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Nicolas Sarkozy : sa vision de l’Agriculture française

Peu dissert sur la question agricole, le nouveau Président a tout de même fait quelques annonces

Difficile de succéder au président Jacques Chirac, dont la proximité avec le monde agricole est l’histoire de toute une vie politique, et de ne pas montrer de l’intérêt pour la chose agricole. Élu le 6 mai avec 53 % des voix, Nicolas Sarkozy aurait bénéficié de 67 % des votes exprimés par les agriculteurs selon un sondage sortie des urnes réalisé par Ipsos. Pourtant, il a fait le “minimum syndical” sur les sujets agricoles pendant sa campagne présidentielle. Ce que la FNSEA, qui regrettait que l’agriculture ne soit pas assez présente dans la campagne, a d’ailleurs reproché à tous les candidats. « La révolution écologique » qu’il souhaite provoquer est, par contre, davantage mise en avant, réchauffement climatique oblige. Nicolas Sarkozy pourrait même, à ce titre, modifier le périmètre du ministère de l’Agriculture. Quant à sa vision de l’agriculture, elle est en cohérence avec les valeurs qu’il défend autour du travail et de l’entreprise. Une sensibilité libérale qui lui fait considérer que les aides PAC « humilient » et que les agriculteurs, véritables chefs d’entreprise, doivent vivre du prix de leur produit.

« Ensemble tout devient possible », a promis le nouveau Président. Même la remise en cause du périmètre et de la place du ministère de l’Agriculture est envisageable aujourd’hui alors que Nicolas Sarkozy doit mettre en place son gouvernement d’ici quelques jours. Le candidat de la rupture qui a promis un gouvernement resserré trouverait là une belle occasion de rompre avec une tradition d’un ministre de l’Agriculture de plein exercice. Et le successeur de Jacques Chirac, fervent défenseur de la cause agricole, afficherait ainsi sa différence. Pour preuve, Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA s’est fendu à deux reprises de communiqués réclamant le maintien d’un vrai ministère de l’Agriculture.

Programmation d’un « Grenelle de l’environnement »

L’agriculture, « outil stratégique pour la France avec ses 1,6 million d’emplois et ses 39,3 milliards d’euros d’exportations » pourrait donc ne pas peser très lourd face à la « révolution écologique » que le nouveau Président Nicolas Sarkozy souhaite mettre en œuvre. Le programme des fameux 100 jours où le nouveau Président bénéficie habituellement d’un état de grâce, ne dit pas un mot sur l’agriculture. Par contre, on le sait, Nicolas Sarkozy, signataire du pacte de Nicolas Hulot, va organiser à la rentrée un « Grenelle de l’environnement ». Évidemment lors de cet événement, il sera question d’agriculture mais elle ne tiendra pas la vedette. Déjà, dans le « contrat de législature » 2007/2012 qui est le résultat d’un travail collectif qui a associé pendant plus de 20 mois des experts, des parlementaires et des internautes, la « révolution écologique » figure comme 4 e engagement avec plus de trois pages de propositions. Le secteur agricole présenté « plus que jamais comme un atout pour la France »sert d’exemple sur un quart de page au 6e engagement du président : « revaloriser le travail et augmenter le pouvoir d’achat ».

Des valeurs communes

La première intervention remarquée du candidat UMP à la présidentielle sur l’agriculture, lors de son discours à la 53 e filiale de labour, le 8 septembre, marque l’adéquation entre les valeurs défendues par Nicolas Sarkozy et celles de l’agriculture. « Je n’oublie jamais qu’un agriculteur est avant tout un entrepreneur, qui ne compte pas ses heures, qui porte la responsabilité d’investissements ». En résumé, la valeur travail dans le monde agricole est reconnue, ainsi que « l’esprit d’entreprise ». « Il faut être passionné et travailleur, deux mots qui ne me font pas peur et qui sont au cœur de mon engagement politique », a-t-il rappelé. L’objectif poursuivi par Nicolas Sarkozy est d’aider les agriculteurs « à vivre eux aussi davantage de leur travail, c’est-à-dire du prix de leurs productions par les filières de qualité, les usages non alimentaires de l’agriculture, la valorisation des activités non agricoles des exploitants ».

