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Luzerne déshydratée

Menacée de disparition par le « bilan de santé de la Pac », la filière n’entend pas se laisser abattre ??

DANGER. La filière de la luzerne déshydratée est menacée. En supprimant l’aide spécifique à la déshydratation de 33 €/t qui encourage la culture de cette légumineuse, l’Europe risque de voir disparaître 80 % des surfaces de luzerne destinées à la déshydratation. Un coup dur pour la filière, couplée à une baisse des rendements cette année. Le secteur entend bien montrer que la luzerne est un produit d’avenir. Un sujet déjà débattu et qui l’a sûrement été lors de l’assemblée générale annuelle, qui, pour la première fois, a eu lieu dans le cadre du congrès Coop de France le 12 novembre.

Une conjoncture difficile

La campagne 07/08, marquée par une progression de la production en France, et dans l’Union européenne, a été encourageante. Celle de 08/09 s’annoncerait, d’après les premiers chiffres, bien plus décevante. La production se placerait ainsi pour la première fois sous le million de tonnes, à 962 000 t, soit un recul de 12 %. Un résultat qui s’expliquerait par de « très mauvais rendements en première coupe en raison de conditions météorologiques difficiles », d’après une conférence de presse le 6 novembre de Coop de France Déshydratation. L’érosion des semis en 2007, dans un contexte de prix très élevés, a également joué un rôle. La France occupe toujours le deuxième rang européen, derrière l’Espagne et devant l’Italie et l’Allemagne. L’UE verrait sa production décliner de 400 000 t, à 3,48 Mt. Le marché risque de manquer de marchandise. Sur l’export, l’Allemagne serait ainsi satisfaite aux deux tiers de ses besoins. Le Japon pourrait devenir un client français non négligeable, que la filière ne pourrait pas satisfaire pour l’instant.

Après trois années calamiteuses, les prix se sont redressés cette année. Ils étaient même élevés pour la filière aval. « L’essentiel de la commercialisation de la campagne de la luzerne s’est réalisé avant le démarrage de campagne, fin avril. La filière a donc bénéficié d’un contexte matières premières très porteur », affirme Gérard Desvignes, directeur commercial de Désialis. Les prix sont ensuite redescendus dans le sillage de la baisse générale des marchés, mais sont restés soutenus, la marchandise se faisant rare. Le niveau des prix actuel ne reflète donc pas l’intérêt des opérateurs déjà couverts. Les écarts de prix sont en tout cas très importants, et risquent de poser des problèmes sur le marché des reventes en l’état. Les opérateurs concernés, qui travaillent avec des marges faibles, n’auront pas les moyens de compenser ces écarts entre le début et la fin de campagne. « L’hiver risque d’être difficile », conclut G. Desvignes.

Des adaptations réussies

La filière s’attache d’autre part à « présenter une offre de produits techniques de plus en plus ciblés », note Serge Faller, directeur général de Désialis. Une diversification très importante alors que l’élevage, et plus particulièrement la filière cunicole, connaît de gros soucis avec la crise financière. Un débouché à haute valeur ajoutée est celui de l’extrait concentré de luzerne (ECL), très porteur, notamment sur l’aspect « source d’oméga 3 ». Les entreprises du secteur, tant Désialis qu’Euroluz, sont très impliquées dans le projet estime G. Desvignes. La luzerne bénéficie ainsi d’un excellent taux de transfert des oméga 3, qui lui permet de concurrencer le lin sur ce domaine. Pour l’instant, ce débouché concerne la nutrition animale, mais il pourrait être élargi à l’alimentation humaine. La première fonction historique de l’ECL est pigmentaire, notamment à destination de la filière volaille. Il est d’ailleurs important de continuer le travail dans le secteur des colorants, car les déshydrateurs ont perdu des parts de marché à cause de l’offre chinoise. D’autre part, des recherches sur la cellulose pour les biocarburants de deuxième génération en sont actuellement au stade du laboratoire.

Le bio est porteur

Autre marché à développer : la luzerne bio, qui concerne 10 % de la production, avec l’objectif d’atteindre à terme les 20 %. La croissance est régulière sur ce marché. « On a du mal à répondre à toutes les demandes, malgré les coûts supplémentaires que l’on demande aux clients », regrette Serge Faller. Les élevages caprins par exemple ne peuvent pas se passer de luzerne déshydratée bio, d’après une enquête réalisée auprès des agriculteurs.

Toutes ces pistes sont à ajouter aux arguments déjà existants et qui prouvent la pérennité de la luzerne : plante écologique, « Grenelle compatible », permettant de limiter la dépendance de l’Europe pour son approvisionnement en protéines végétales. Sans parler des arguments économiques : rien qu’en France, ce sont 1 500 salariés et 30 usines qui sont menacés. Ainsi, cette campagne est déjà marquée par l’arrêt de l’activité de la Coop de Coulx (47). Cela porte à dix le nombre de sites de production de luzerne déshydratée qui ont fermé en France au cours de ces trois dernières campagnes.

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