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Politiques agricoles : mieux avec ou sans ?

Lors d’une conférence de l’Ifri, l’économiste, B. H. de Frahan, a dressé l’état des lieux d’un monde sans barrières aux marchés. 

A L’APPROCHE DE l’échéance des négociations de l’Organisation mondiale du commerce à Hong Kong en décembre, l’Institut français des relations internationales (Ifri) a invité, le 6 octobre, Bruno Henry de Frahan, professeur à l’Université catholique de Louvain, a présenter les conséquences d’une libéralisation des accès aux marchés agricoles. A cette occasion, plusieurs personnalités étaient invitées à réagir...

Les pays développés et les pays les moins avancés seraient perdants

Lors de son exposé, l’économiste belge a présenté ce que serait l’agriculture mondiale en l’absence de politique agricole, c’est-à-dire sans barrières tarifaires, ni quotas, ni subventions. Ainsi, selon les chiffres annoncés, tirés de simulations de la Banque mondiale, les pays développés verraient une baisse de leurs revenus agricoles de 19 % (-26 % pour les européens) et les pays en développement (PED) ne constateraient qu’une faible hausse de 3 %. En réalité, les plus grands bénéficiaires, parmi les PED, d’une libéralisation seraient les pays d'Amérique latine (en particulier le Brésil) pour qui le revenu progresserait de presque 30 %. Les pays les moins avancés verraient, eux, leur pauvreté s’aggraver notamment parce qu’ils ne bénéficieraient plus d’accords d’échanges privilégiés. D’autre part, la valeur foncière se déprécierait de 20 % avec un record pour l’Europe de -45 % (les aides étant capitalisées dans le foncier). Du côté de la production européenne, celle-ci fléchirait de 12 % et les exportations de 11 %. Enfin, un dernier aspect, mesurant les impacts d’une libéralisation totale, concerne l’amélioration du bien-être général (évalué selon la somme des gains pour les producteurs et les consommateurs). Il n’augmenterait que de 0,08 % et, pour les pays les plus pauvres, l’évolution serait négative.

Des conséquences peu motivantes

Pour Teresa Cavero, intervenant pour le compte de l’Oxfam, organisme visant à sensibiliser l’opinion publique sur les questions de justice sociale, la libéralisation totale n’est pas la mesure à privilégier pour faire face à la pauvreté dans le monde. Elle propose une meilleure répartition du budget de la Pac qui, selon elle, profite en priorité aux «grands propriétaires foncier».

Loyola de Palacio, ancienne ministre espagnole de l’Agriculture et ancienne commissaire européenne, invité à conclure le débat, a trouvé dans ces chiffres «des arguments pour dire non» (à l’avancée des négociations à l’OMC, NDLR). Et en effet, avec une évolution du bien-être dérisoire, elle s’est mise à la place d’un agriculteur européen qui penserait : «on se sacrifie, mais ça ne sert à rien pour les plus démunis (…) Ça ne sert à rien non plus parce que leurs efforts sur l’environnement ne sont pas pris en compte» clame-t-elle avec force, soulignant l’absence totale de considérations environnementales des négociateurs à l’OMC. Ces derniers ont une approche mercantiliste des négociations et ne se soucient guère des conséquences de leurs décisions sur la nature.

«On continue d’avancer, on ne sait pas où, mais on continue» résume Michel Fosseprez, président d’InVivo, insistant sur le fait qu’il ne faudra pas trop lâcher à Hong Kong sous peine de «ficher en l’air l’Europe». Ces mots ne sont pas parvenus jusqu’aux oreilles des commissaires européens dont le représentant avait décliné, la veille, l’invitation à la conférence. Sa position aurait été bien délicate puisque, quatre jours plus tard, Bruxelles dévoilait ses intentions de réduire son soutien à l’agriculture de 70 %, répondant ainsi aux exigences de l’Agenda de Doha.

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