Des agriculteurs chef d’entreprise

Dans un déplacement le 6 octobre dans le Finistère, il a condamné « les subventions qui humilient », assurant que les agriculteurs ne veulent pas seulement être « les jardiniers de la France ». Le candidat UMP a invité le 9 mars les agriculteurs « à ne pas se laisser réduire à la seule question de la ruralité ». « Il ne faut pas traiter l’agriculture comme une civilisation en voie de disparition (…). Ce n’est pas seulement l’expression d’une tradition », a-t-il souligné. Dans la même logique, le candidat Sarkozy veut pour les agriculteurs « la liberté qu’il veut pour tout entrepreneur ». « J’agirai donc contre une réglementation complexe et en perpétuel changement », promet-il dans un tract de campagne dédié à l’agriculture. Nicolas Sarkozy appelle les agriculteurs à devenir maîtres de leur destin en construisant « un autre rapport de force face à six énormes centrales d’achat ». Sa sensibilité libérale plaide pour « l’égalité des armes : quand la distribution s’organise, la production doit pouvoir le faire aussi ». En clair, les agriculteurs doivent trouver « une nouvelle position, plus rémunératrice dans la chaîne de valeur qui va du producteur au détaillant ou au produit fini».

« Il faut aller vite »

Deuxième point fort pour Nicolas Sarkozy : la défense du principe de préférence communautaire. Il l’a évoqué dans le débat du 2 mai avec Ségolène Royal de l’entre-deux tours. Ce principe est « la condition de l’indépendance et de la sécurité alimentaire des Français et de tous les Européens, ainsi que de la vitalité de nos campagnes », explique-t-il. Sur la question du calendrier européen, en homme pressé, il a déclaré dans un entretien au journal Le Monde le 26 avril « qu’il faut aller vite (…). Il faut régler les choses entre la présidence allemande de ce semestre et la présidence française en 2008 ». « Concrètement, à la fin 2007, on se dote de nouvelles institutions, on engage les négociations sur la future PAC, on pose la question de la concurrence et de la préférence communautaire (…) ». Encore l’apologie de l’action dans son intervention à la convention UMP sur l’agriculture le 18 octobre où Nicolas Sarkozy précise : « 2007-2012, ce n’est pas une période d’attente. Ce doit être une période de choix, de décisions et d’action ». Pour Nicolas Sarkozy il s’agit de défendre le principe de la PAC auprès de nos partenaires européens et dans l’enceinte de l’OMC.

L’OMC : « Repartir sur des bases saines »

Pour Nicolas Sarkozy qui n’a jamais caché son admiration pour les États-Unis, les négociations à l’OMC sont un excercice difficile alors que les Américains sont notamment accusés par l’Europe de ne pas faire suffisammment de concession. « Les négociations au sein de l’OMC doivent repartir sur des bases saines et des objectifs clarifiés », a expliqué Nicolas Sarkozy le 18 octobre. Il réfute la « logique qui voudrait que nous échangions notre agriculture contre les services ». Il égratigne au passage « la manière dont les intérêts de l’UE sont défendus à l’OMC ». Le candidat UMP plaide pour « qu’un représentant politique (plutôt qu’un commissaire européen, NDLR), se concertant bien plus souvent avec les ministres concernés, représente nos intérêts dans les négociations à l’OMC ».

Urgence encore pour lancer la « révolution écologique ». Nicolas Sarkozy a l’ambition de créer un grand ministère du développement durable regroupant l’écologie, l’énergie, les transports, l’Équipement et la prévention des risques industriels. Il a évoqué à plusieurs reprises sa volonté de « défiscaliser intégralement les biocarburants ».

« Je ne crois pas en la désintensification »

Au chapitre des pratiques agricoles, il prône l’agriculture biologique. L’idée est aussi « d’aider l’ensemble du secteur agricole à mieux prendre en compte le bien-être animal et à mettre en œuvre des pratiques plus respectueuses de l’environnement en soutenant l’agriculture raisonnée ». Sur les OGM alors que Ségolène Royal et François Bayrou souhaitaient un moratoire, Nicolas Sarkozy dit « ne pas accepter l’utilisation des OGM en l’état des connaissances scientifiques, mais de poursuivre la recherche et associer tous les partenaires à son contrôle et à son évaluation ». Une manière de se laisser une porte ouverte sur ce qui n’apparaît pas être une remise en cause des OGM. Tout comme la promotion de l’agriculture biologique et de l’agriculture raisonnée qui n’engage pas en parallèle un changement des pratiques agricoles. « Je ne crois pas en la désintensification. Je crois beaucoup à des démarches de progrès permettant un plus grand respect des ressources mobilisées, comme la terre ou l’eau. Le vrai défi de l’agriculture européenne, c’est de poursuivre dans la voie du développement en s’appuyant sur les résultats de la recherche ». Une vision paradoxalement très conservatrice et très moderne de l’agriculture.

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