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« Pour être efficace la contractualisation doit s’exercer tout au long de la chaîne »

La Dépêche - Le Petit Meunier : Où en est le dossier de la contractualisation ?
Adolphe Thomas :
Le document commun avec nos partenaires des filières est en cours de finalisation. Notre approche a d’abord consisté à prendre en compte le fait que la contractualisation avec nos fournisseurs de matières premières devait être une conséquence logique d’une contractualisation de nos propres ventes avec l’aval. Il y a un parallélisme entre les deux, une connexion. S’agissant de la contractualisation avec nos clients, nous achevons la rédaction d’un contrat cadre entre les fabricants d’aliments et les éleveurs. Ce contrat cadre sera présenté prochainement par l’ensemble de la profession avec nos collègues de Coop de France. Il sera opérationnel pour la prochaine campagne, et permettra d’élaborer des propositions à nos clients pour la fourniture d’aliments dans la durée. Les conditions seront définies dans la négociation en apportant de la lisibilité dans la durée sur le prix de l’aliment.

LD-LPM : Que prévoit ce contrat cadre en terme de durée, de prix ?
A. T. :
Nous souhaitons proposer aux éleveurs un contrat qui précise le cadre dans lequel pourrait s’organiser cette relation, où seraient repris des engagements réciproques qui constitueraient au sens juridique des droits et des obligations pour les cocontractants. Mais la liberté de la négociation doit rester entière pour ces derniers. Il leur appartiendra ainsi de définir les conditions de leurs engagements sur la durée, la quantité ou la clause de prix. Notre proposition ne doit pas enfermer le contrat dans un cadre rigide. Il renverrait aux conditions générales de vente des entreprises. 

LD-LPM :  Si tout reste à définir, qu’apporte ce contrat cadre à la filière ?
Stéphane Radet :
il s’agit d’un outil destiné aux entreprises et aux éleveurs. Il s’inscrit dans une logique plus complète, à chaque stade de la filière, de la production à la commercialisation. Ce n’est pas un contrat unique. Il permet aux opérateurs d’encadrer leurs négociations commerciales. Si les opérateurs optent pour la fourniture d’aliments sur une longue période, cela implique que l’éleveur ait aussi une visibilité avec ses débouchés sur la même durée. Aujourd’hui, nous sommes très loin de cette situation. D’où l’idée de proposer un contrat cadre pour permettre aux opérateurs de se positionner au travers d’une relation contractuelle.
A. T. : Le mérite de cet outil est qu’il précise un cadre qui jusqu’à présent n’existait pas, sauf  dans le secteur des volailles de chair, qui est en très grande partie contractualisé et engage une organisation de production et un éleveur. Cela fonctionne bien. Mais c’est moins le cas en porcs et en ruminants. 

LD-LPM : Cette démarche n’a donc de sens que si toute la filière joue le jeu, grande distribution comprise ?
A. T. :
Nous sommes dans une logique de filière. Un éleveur ne peut s’engager sur des prix d’approvisionnement sans avoir l’assurance de vendre ses produits à un prix défini, sinon, il y aurait un transfert de risques. Pour que la contractualisation soit efficace, il faut qu’elle s’exerce tout au long de la chaîne. Il faut donc que les prix à la sortie de l’élevage reflètent l’évolution des prix des matières premières. En l’absence de contrat fixant les prix, à l’amont et à l’aval, une sorte de correction des prix dès que ceux des approvisionnements évoluent significativement,  est nécessaire. Le principe de déclencher des négociations entre l’éleveur et son aval, au signal d’une forte évolution des prix des matières premières, significative d’un déséquilibre économique dans les relations commerciales, doit alors se mettre en place.

LD-LPM : Concernant la notion de prix, qu’apportera ce contrat cadre ?
A. T. :
Un fabricant peut acheter à court terme ou dans la durée, du physique ou sur les marchés financiers. Des outils sont déjà à sa disposition pour cela. S’il s’engage, il est en mesure de déterminer quels peuvent être ses prix de revient des aliments. Les contrats Incograin et Rufra sont utilisés dans le cadre des relations entre fabricants et vendeurs de céréales. Ces éléments existent. Mais d’autres idées germent comme les prix lissés. Il ne faut pas fermer la porte à des évolutions concernant cette fixation du prix. Certains opteront pour un prix de marché, d’autres pour un prix défini à l’avance.

