Les accords bilatéraux pourraient prendre le dessus sur l’OMC
Pascal Lamy a appelé le 17 octobre à « garder la tête froide », dans cette phase de suspension du cycle de Doha, « notamment vis-à-vis des projets d’accords bilatéraux que nous voyons germer ici et là »
S’ADRESSANT à Bruxelles à la commission du Commerce international du Parlement européen, le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Pascal Lamy, s’est étonné que ces projets « semblent étrangement promettre des concessions plus importantes que celles qui suffiraient à débloquer la négociation multilatérale ». Et d’ajouter : « Je vois mal en quoi le bœuf ou la volaille américaine qu’importerait l’UE en réduisant ses tarifs à la suite d’un vaste accord de libre-échange euro-américain se distinguerait d’un bœuf argentin ou d’une volaille brésilienne ou thaïlandaise, qui suivrait le même chemin à la suite d’un accord à l’OMC ».
Une stratégie bilatérale soutenue par les États membres
L’idée d’un accord de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne a été récemment ressortie par la chancelière allemande, Angela Merkel. La Commission européenne a par ailleurs adopté le 4 octobre une communication sur la compétitivité externe de l’Union européenne, qui met l’accent sur des accords bilatéraux avec les grands pays émergents. Lors d’un dîner informel, le 15 octobre dernier à Luxembourg, les ministres du Commerce de l’UE ont apporté leur soutien à cette stratégie bilatérale. Les Vingt-cinq devraient ainsi accorder d’ici la fin de l’année à la Commission européenne des mandats pour négocier des accords de libre-échange avec la Corée du Sud, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Anase) et l’Inde.
UE/Mercosur, le Parlement européen plaide pour le libre-échange
Dans un rapport d’initiative adopté en session plénière le 12 octobre dernier, le Parlement européen se prononce pour la conclusion rapide, entre l’UE et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Venezuela), d’un accord d’association « complet, ambitieux et équilibré » prévoyant notamment l’instauration d’une zone de libre-échange. Selon les députés, celle-ci devrait couvrir un large éventail de secteurs allant de la libéralisation réciproque du commerce de biens et de services aux aspects touchant aux investissements, aux marchés publics, à la protection des droits de propriété intellectuelle, à la coopération en matière de concurrence ainsi qu’aux instruments de défense commerciale, à la facilité du commerce et à un mécanisme contrai-gnant pour le règlement des différends. L’Assemblée souligne la nécessité de parvenir à un accord commercial, « unique et indivisible », qui aille bien au-delà des obligations respectives au sein de l’OMC et qui – sans exclure aucun secteur – tienne compte de la manière la moins restrictive possible de la sensibilité spécifique de certains produits.
Selon elle, la Commission européenne ayant fait une offre au Mercosur en matière agricole « la plus ambitieuse jamais faite dans une négociation bilatérale » et l’Europe étant le premier importateur de produits agricoles du Mercosur, l’Union européenne « est en droit d’attendre de son partenaire une offre tout aussi ambitieuse ».