, la France comptait 2.800 brasseries, aux deux tiers dans le Nord. La première guerre mondiale, puis la concentration industrielle, la mondialisation et sa standardisation ont amputé ce parc « à un tel extrême, que cela a créé un appel d’air pour les brasseurs villageois ». Cela répond aussi aux attentes sociétales de produits locaux et artisanaux. D’une centaine de structures en 2000, l’Hexagone devrait en compter plus de 560 au premier trimestre 2014. La tendance, née sur le marché mature nord-américain (aux unités bien plus grosses), n’est pas cantonnée à la France. Elle s’observe notamment en Italie et en Belgique. Un débouché supplémentaire donc pour les malteurs… Mais à tempérer : sur 20 Mhl de bière produits en France en 2012, 19,5 étaient issus des 12 plus importantes brasseries (de plus de 25.000 hl). Les 488 unités artisanales, dispersées sur l’Hexagone, ne fabriquent qu’1,75 % des volumes consommés.
Une réactivité renforcée
« Nous avons implanté, près de Soissons (02), une plateforme de distribution pour mieux répondre à l’accroissement de la demande » de la brasserie artisanale, explique Nicolas Rosa, directeur adjoint de la division Brasserie du groupe Soufflet. Cette clientèle commande de petits volumes, dispose de capacités de stockage parfois limitées et doit gérer « une forte saisonnalité qui demande de la réactivité », témoigne Jean-Philippe Malle de la brasserie O’Neil, à Paris. Alors que le versement de malt chez les industriels se situe, en moyenne à 13 kg/hl de bière, « les artisans sont plus généreux, utilisant 17 à 22 kg de malt/hl, et ne recourant en général pas à des grains crus ». Ce débouché représente, dès lors, 6.500 t par an, sur une production de 2,2 Mt pour l’entreprise champenoise, leader mondial du secteur. « L’activité de micro brasserie nous tient à cœur car nous sommes, avec la meunerie et la viticulture, déjà tournés vers l’artisan », justifie Nicolas Rosa. Soufflet fournit 170 artisans (2.100 t) pour un CA de 1,1 M€.
Torréfaction des malts
Cherchant à élaborer des bières de dégustation, les artisans confectionnent des produits plus typés, permis notamment par le choix des malts. « Nous avons dès lors développé une gamme de 26 malts, plus ou moins colorés et caramélisés, dans laquelle ils peuvent piocher », indique Nicolas Rosa. « Nous sommes les seuls en France à réaliser une torréfaction des malts. » Deux concurrents, allemand et belge, interviennent cependant sur ce marché. La torréfaction est réalisée sur le site de Pithiviers (45), qui fabrique 10.000 t de malts spéciaux par an. Elle est menée sur les grains verts, à la sortie du germoir, pour des malts caramels, ou après le touraillage, pour des malts colorants. L’usine d’Arcis-sur-Aube (10) fournit pour sa part des malts bio. D’un camion expédié après la certification du site en 2010, 20 ont été livrés en 2012/2013. Soufflet réalise même du maltage à façon, notamment pour les agriculteurs brasseurs. « Certains envoient leurs orges de Rhône-Alpes ou de Bretagne ! »