Transport de marchandises
La relance du rail passe par le développement des OFP
La mise en place de ces opérateurs ferroviaires de proximité est, entre autres, freinée par un manque de moyens financiers.
« La création d’opérateurs ferroviaires de proximité, même si leur concrétisation ne va pas sans difficultés, reste un des fils de l’action du gouvernement en faveur du rail », a assuré le Secrétaire d’Etat chargé des transports, Thierry Mariani, dans son discours de clôture de la journée consacrée aux opérateurs ferroviaires de proximité, organisée le 7 juin à Paris par Objectif OFP. Intitulée “Les OFP aujourd’hui, gadgets ou contribution à la solution de la crise du fret ferroviaire français ?”, cette rencontre a permis d’étudier, sous forme d’exposés et de débats, l’état du fret ferroviaire en France et en Europe, l’avancement de la création des OFP dans les territoires et les ports français et les évolutions indispensables pour en permettre le développement rapide sur des bases économiques pérennes.
Effondrement du fret ferroviaire français
« La France ne peut se résigner à voir une partie de ses territoires coupés de l’Europe ferroviaire (...) Elle ne peut non plus se résigner à la faiblesse ferroviaire des ports français alors que leurs concurrents de l’Europe du Nord et le port de Barcelone sont dotés ou se dotent de liens ferroviaires performants avec leur hinterland », a indiqué Objectif OFP lors de sa contribution à la table ronde “Lever les freins au développement du ferroviaire”, présidée par Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre des Transports, et Thierry Mariani, le 31 mai.
Cette situation résulte du « désengagement de l’opérateur dominant du marché (à savoir Fret SNCF, ndlr) des envois par lots de wagons, le “wagon isolé” », explique l’association. Cette appellation ferroviaire générique, plus technique que commerciale, englobe tous les envois non traités par train entier mono-client. « Elle occulte la grande diversité des marchés et des opportunités que l’économie du développement durable ouvre au rail », regrette Objectif OFP.
Cependant, « l’effondrement du fret ferroviaire français n’est pas inéluctable », insiste l’association. La non rentabilité du rail français est la conséquence de « son enfermement dans un modèle industriel et commercial qui a eu son efficacité, mais ne répond plus au marché actuel ». Elle appelle un modèle plus décentralisé, à l’image de l’organisation mise en place avac succès par l’Allemagne. « Plus d’une centaine d’opérateurs, souvent de petite taille, maillent d’initiatives le territoire allemand, effectuant 25,5 % d’un trafic passé de 2002 à 2010, de 72,3 Gtk (giga tonne kilomètre, unité de transport du fret, ndlr) à 107,2 Gtk, pendant qu’en France il chutait de 50 à 30,1 Gtk », illustre Objectif OFP. Ce constat est à l’origine de l’idée d’opérateurs ferroviaires de proximité, à l’instar des short lines nord américaines ou des opérateurs locaux allemands, qui sont un des facteurs du dynamisme ferroviaire fret de ces pays.
Une reprise sous conditions
L’accès des OFP à des matériels de traction anciens, amortis, très adaptés à leurs besoins et leurs contraintes économiques de démarrage, est cruciale. « Il y a grande urgence, car ces matériels, détenus par SNCF Geodis, inutilisés, sont en voie de ferraillage », alerte l’association. De fait, l’aide nécessaire au démarrage d’un OFP est modeste, de l’ordre d’un million d’euros. « Quelques dizaines de millions d’euros, répartis sur quelques années, permettraient de renouveler radicalement le paysage ferroviaire français », affirme l’association. « Aussi le soutien de l’Etat à la création d’OFP est-il déterminant », insiste Objectif OFP, qui remettra sous peu à la ministre des Transports un document listant les freins opérationnels et les axes de solutions possibles à la création d’OFP.
De son côté, le Secrétaire d’Etat aux Transports a déclaré aux professionnels présents à la Journée OFP du 7 juin : « Je veillerais à ce que vos propositions soient examinées par les services de l’Etat dans un esprit positif et constructif. En particulier pour celles qui concernent l’accès des OFP à des matériels anciens, amortis. » Et d’ajouter : « Concernant les aides qui engageraient les finances publiques, vous ne serez pas étonnés que ma réponse soit d’une grande prudence. (...) Je ne peux que vous conseiller d’adopter une démarche pragmatique, proposant des modalités d’aides dont l’effet de levier est importatnt et avéré sur le report modal et sur la productivité du mode ferroviaire. »
Car, malgré la crise économique qui a effecté très fortement l’activité des transports de marchandises –et en particulier le mode ferroviaire– les objectifs du Grenelle de l’Environnement de porter la part des transports alternatifs à la route de 14 % à 25 % à l’horizon 2022 demeurent d’actualité. Cependant, depuis 2009 où le cadre juridique des OFP a été établi, « seulement 4 OFP sont engagés avec des degrés d’avancement différents, et 15 projets sont en cours en France aujourd’hui », précise Jacques Chauvineau, président d’Objectif OFP. On est bien loin des 130 entreprises allemandes licenciées dans le transport de marchandises. Il faut dire que le marché ferroviaire outre-Rhin a été ouvert à la concurrence en 1994, soit une quinzaine d’années avant le nôtre.