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Exportation
J.-P. Langlois-Berthelot : « A-t-on le droit de limiter notre production ? »

À l’occasion de la matinée d’information et d’échanges de France Export Céréales qui aura lieu le mercredi 11 mars à Paris, La Dépêche/Le Petit Meunier vous propose un dossier introductif aux débats qui s’y tiendront. Au menu, l’interview des dirigeants de France Export Céréales, suivie des analyses des responsables de ses bureaux à l’étranger.

Que retenez-vous de l'orientation donnée à l'agriculture par le gouvernement ?

Jean-Pierre Langlois-Berhelot : Une agriculture plus durable ne pose problème à personne, mais nous avons le sentiment que la priorité gouvernementale n'est pas d'alimenter les marchés mais plutôt de répondre aux attentes de la société, comme le respect de l'environnement. Certains discours sont en décalage avec la réalité des en-jeux mondiaux. Si les dernières déclarations de François Hollande ne sont pas restrictives pour les exportations agricoles, côté ministériel, la production ne semble pas être la priorité. L'important semble être l'environnement et la santé des consommateurs. Enfin, surtout des consommateurs français, car on se moque bien de celle des autres habitants de la planète, qui pour certains meurent de faim. Certaines populations ont besoin d'acheter des matières premières, avec pour seul objectif d'atteindre un certain niveau de calorie par jour. Pour une partie d'entre elles, l'alimentation dépend du blé, notamment dans le bassin méditerranéen. Quand on a la chance d'avoir une production régulière de céréales chaque année, avec en face des besoins en hausse constante, a-t-on le droit de limiter notre production ? Sans parler de la réaction de nos voisins de l'UE ? L'exportation de céréales est bénéficiaire en France. Mais pour pouvoir exporter, il faut des matières premières et donc favoriser la production. De plus, ce positionnement de fournisseur de céréales pour certains pays comme l'Égypte (près de 2 Mt exportées cette année) est formidable pour la France. C'est ce décalage entre la réalité et certaines positions affichées par le gouvernement qui nous interpelle.

Ce discours pour une agriculture plus durable, qui n'est pas nouveau, inquiète-t-il réellement vos clients ?

J.P.L.B. : La question qui revient le plus est de savoir si notre pays continuera de produire et à approvisionner le marché. Dans les pays francophones, les orientations politiques françaises sont interprétées comme une volonté de faire monter les prix en asséchant le marché.

Quel bilan peut-on faire de cette campagne particulière ? François Gâtel : Malgré un début de campagne marqué par de fortes craintes pour l'export (la qualité perçue ne correspondant pas aux exigences de nos clients), les ventes vers pays tiers ont augmenté les semaines passant. D'abord, grâce au travail réalisé par les OS pour identifier les qualités et pour les améliorer, rattrapant le faible temps de chute de Hagberg de certains lots de blé. Ensuite, nous avons découvert qu'il existait un marché du blé fourrager, loin de la vision traditionnelle du marché en France. Certains blés présentaient de bonnes caractéristiques pour l'alimentation animale mais pas pour la meunerie, ce sont de vrais blés fourragers. Ainsi nous avons pu vendre en Europe, mais aussi vers des destinations improbables comme les États-Unis, la Turquie ou le sud-est asiatique (Japon, Corée du Sud, Bengladesh). Au global, on fera entre 0,5 et 1 Mt hors UE sur la campagne. Enfin, la baisse de l'euro combinée à un fret peu cher a joué en notre faveur. Autre élément non négligeable, la crise entre la Russie et l'Ukraine et les mesures de restriction des exportations, même si les exportations de janvier étaient élevées côté russe. Mais pour les importateurs, cette origine est moins fiable, avec un risque de défaillance au moment de la livraison, sans garantie de trouver des volumes sur le marché mondial.

Finalement, l'export français s'en est bien sorti cette année au regard de la récolte…

J.P.L.B. : Pour les volumes oui, même si on ne reproduira pas la performance de l'an denier. Cette récolte 2014 devrait être vendue mais les prix bas affectent les exploitations. Elle a toutefois eu un effet pédagogique fort, sur l'impact de la qualité sur le débouché. Nous basculons d'une situation où l'on avait un tas de blé à vendre à une autre où l'on tient compte des exigences qualitatives et de prix des clients. Je pense que la prise de conscience est réelle, au moins au niveau collectif. Pour autant, les producteurs ont privilégié des variétés de blés panifiables pour la prochaine récolte, ne pariant pas sur le débouché fourrager, bien moins rémunérateurs si l'on se réfère uniquement aux prix.

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