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Céréales
Le sarrasin ne connaît pas la crise

Malgré les petits volumes écoulés, la filière sarrasin reste confiante en l’avenir, notamment grâce au développement de nouveaux débouchés 

CINQUANTE MEUNIERS transforment le sarrasin en France, majoritairement en Bretagne et Normandie. Considéré comme une niche, lemarché du sarrasin n’en demeure pasmoins pérenne et riche de développements. Lesmeuniers sont en général historiquement attachés à cette production.

L’origine française en perte de vitesse

Le marché du sarrasin français est essentiellement basé sur l’import, la production française ne parvenant pas à satisfaire la demande, malgré l’effort de quelques-uns. « Le sarrasin français ne joue plus dans la cour des grands fournisseurs », selon Henri Petit, courtier de la société Comptoir Grainier.

Plusieurs raisons expliquent ce constat. Les sols pauvres et acides ne sont plus exclusivement réservés au sarrasin, grâce aux progrès réalisés sur les techniques culturales. A cela, il faut ajouter le fait que la recherche française sur les nouvelles variétés est au pointmort depuis 25 ans. « En 2007 la présence fortuite de datura dans certains lots a également fait peser un risque sur cette filière », ajoute Henri Petit. La présence de cette plante induit un risque de contamination du sarrasin par des alcaloïdes, qui le rendent impropre à la consommation humaine, sauf nettoyage approprié. Des analyses sont désormais effectuées sur les lots à risque et le problème est pratiquement résolu. Peut se poser également la question du séchage, selon certains meuniers. Ainsi, le moulin de Verdonnet, situé dans le Puy de Dôme, transforme uniquement du sarrasin d’importation, car selon un responsable, « on n’arrive pas à faire de la bonne qualité localement, surtout en raison du séchage. » Un problème qui s’est posé sur l’ensemble de la France pour la dernière campagne, très pluvieuse.

La Chine, principal exportateur

La Chine est le principal fournisseur de sarrasin pour le marché français, et surtout le plus régulier. Viennent ensuite la Pologne et le Canada, « les bonnes années. »Ainsi, la Pologne n’a pas exporté de sarrasin en 2006/2007 en raison d’une sécheresse persistante. Ce pays, important producteur (85.000 t en 2007) et consommateur, exporte 10 à 15% de sa production en moyenne, comme l’indique Rafal Krawczyk, de la société Polcom. Le sarrasin d’import est une variété différente de la française, la «Harpe». Il se démarque par sa couleur et sa taille: graines noires contre gris argenté, plus volumineuses. Quatre points sont observés pour juger de la qualité du produit : aspect, propreté, rendement farine et surtout qualité intrinsèque de la farine. La norme internationale qualitative est uniquement basée sur l’humidité et le taux d’impuretés, d’où l’importance de bien connaître les qualités des différentes origines. Les transformateurs français jugent la «Harpe » comme la meilleure qualité, avec notamment un rendement et une qualité de farine satisfaisants.

Les sarrasins bretons et bio recherchés

En France, 4.900t ont été collectées pour la campagne 2007/2008, selon l’OniGC. Le sarrasin est principalement cultivé en Bretagne. Un véritable retour aux sources pour cette culture qui avait presque disparu de la région dans les années 1980.Elle est maintenant défendue par de nombreux minotiers et l’association « Blé noir tradition Bretagne ». Cette dernière regroupe 224 producteurs, 3 collecteurs- stockeurs et 8 meuniers, 1.500 à 2.000t collectées, soit presque la moitié de la production française! L’association ambitionne demultiplier la surface de culture par deux ou trois pour couvrir au maximum les besoins de la région Bretagne (de 10.000 à 12.000t/an). Elle défend également un cahier des charges très strict et a déposé une demande d’IPG (indication géographique protégée), actuellement en instruction à Bruxelles. La validation devrait être effective fin 2009 ou début 2010. L’association fait également de la prévention à propos du datura auprès des agriculteurs adhérents. Elle souhaite aussi développer la communication auprès de l’aval et que l’ensemble des producteurs soit géré par l’association. « L’important étant de privilégier la qualité avant tout », souligne Christine Larsonneur, chargée de mission au sein de l’association.

Concernant la filière bio, « il n’y a pas aujourd’hui assez de sarrasin bio français car la demande est en augmentation. Il y a donc obligation d’importer du sarrasin chinois certifié bio: c’est pratiquement la seule origine », selon Henri Petit. Même constat du côté des meuniers. Jean Paulic, propriétaire du moulin éponyme, pointe aussi une « certaine euphorie sur la demande en produits bio. Mais nous avons du mal à obtenir de la matière première. » Les consommateurs sont, selon Jean-Christophe Celbert, principal intervenant sur le marché avec la marque Treblec (4.000 à 5.000t de farine par an), à la recherche de traçabilité, de goût et privilégient l’origine bretonne.

La filière résiste bien à la crise

La filière du sarrasin française n’a pas connu de variations de prix dans les mêmes proportions que celles des céréales au cours de l’année 2008. Les prix ont suivi la progression en sympathie, mais sans plus, préservés par le statut de niche du marché. En 2008, les prix du sarrasin ont ainsi fluctué en départ entre 400 et 450 €/t pour l’import, et 425 et 500 pour la France. Cette année, malgré une soudure difficile, il semble que la stabilité va perdurer. « Mais le marché est toujours à la merci de mauvaises récoltes en Chine ou au Canada », précise Henri Petit.

Les effets de la crise se feraient également moins sentir qu’ailleurs selon les meuniers interrogés. Les farines de sarrasin sont utilisées presque exclusivement pour faire de la galette, un produit traditionnel, populaire, et qui reste économiquement abordable. La demande serait donc insensible à la crise. Une preuve de cette pérennité est le succès de l’Ecole Maître Crêpier, associée à la farineTreblec, seule formation privée. Plus de 400 crêpiers sont formés par an, et la demande est croissante. On constate également, selon Jean-Christophe Celbert, « une augmentation de 15 à 20% des élèves en provenance de l’étranger. »Autre facteur positif, l’aspect nutritionnel : la forte teneur en fibres joue en faveur du sarrasin. Sans parler du développement durable: cette plante ne nécessite pas d’engrais! L’association « Blé noir traditionBretagne » vient d’ailleurs de recevoir un trophée du développement durable. Pour conclure, Jean-ChristopheCelbert évoque « une petite filière qui résiste bien, qui a du potentiel avec des développements intéressants. » 

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