Aller au contenu principal

Prospective
Quelle est la place du blé tendre français sur l’échiquier mondial ?

La qualité n’est plus le premier atout du blé français à l’exportation sur pays tiers. Proximité et régularité de l’offre deviennent ses points forts.

« IL faut combattre l’idée reçue que la qualité des blés russes est mauvaise : elle est parfois meilleure que celle des blés français », a lancé Crystel L’Herbier, ingénieure au pôle Économie et systèmes d’Arvalis, lors du colloque Blé tendre, organisé par l’Institut du végétal le 7 mars à Paris. Intitulé cette année “Le blé, un atout pour la France : économie et environnement”, il a permis de mettre en avant les facteurs de compétitivité de la céréale hexagonale sur un marché mondial en pleine évolution. La proximité des importateurs et la régularité de nos volumes disponibles à l’exportation se révèlent être, devant les critères de qualité, les deux principaux atouts du blé tendre français sur le marché à l’international.

L’exportation doit être traitée comme un débouché majeur
« Sur la planète, malgré la hausse constante de la production locale, certains pays ne peuvent pas subvenir à leurs besoins alimentaires, notamment en Afrique », rappelle en préambulle Philippe Pinta, le président de l’AGPB. Et le phénomène va aller en s’amplifiant, notamment dans le Maghreb. Ce qui fait dire à François Pignolet, directeur général adjoint d’Axéréal, que « l’exportation est un marché pérenne pour la France, et ne peut plus être considéré comme une simple variable d’ajustement » du bilan.
La proximité géographique, et relationnelle, de ces importateurs potentiels est de fait le premier atout du blé tendre français, en ces temps de grande fermeté du pétrole qui renchérit d’autant les frets. « Alors que les coûts de transport intérieur et de fobbing sont relativement élevés en France, un “Rouen/Alger” en bateau ne s’élève qu’à 20-22 $/t aujourd’hui », affirme François Pignolet. Rien en comparaison des frais logistiques que peut représenter le transfert du blé russe sur les pays du Nord de l’Afrique.
Quant au problème de solvabilité des importateurs, il s’avère que l’Espagne ou l’Italie présentent, selon la société d’assurance-crédit française Euler Hermes, le même risque de défaut de paiement que l’Algérie.

Le blé français, l’assurance de la quantité mais pas synonyme du top qualité
« À chaque fois qu’il y a un problème d’approvisionnement en blé tendre, les importateurs se tournent vers la France », souligne le dirigeant d’Axéréal. Ce qui prouve que la France est considérée comme leur grenier à grain. Il est vrai que la situation pédoclimatique de l’Hexagone, couplée à une bonne technicité, permet une constance des volumes de blé tendre produits. « En 2011, année de sécheresse, la production française ne s’est repliée que de 6 % », illustre Philippe Pinta. Cette régularité de l’offre –qui assure « la fiabilité des contrats » commerciaux, précise François Pignolet– constitue le second atout du blé tendre français.
Par contre, « sa qualité est de moins en moins un atout car nos concurrents – tels que le Mexique, l’Argentine, l’Uruguay, sans oublier la Russie – font de très bons blés avec des taux de protéines supérieurs à celui des grains français », certifie le représentant de la coopérative céréalière. Cependant, tempère-t-il, malgré une moyenne nationale se situant à 11 % de protéines, les silos portuaires « font des miracles » en assemblant des blés divers afin de respecter des cahiers des charges qui peuvent exiger 11,5 voire 12 % de protéines. Le véritable problème des blés français réside toujours dans leur manque de propreté. La filière doit « faire un effort pour réduire le taux de poussières dans les blés exportables », insiste François Pignolet.

L’arrivée en force des outsiders de la mer Noire fait de l’ombre à la France
« La Russie risque, selon Crystel L’Herbier, de devenir le 2e ou le 3e exportateur mondial de blés devant l’Argentine, si elle résoud ses problèmes de logistiques », ce qui semble en bonne voie (cf. page 13). La Russie constituera demain « le premier concurrent de la France concernant le blé meunier », alors que l’Ukraine représentera « une source importante mais variable de blé feed ou de qualité meunière basse », explique l’ingénieure d’Arvalis. Les pays de la mer Noire  possèdent de fait un réel potentiel de production. Cependant, les volumes de blé tendre exportables sont très variables, en fonction de la trésorerie des agriculteurs, des aléas climatiques et de l’impact de certaines décisions politiques.    D’après l’étude d’Arvalis, l’Argentine, quant à elle, apparaît comme « un concurrent limité » en blé tendre, suite à la compétitivité existante entre cultures (orge de brasserie, soja maïs). Quant à l’Australie, le Canada et les États-Unis, ce sont des « concurrents sérieux mais sans surprise, sauf avancée technologique importante ».
Dans les prochaines années, ce sont donc les pays de la mer Noire qu’il faudra suivre de près.

Les plus lus

Engrais chimique en granulé
Marché des engrais : demande encore timorée et prix en repli

Dans un contexte de cours du blé français au plus bas et des trésoreries affectées dans les fermes, l'activité est limitée.

FranceAgriMer atténue la lourdeur des bilans français des céréales

L’Établissement public a abaissé sa prévision de stocks finaux pour 2025-2026 en blé tendre, orge et maïs grain. Les…

Culture de soja.
La profession agricole veut profiter du nouveau report du RDUE pour le simplifier

Pour la seconde fois, la Commission européenne propose de reporter d’un an l’entrée en application de la RDUE, la…

Graphique prix blé orge maïs France au 9 octobre 2025
Marché des céréales du 9 octobre 2025 - Le prix du blé français frôle les 190 €/t avec l’amélioration de sa compétitivité à l'international

L’évolution des prix du blé, de l’orge et du maïs français entre le 8 et le 9 octobre 2025, expliquée par La Dépêche-Le Petit…

De gauche à droite : Ghislain Caron (Cargill), vice-président de l'Usipa, Carlota Pons (Tereos), vice-présidente, Mariane Flamary, déléguée générale, Sophie Verpoort (ADM), trésorière, Marie-Laure Empinet (Roquette), présidente et Cécile Duputel (Roquette), administratrice à l'AG de l'Usipa le 25 septembre 2025
L’amidonnerie française fait grise mine

Le chiffre d’affaires de l’amidonnerie française a reculé de 21 % sur l’année 2024, avec pour conséquence le repli des achats…

Joël Ratel, directeur général de Nord Céréales
Nord Céréales : une campagne à l’exportation qui peine à démarrer

Les chargements du terminal céréalier dunkerquois sur le premier trimestre de la campagne de commercialisation 2025-2026 sont…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 958€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site La dépêche – le petit meunier
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez votre revue numérique la dépêche – le petit meunier
Recevez les évolutions des marchés de la journée dans la COTidienne