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­­­­­Climat
Les prévisions saisonnières, un outil d’aide à la décision qui devrait prendre son essor

Sur le continent sud-américain, les agriculteurs travaillent déjà avec les phénomènes El Nino et La Nina. Il sera possible d’aller plus loin avec ces nouvelles données

EN AMÉRIQUE DU SUD, l’utilisation de prévisions climatiques saisonnières sur des échéances de moyen terme, c’est à dire deux-trois mois, a fait son chemin, notamment en Argentine, dans le cadre du projet français Picrevat* de l’Agence nationale pour la recherche. Le but ? A terme, établir des scénarios de production pour une exploitation à partir de prévisions saisonnières. Et mieux prévoir des situations à risque pour les cultures. On pense à la sécheresse de la campagne 2008/2009 qui avait fortement impacté la production de l’Argentine.

Régionaliser les prévisions
    L’influence d’El Nino, ou de son phénomène opposé La Nina, est étudiée en Amérique du Sud depuis longtemps et prise en compte par les agriculteurs depuis une dizaine d’années environ. Lorsque le producteur, argentin par exemple, réfléchit à ses semis, il pense déjà à la présence de tel ou tel phénomène lors de la campagne. « L’objet des travaux, en lien avec le centre européen, est de se tourner vers des informations plus fines en terme de prévisions saisonnières, du type moyennes mensuelles des pluies sur l’été austral par exemple. Pour le maïs notamment, il est important de savoir si elles seront supérieures ou inférieures à la moyenne pendant la période autour de la floraison » indique Tristan d’Orgeval, de la société Metnext, qui a travaillé sur le projet. « Il faut en effet démystifier l’influence d’El Nino. Si l’on se base que sur ce phénomène, on peut faire des erreurs localement » ajoute Jean-Philippe Boulanger, climatologue de l’Institut de recherche pour le développement, actuellement en Argentine. Rappelons qu’El Nino est un réchauffement de la température de l’océan Pacifique Est, proche des côtes du Pérou. Il entraîne en moyenne davantage de précipitations sur le  bassin du Paranà-Plata (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay et partie orientale de la Bolivie), mais un temps plus sec du côté de l’Australie. « L’année 2010 est une année El Nino. Mais cela n’a pas empêché le sud de la province de Buenos Aires de connaitre une sécheresse très importante au début de l’été austral. » D’où l’intérêt de prévisions saisonnières régionalisées.

Travailler en notion de risque, plutôt qu’en quantité
    A plus long terme le but serait d’aboutir à des scénarios de production (plus secs ou humides) pour chaque exploitation à partir de prévisions saisonnières. En prévoyant des risques sur les périodes clés pour chaque culture, plutôt que de se contenter de bulletins météo. « Janvier est un moment clé dans les régions que nous étudions. Il s’agit notamment d’une période cruciale pour le remplissage des grains de maïs. Si il y a un déficit important d’eau, c’est la catastrophe. Cette information est cruciale pour les producteurs » indique Jean-Philippe Boulanger. Les équipes travaillent avec des prévisions météo du Centre Européen de Prévisions Météorologiques à Moyen Terme (http://www.ecmwf.int), qui fournit des prévisions d’anomalies  de températures (ou de précipitations), c’est à dire les écarts par rapport aux normales saisonnières pour une période donnée. « A terme, avec cette information, il sera possible de déterminer les impacts sur les rendements, un potentiel de récolte, ainsi que des options de gestion d’exploitation : dates de semis, choix de variétés… Par exemple,  favoriser des grains plus résistants mais avec des rendements plus faibles lorsqu’une situation difficile a été anticipée. Nous sommes actuellement à l’étape intermédiaire, c’est à dire travailler avec des indicateurs du type moyennes mensuelles de pluies ou de températures » précise Tristan d’Orgeval.

Pas de solution miracle
    Reste un problème de fond: la diffusion des informations. « Lorsque l’on envoie une prévision à un producteur en lui disant, par exemple, qu’il y a un risque de pluies, si cela ne se produit pas, un problème de confiance peut se poser. Une erreur dans une prévision a plus d’impact que dix correctes. » Le producteur doit bien entendu avoir en tête l’idée que la prévision fournie n’est qu’une information de plus pour la prise de décision. Pour le moment néanmoins, une grande partie des décisions est prise au quotidien. Il ne faut pas oublier également qu’il existe des problèmes difficilement gérables, par exemple une grave sécheresse. « La sécheresse qui a touché l’Argentine sur la campagne 2008-2009 était dans les prévisions du centre européen un mois à l’avance » précise Jean-Philippe Boulanger. Bien trop tard pour réagir, les semis étant décidés quatre à six mois à l’avance. Mais « les progrès dans la qualité des prévisions saisonnières sont indéniables et ils deviendront progressivement une information importante dans la prise de décision agricole » tient à assurer Jean-Philippe Boulanger.

(*)Picrevat: L’objectif est de confronter la prévision probabiliste des cumuls pluviométriques saisonniers, et les besoins des agriculteurs afin d’accroître leur capacité d’adaptation. Les études portent entre autres sur le soja et le maïs en Argentine.

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