Marché mondial
L'Argentine se tourne vers l'UE
Avec les négociations entre l'UE et le Mercosur, la disparition des taxes douanières, l'Argentine souhaite s'ouvrir au commerce mondial. Forte de sa production agricole, le pays est le premier exportateur de produits dérivés du soja.



Bien présente sur la scène internationale, l'Argentine s'impose sur tous les marchés des matières premières agricoles. Son agriculture, qui représente 5 % du PIB, a un fort potentiel et est très compétitive. Avec une surface agricole cinq fois supérieure à celle de la France, le pays est l'un des principaux producteurs mondiaux de céréales, de soja et de viande bovine. Le géant agricole est ainsi le dixième exportateur mondial de produits agroalimentaires.
Pays fondateur du Mercosur et partenaire du Brésil
L'Argentine est l'un des membres fondateur du Mercosur, avec le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay. Le bloc économique est, de nos jours, le quatrième en termes d'échanges. Historiquement tournée vers ses voisins, l'Argentine est proche du Brésil, principal partenaire commercial. Mais les relations entre les deux pays peuvent parfois se tendre et les marchés s'en ressentir. À titre d'exemple, depuis le 13 mars, le Brésil est secoué par une tempête politico-judiciaire. L'actuelle présidente du pays, Dilma Rousseff, est accusée de blanchiment d'argent. Affaiblie par l'oppostion, 68 % des Brésiliens réclament sa destitution. Ce scandale a provoqué une hausse de 6,6 % de la bourse de São Paulo le 17 mars. « Les investisseurs ont l'air de miser sur le fait que Dilma et son parti vont perdre le pouvoir», explique David Rees, économiste pour Capital Economics. Face à l'instabilité de son environnement proche, l'Argentine accorde une attention particulière au Mercosur, en essayant de se rapprocher davantage de l'UE dans le cadre des pourparlers actuels sur un accord de libre échange. Avec l'arrivée à la présidence de Mauricio Macri, le 10 décembre 2015, qui a décrété la suppression des taxes sur les exportations de blé (à l'origine 27 %) et de maïs (20 %) et la diminution des taxes sur le soja de 5 % chaque année, la politique commerciale extérieure libérale de l'Argentine la met en premier plan du marché international. L'UE, le premier partenaire commercial du Mercosur, représente 19,8 % du volume total des échanges du bloc avec le reste du monde, soit près de 110 Md€ en 2013.
Des négociations avec l'UE
En 2000, l'UE et le Mercosur avaient engagé des négociations en vue d'un accord d'association fondé sur trois piliers : le dialogue politique, la coopération et le commerce. Les négociations ont été suspendues en 2004 en raison de divergences fondamentales concernant le volet commercial. En mai 2010, elles ont repris et sont toujours en cours. L'objectif est de négocier un accord commercial global qui couvre notamment le commerce des produits industriels et agricoles.
L'Argentine est un géant agricole à fort potentiel, très compétitif, dont l'agriculture est un moteur pour l'économie.
Cependant, ces négociations avec le Mercosur laissent la filière agricole de l'UE suspicieuse. Le Copa-Cogeca fait remarquer que l'agriculture européenne est engagée dans la lutte contre le changement climatique, et qu'il serait donc « tout-à-fait incompréhensible de relancer des négociations avec des pays dont le bilan carbone, serait moins positif (que celui de l'UE) » À cela s'ajoute le contexte de crise agricole qui touche actuellement l'Europe. Ils sont neuf États membres à appeler la Commission européenne à « la plus extrême prudence » lors de l'échange d'offres d'accès au marché. Selon eux, Bruxelles ne doit pas inclure dans sa proposition les produits agricoles « sensibles » que sont les viandes et ” les fruits et légumes, notamment. Et ce, au risque de se « priver de marges de négociation ». Et la France d'enfoncer le clou : « Une telle offre européenne serait susceptible d'être perçue comme une provocation par le secteur agricole européen et d'avoir un effet en chaîne sur l'ensemble des négociations commerciales avec les États-Unis (TTIP). »
Hausse de la production agricole de 50 % en 2020
Toujours est-il que l'Argentine a lancé un Plan stratégique agroalimentaire et agro-industriel 20102020. Il s'agit d'augmenter la production agricole de 50 %. Limiter les émissions de GES, développer les semis directs et l'agriculture de précision, tout en développant les outils de première transformation, font partie des objectifs ambitieux de ce programme. Dans ce cadre, l'Argentine montre au monde entier qu'elle souhaite maintenir l'UE comme client, tout en diversifiant ses débouchés et ses produits vers les pays émergents.
Quasiment inexistant il y a trente ans, le soja est aujourd'hui l'un des piliers de l'économie du pays, plaçant l'Argentine au troisième rang des producteurs mondiaux, avec près de 55,5 Mt de graines produites en 2014, derrière les Étas-Unis et le Brésil. La vingt-quatrième puissance mondiale est le premier exportateur de produits dérivés du soja. Elle est aussi le quatrième producteur et le premier exportateur de biodiesel issu du soja. La France a acheté sur la campagne 2014/2015 1.393 t de maïs, 176.239 t de tourteaux de soja et 798 t de tournesol. L'UE a, quant à elle, importé 576.192 t de colza, 141.563 t de soja et 255.196t de tournesol. Les achats de produits dérivés sont plus représentatifs, avec 513.033 t de tourteaux de colza, 907.386 t de soja et enfin 252.015 t de tournesol.