Nutrition animale : la Bretagne durement touchée
Au vu des premiers chiffres concernant les fabrications hexagonales et bretonnes d'aliments pour animaux en 2014, la Bretagne perdrait autant de tonnage que la France entière, soit environ 150.000 t en un an.

« En deux ans, ce sont près de 400.000 t d'aliments fabriqués en Bretagne en moins, l'équivalent d'un peu moins de deux usines moyennes, indique Nutrinoë, l'association des entreprises de nutrition animale en Bretagne dans un communiqué du 21 janvier. Depuis 2001, les entreprises ont enregistré une baisse de 17 % des fabrications régionales, soit 1,7 Mt. » Les fabrications bretonnes d'aliments pour animaux en 2014 sont en diminution de 1,8 %, d'une année sur l'autre, à comparer au recul de seulement 0,7 % au niveau national (cf. tableau). « La Bretagne, qui représente environ 40 % de la production française, tous aliments et espèces confondus, concentre l'élevage hors-sol (porc, ”volaille de chair et pondeuse) », qui enregistre une baisse d'activité structurelle, explique Laurent Morin, délégué général de Nutrinoë. Et Valérie Bris, directrice adjointe de Coop de France Nutrition animale, de souligner : « La Bretagne a été plus fortement touchée par l'impact Poulet export que les autres régions françaises, qui ont enregistré, en contrepartie, une progression du Label, dans de moindres proportions. » Par ailleurs, « le triple phénomène de baisse du cheptel, d'amélioration des indices de consommation et de progression régulière de la fabrication d'aliments à la ferme se traduit par une érosion régulière des volumes d'aliments Porc de 3 à 4 % par an depuis plusieurs années », ajoute-t-elle.
La Faf n'est pas la solution pour la pérennité de la filière Porc bretonne, selon Nutrinoë.
Cependant, « si la situation économique des filières apparaît plus délicate en ce début d'année 2015, le pire n'est pas certain et des opportunités existent (réouverture du marché du porc russe, nouveaux besoins mondiaux en lait pour mi 2015, développement de nos exports volailles avec un euro plus faible face au dollar...), avance Nutrinoë. Sur les marchés agricoles, les productions mondiales importantes en céréales et en oléoprotéagineux (tourteaux) permettent d'espérer un tassement des cotations et potentiellement des améliorations côté prix de l'aliment d'ici mi 2015... »
La fabrication d'aliments à la ferme en cause
« L'aliment Porc représentait à l'échelle nationale 7 Mt en 2001. Aujourd'hui, on est à un peu plus de 5 Mt », rappelle Valérie Bris. Cette érosion s'explique en partie par « le développement de la fabrication d'aliments à la ferme (Faf), dont la part en dix ans est passée de 25 à 40 % du marché hexagonal de l'aliment Porc ». Cependant, en Bretagne, la concurrence de la Faf se fait moins sentir que dans d'autres régions françaises. « Les éleveurs bretons restent sur des solutions qui conjuguent le maïs humide (pour la fraction énergétique) et l'aliment complémentaire (pour la fraction protéique), incorporé dans la ration à hauteur de 20-30 %, explique la dirigeante de Coop de France Nutrition animale. Ailleurs, quand un éleveur passe en Faf, il achète toutes ses matières premières et ne se procure, auprès de son Fab, que l'aliment minéral. »
Au final, l'essor de la Faf, si elle induit une baisse des fabrications d'aliments complets pour Porc, s'accompagne du « développement régulier de l'aliment complémentaire ». En Bretagne, l'aliment complet pour porcs charcutiers a régressé de - 7,7 % en 2014 alors que les fabrications d'aliments complémentaires progressent une nouvelle fois de +4,4 %.
Une filière Porc à consolider
Pour le représentant de Nutrinoë, « le débat sur “Est-il valable économiquement ou non pour l'éleveur de passer à la Faf ?” ne doit pas masquer la problématique de la filière porcine, qui est très difficile aujourd'hui ». Éleveurs et fabricants d'aliments bretons sont en effet « tous deux confrontés à la baisse du prix du porc et à la hausse du prix de l'aliment, qui conduisent à la diminution du cheptel porcin et la fermeture d'abattoirs ». En treize ans, c'est près d'1 Mt d'aliments Porcs fabriqués en moins dans les usines bretonnes, soit - 14 %. Ce qui fait dire à Laurent Morin qu'« il y a plus à gagner à se battre ensemble sur la valorisation des produits porcins et la restructuration de la filière bretonne que sur la problématique de la Faf ».
Contrairement à leur progression au niveau national (cf. tableau), « en Bretagne, les fabrications de mash en 2014, qui représentent 2 % du marché régional de l'aliment Vache laitière (soit environ 24.000 t, NDLR), seraient plutôt en baisse », indique Laurent Morin, délégué général de Nutrinoë. D'une année sur l'autre, les fabrications françaises de mash passent de 820 à 900 kt, soit +10 %. « Une évolution due, en grande partie, à une meilleure identification des opérateurs (cf. n°4075 p.20), à périmètre égal les tonnages ne progressant que de 2 à 3 %, précise Valérie Bris, directrice adjointe de Coop de France Nutrition animale. » En 2015, « on devrait encore recenser de nouveaux producteurs ». Une modification du questionnaire de l'enquête de statistiques – « à déclaration obligatoire », rappelle la représentante de l'organisation professionnelle – devrait permettre d'identifier de quel type de mash il s'agit, c'est-à-dire « différencier ce qui relève de l'alimentation Vache laitière et Bovin viande ». Et Valérie Bris d'anticiper : « J'ai le sentiment que c'est un produit plutôt typé Viande. Ce qui explique peut-être qu'en Bretagne, où l'élevage est plutôt typé Lait, on en produit peu. »