Réforme fiscale, l'ANMF veut supprimer la taxe farine
Profitant de l'ouverture gouvernementale sur les charges des entreprises avec le pacte de responsabilité et le choc de simplification fiscale, l'Association nationale de la meunerie française (ANMF) remonte au créneau pour faire disparaître la taxe farine, qui coûte aux meuniers français 15,24 euros par tonne de farine livrée pour la consommation humaine sur le marché intérieur.
Injuste, coûteuse, peu transparente et administrativement lourde
« Au moment où le gouvernement se penche sur la simplification et sur une réforme de la fiscalité, il serait bon de réfléchir à la justification de cette taxe », estime Joseph Nicot, président de l'ANMF. Mise en place en 1962 pour financer le budget annexe des prestations sociales agricoles, cette taxe touchait notamment les céréales et certains produits agroalimentaires (les exploitants agricoles ne pouvant financer seuls le système, une solidarité de filière fut mise en place). En 1978, elle a été transférée aux « farines livrées ou mises en œuvre en France », les farines exportées en étant exonérées. À noter que le secteur des huiles est également assujetti à cette taxe. « Ces deux secteurs sont devenus les deux seuls contributeurs de ce budget», regrette Joseph Nicot. D'après l'ANMF, « le budget de la MSA, que cette taxe abonde, est de 15 Md€, et affiche un déficit de 10 %, soit 1,5 Md€ ». Ne représentant que 60 à 70 M€ dans ce budget, « la taxe farine ne pèse pas grand chose finalement », remarque Joseph Nicot. Alors que pour la meunerie, elle ampute le CA de 6 à 7 %, « davantage que la TVA à 5,5 % », note le président de l'ANMF. Ramené à une baguette de pain à 1 €, elle ne représente environ que 0,0036 €. Pour l'ANMF, l'application de la taxe pose plusieurs problèmes. « Alors que le consommateur souhaite plus de transparence sur les prix des produits, il n'y a rien de plus opaque que cette taxe. Qui la connaît et sait à quoi elle sert ? », interroge Joseph Nicot. Par ailleurs, « elle entraîne beaucoup de paperasserie. Les farines importées, soit par des négociants, soit par des boulangers, depuis certains états membres de l'UE, sont assujetties à cette taxe. Mais, dans ce cas, c'est l'utilisateur qui doit la payer. La paye-t-il réellement ? Certains passeraient entre les mailles du filet », créant « une distorsion de concurrence », argue Joseph Nicot.
« Certains passeraient entre les mailles du filet », créant ainsi « une distorsion de concurrence », argue Joseph Nicot. Par ailleurs, pour un meunier qui livre des farines à des industriels non français membres de l'UE, « un processus de récupération de la taxe est mis en place. Le meunier, ne connaissant pas la destination de sa farine, facture la taxe, et l'industriel en face peut la récupérer auprès de FranceAgriMer, sur présentation de documents comptables. Profitons de la réforme de la fiscalité pour s'interroger sur la justification de cette taxe, dont la collecte est peut être plus coûteuse que ce qu'elle rapporte », propose-t-il.
Serpent de mer de la meunerie
Cette interrogation autour de la taxe farine n'est pas nouvelle. En 2011, Mr Rouault, délégué interministériel de l'Agroalimentaire du précédent gouvernement, indiquait que cette taxe, « gérée en régime déclaratif, était pratiquement impossible à contrôler ». En avril 2011, les assises de la simplification ont mis en avant la problématique de la taxe farine, et conduit à la rédaction du “ Rapport sur la simpli” fication de la taxe farine ”… resté dans un tiroir.
Si l'État est intelligent, il remplacera cette taxe par autre chose.
Le sujet revient cette année sur la table du gouvernement, qui entre-temps a changé de majorité mais, comme son prédécesseur, affiche la volonté de réformer la fiscalité française au travers d'une simplification administrative. Néanmoins, lorsque l'État emploie cette terminologie, il n'entend pas nécessairement suppression comme le souhaite l'ANMF. « Si l'État est intelligent, il remplacera cette taxe par autre chose. Une hausse de la TVA par exemple », estime Joseph Nicot.