LD-LPM : Existe t-il des préférences au niveau des entreprises adhérentes au Snia quant à la fixation du prix ?
A. T. :
Pour les fabricants, le recours aux  marchés financiers est une piste intéressante pour appréhender leurs achats futurs. Mais l’intervention sur les marchés doit se faire en toute connaissance de cause. Par ailleurs, il est important que ces outils financiers puissent fonctionner avec plus de transparence au niveau de l’authentification des opérateurs et des opérations. Il y a des choses à améliorer. En combinant ces différentes méthodes d’achats, l’industriel pourra essayer de lisser les prix de ses achats. Nous pensons que les industriels et leurs clients peuvent en commun créer un tunnel de prix, fonctionnant sur la base du prix de marché mais qui garantirait aux acheteurs un prix maxi et aux vendeurs un prix mini. Ce mécanisme permettrait de faire des économies sur les frais d’intermédiation. Cette idée avance et doit être réfléchie à l’échelle de la filière. Cette clause pourrait s’inscrire au sein des exemples de formation du prix, proposés par le contrat cadre.

LD-LPM : La sécheresse perdure en France, et des conséquences économiques pour l’élevage sont à craindre. Quel rôle peut jouer la nutrition animale ?
A. T. :
La sécheresse est un mauvais signal car elle ne va pas contribuer à l’apaisement des marchés. Certains éleveurs vont devoir faire rapidement appel à des solutions coûteuses alors que les exploitations connaissent des conditions économiques difficiles. La nutrition animale a déjà fait face à de pareils épisodes. La profession imagine des formules adaptées aux circonstances à base de fibres. Si le besoin existe, les fabricants sauront apporter des réponses. Sans en tirer un avantage particulier, il faudra essayer de satisfaire la demande dans les meilleures conditions économiques possibles.

LD-LPM : Comment caractériser votre assemblée générale qui se tient ce vendredi à Paris ?
A. T. :
« Retour sur le futur ». C’est le titre de notre 40e AG. Ce qui s’est passé depuis 2007,  entre les questions de volatilité des cours des matières premières et les déséquilibres économiques au sein des filières, nous a conduit à traiter de cette actualité. Nous rappellerons aussi comment le fabricant appréhende la manière dont il achète, utilise et combine les matières premières. Nous aborderons enfin la question de l’acceptabilité de certaines matières premières et la perception des consommateurs sur leur utilisation.
S. R. : Le Snia a 40 ans cette année. Depuis sa naissance, le syndicat a connu l’embargo du soja en 1973, les évolutions de le politique agricole commune, le développement des produits de substitution aux céréales, puis le retour des céréales dans les formules avec la réforme de la Pac en 1992, ou encore la suppression de matières premières comme certains produits d’origine animale. Nous constatons que l’évolution des formules dans le temps est liée à l’histoire et aux politiques menées. Derrière ces faits réside la question de la disponibilité des matières premières. Sachant qu’il nous faut introduire dans cette question récurrente les notions de sécurité, de compétitivité et de capacité d’utiliser les matières premières disponibles.

LD-LPM : Comment se porte le secteur ?
A. T. : 
La période est également difficile pour la nutrition animale. Le secteur s’adapte et poursuit sa restructuration. Le secteur compte 294 sites de production et nous constatons chaque année quelques fermetures d’usines. Il y a une recherche d’optimisation des outils. Elle trouve ses limites dans les contraintes industrielles et dans le besoin de proximité géographique entre les usines et les élevages. Comme toute industrie, la nutrition animale a besoin d’investir pour rester compétitive, mais cette capacité est limitée par le faible résultat de son activité et par les difficultés économiques rencontrées.
S. R. : En 2010 les volumes ont progressé de 1 % par rapport à 2009, à 21,4 Mt, mais nous avons perdu 7,5 % de la production d’aliments composés en France en dix ans, ce qui s’est traduit par la disparition de certaines structures.

À gauche  et à droite
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