Nutrition animale
« L'export de produits animaux, levier de croissance des Fab »
Poussières et impuretés, nouveau cheval de bataille

À la veille de son assemblée générale qui se tiendra le 23 mai à Paris, le Snia (Syndicat national de l'industrie de la nutrition animale), par la voix de son président Alain Guillaume, revient sur les dossiers d'actualité des fabricants d'aliments pour le bétail (Fab).
La Dépêche-Le Petit Meunier : Selon les professionnels de la nutrition animale, au vu de la poursuite de la baisse des fabrica tions d'aliments composés en France, « la diminution du nombre d'acteurs est inévitable et souhaitable », indique l'enquête d'opinion publiée par FranceAgriMer en avril (cf. n°4051). Sur le terrain, comment cette situation se traduit-elle ?
Alain Guillaume : Sur les huit premiers mois de la campagne 2013/2014, la baisse de production globale d'aliments composés se chiffre à 1,1 %. Comparé aux 21 Mt de production enregistrée en 2013, cela représente 200.000 t de fabrication en moins, qui cachent des évolutions contrastées selon les espèces (cf. n°4050 p.8). Selon les ” premières données de notre enquête sur le parc industriel de la nutrition animale, le nombre d'usines baisse, en moyenne, de cinq par an. Cela s'explique, d'une part, par une adaptation des capacités de production au marché, qui a connu un repli de 10 % de ses volumes en treize ans. D'autre part, on observe un phénomène de restructuration, avec des entreprises qui se regroupent, s'organisent et, à ce titre, investissent. Depuis 2009, on constate qu'un certain nombre d'usines modernisent leur outil industriel.
Oqualim, un outil au service de la promotion de la filière française de l'élevage à l'étranger.
LD-LPM : 200.000 t de fabrication en moins, cela correspond à peu près au volume d'aliments composés importé annuellement en France. Ces entrées de produits ne vous font-elles pas de l'ombre ?
A. G. : Ces importations sont marginales et se limitent à des transports transfrontaliers avec l'Espagne, l'Allemagne et la Belgique. Mais une nouvelle usine au Luxembourg pourrait arroser tout le bassin d'élevage environnant... L'aliment composé voyage peu car c'est un pondéreux qui circule à grands frais. La logistique vaut déjà pratiquement le prix de la fabrication pour un rayon de livraison limité de l'ordre d'une centaine de kilomètres. S'il fallait en faire 200 à 300 pour aller dans les pays voisins, cela obèrerait dangereusement notre compétitivité. Aussi n'exportons-nous que 10.000 à 15.000 t/an d'aliments composés. La nutrition animale voyage davantage sous forme de prémix et de savoir-faire.
LD-LPM : Si l'exportation d'aliments composés ne représente pas un levier d'accroissement des fabrications, qu'en est-il des ventes d'animaux et de produits issus à l'étranger ?
A. G. : Il n'y a pas plus d'un an, le ministère pensait qu'il fallait que la filière Élevage se cantonne au marché intérieur : depuis, le gouvernement a revu sa copie et reconnu que nos produits animaux ont vocation à être exportés... À notre plus grand soulagement. Car plus il s'exportera de produits d'élevage, plus nous fabriquerons d'aliments en France. C'est pourquoi nous avons cherché cette année, à l'occasion de notre assemblée générale, à mesurer au travers de témoignages d'industriels de la viande le potentiel à l'importation du marché mondial (Chine, États-Unis, Arabie saoudite, mais aussi UE). Dans un deuxième temps, nous avons voulu savoir quels bénéfices les fabricants d'aliments pourraient ressortir de la modernisation de leur équipement.
Si les protéines végétales restent un point central d'intérêt des fabricants d'aliments pour animaux, malgré les avancées déjà réalisées (signature de l'accord Protéines en blé tendre, éligibilité du soja aux aides Pac, maintien d'une production de tourteau de colza en liaison avec le taux d'incorporation de biocarburant de 7 % au lieu des 5 % envisagés), la qualité des matières premières en est la préoccupation principale. « Nous travaillons depuis quelques mois avec nos collègues de la meunerie et de l'amidonnerie, sur les poussières et impuretés, un dossier important pour nous, souligne Alain Guillaume, président du Snia. Au prix où se trouve le blé, on ne peut plus considérer que les 8 % du 4/2/2 (correspond aux pourcentages de grains brisés, grains germés et impuretés à ne pas dépasser, présents classiquement dans les contrats de blé tendre meuniers et fourragers, NDLR) soient devenus, non pas un maxi comme il l'était au départ, mais une moyenne. » Et d'ajouter : « Cela ne nous convient pas, et nous avons engagé, avec nos confrères, une action pour faire en sorte que les contrats Incograins intègrent ces nouvelles exigences qualitatives. »
LD-LPM : À votre échelle, comment participez-vous à la promotion à l'exportation des produits animaux français?
A. G. : Oqualim, l'outil collectif au service de la qualité des matières premières et de la certification des usines de fabrication d'aliments, se développe sur de nouvelles missions, toujours dans cette logique de sécurisation de la filière de l'alimentation animale en France. Nous invitons les filières animales à s'approprier les résultats d'Oqua-lim et son apport en termes de système de réassurance de l'alimentation animale en France, afin de valoriser les produits Made in France à l'export. Les importateurs, comme les pays asiatiques, font le choix de la France parce qu'elle est capable de leur garantir, outre la régularité, la sécurité des approvisionnements, qui est presqu'un luxe chez eux alors que c'est un prérequis chez nous. Une démarche qui conduira à faire de l'export une opportunité pour la nutrition animale.