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Bioénergies
La marge de croissance des carburants verts ne serait pas entamée par la crise

La production de bioéthanol par les États-Unis se maintiendrait. Le biodiesel brésilien et argentin se développerait au détriment de l’origine UE.

« LA RÉCESSION économique peut-elle remettre en cause le développement des agrocarburants ? » C’est à cette question qu’Olivier Gross du négoce en produits agricoles Commosupply a tenté de répondre à l’occasion de la journée de débats Vigie Matières premières qui s’est déroulée le 15 novembre à Paris. Après avoir passé en revue les principaux producteurs de biocarburants planétaires, l’opérateur considère que « si l’on peut prévoir un possible arrêt des subventions aux biocarburants pour des raisons budgétaires, une baisse de leur production à l’avenir n’est pas envisageable ».

Le bioéthanol américain sur la sellette
Si l’on analyse le bilan américain du maïs pour la campagne 2011/2012, il s’avère que le ratio stocks/utilisations (7,6 %) n’a jamais été aussi bas, malgré une réduction du “Feed” et des exportations, qui ont atteint « des chiffres historiquement faibles », commente Olivier Gross. Le dernier poste ajustable reste la production de bioéthanol, qui certes a diminué d’une campagne sur l’autre mais est resté inchangé lors de la révision du bilan en novembre. Pour l’analyste de marché, « la production d’éthanol n’augmente plus, on se dirige vers un plateau ». Et avec l’arrêt des subventions américaines au 1er janvier 2012 pour les mélanges éthanol/essence qui sont en partie exportés vers le Brésil et l’Union européenne, il ne voit pas « une explosion à venir de la demande d’éthanol ». Quant à une substitution du maïs par le blé, le « phénomène restera marginal » car les usines américaines n’ont pas la souplesse des unités européennes quant à la matière première utilisable.
Concernant le Brésil, tant que le prix du sucre cotoie les sommets, le pays produit davantage d’“or brun” que d’“or vert” à partir de sa canne à sucre, quitte à importer de l’éthanol américain. Cependant, la chute du prix mondial du sucre ces derniers mois pourrait changer la donne. Quant au biodiesel, la hausse en 2012 du taux d’incorporation obligatoire dans le gazole en Argentine (de 7 à 9 %) et au Brésil (de 5 à 7 %) va soutenir sa production au détriment des « surplus exportables d’huile de soja ». De plus, la production argentine de biodiesel – dans laquelle « l’actuelle présidente détient des intérêts » – ne peut que prendre de l’ampleur, porté par des exportations non taxées sur l’UE.

Le biodiesel de colza européen « protégé »
Cette situation met à mal les usines espagnoles, qui ne peuvent rivaliser avec « le biodiesel argentin, de qualité satifaisante à un prix imbattable ». Un Européen ne peut en effet « produire de biodiesel à partir de soja à un prix plus bas à cause de la taxation » communautaire des biocarburants. Les producteurs français et allemands de biodiesel issu de colza (voire tournesol) sont « protégés », l’incorporation de biodiesel de soja et de palme ne pouvant se faire que dans « des limites techniques ». De plus, la législation oblige les industriels européens à « prouver que leurs biocarburants sont produits à partir de matières premières durables », d’où l’utilisation privilégiée du colza européen « plus facilement traçable » que les soja et palme.
Or cette année, le bilan européen en colza est très tendu, en raison d’une production catastrophique en Allemagne. « Dans l’UE à 27, les objectifs de production de biocarburants ne seront atteignables que par l’importation de graines, huiles ou biocarburants », explique Olivier Gross. D’autant plus que la production de biodiesel européen à base de colza est en baisse pour la deuxième année consécutive.
Pour l’heure, en France, sans l’afflux de graines de colza ukrainiennes et dans l’attente du canola australien qui ne sera disponible qu’au premier trimestre 2012, « certaines usines profitant de bonnes marges de trituration sont passées au tournesol ». Mais, assure le négociant agricole, « on devrait atteindre notre objectif de production de biodiesel issu de colza cette campagne ».

Le volume mondial de biocarburants ne peut que croître à l’avenir
« Récession ou pas, on continuera à produire des biocarburants dans l’UE pour répondre aux objectifs communautaires, conclut Olivier Gross. D’autant plus que l’on possède des capacités non utilisées en Europe. » Autre argument qui plaide en la faveur du développement cette fois planétaire des biocarburants : la décision prise par certains pays de réduire voire de sortir du nucléaire, suite au tragique accident nucléaire de Fukushima au Japon. Ce désengagement ne pourra se réaliser qu’en augmentant la part « du pétrole et du gaz (aux disponibilités limitées car fossiles, NDLR) et celle des biocarburants liquides, facilement transportables sans grands risques », contrairement aux autres énergies renouvelables qui peinent à se développer à l’échelle mondiale.
Malgré une croissance exponentielle depuis une décennie, les agrocarburants ne représentaient en 2010 que 2,7 % de l’ensemble des énergies destinées aux transports routiers mondiaux. Aussi leur marge de croissance reste-t-elle considérable.

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