Industrie du biodiesel : l’Inra cherche à valoriser le glycérol
Les chercheurs de l’Inra sont en train de travailler sur la valorisation d’un sous-produit de l’industrie du biodiesel, le glycérol, devenu excédentaire sur le marché mondial.
LES HUILES VÉGÉTALES servent de matière première à l’élaboration de nombreux produits lipidiques d’intérêt industriel : tensioactifs, détergents, lubrifiants. Comme le précise le communiqué de l’Inra (Institut national de la recherche agronomique), ce sont des ressources renouvelables et souvent biodégradables, au contraire des dérivés du pétrole. Cependant, la transformation des huiles végétales libèrent de grandes quantités d’un sous-produit : le glycérol. En trouvant un débouché à ce sous-produit, les chercheurs de l’unité mixte de recherche “chimie agro-industrielle” de Toulouse renforcent la compétitivité des filières lipochimiques industrielles.
Un sous-produit encombrant…
Les molécules d’intérêt industriel (tensioactifs, détergents, lubrifiants, solvants,...) sont synthétisées à partir des acides gras. Or, dans les huiles végétales, les acides gras sont majoritairement combinés au glycérol sous forme de triglycérides. La libération des acides gras entraîne donc la libération conjointe de glycérol. Les quantités de glycérol libérées à l’échelle industrielle sont actuellement en excès par rapport à l’usage que l’on fait de cette molécule. Une partie du glycérol (ou glycérine) est utilisée dans les produits de beauté, les dentifrices ou bien dans les domaines phar-maceutiques et alimentaires. L’excédent est revendu, mais la cotation de ce produit s’effondre. Trouver un débouché à cette molécule est devenue une préoccupation nationale dès 1994. L’augmentation de la production de biocarburants renforce cette préoccupation puisque la production d’ester de colza génère aussi du glycérol (10 % en masse).
Dès 1992, des chercheurs de l’Inra de Toulouse ont joué un rôle de précurseur en s’intéressant à la chimie du glycérol. Ils ont identifié une molécule dérivée du glycérol, le carbonate de glycérol, dont la constitution chimique laisse présager des propriétés réactives conduisant à la création de nouvelles molécules. De fait, cette molécule est maintenant au centre d’une chimie de diversification conduisant à la création de nouvelles molécules multifonctionnelles : solvants, lubrifiants, tensioactifs...
Les chercheurs de l’Inra ont mis au point une voie de synthèse du carbonate de glycérol n’utilisant que des composés d’origine naturelle : glycérol, urée, catalyseurs minéraux tels que le sulfate de zinc. De ce fait, le carbonate de glycérol ainsi obtenu possède la qualification de molécule “écocert” qui lui confère une plus-value à l’exportation notamment au Japon et aux Etats-Unis. En effet, le carbonate de glycérol fait actuellement l’objet d’une demande mondiale.
… source de nouvelles molécules
Les bio-lubrifiants représentent actuellement 3,1% du marché européen des lubrifiants. Leur développement pourra être facilité par les propriétés particulières d’adhésion aux surfaces métalliques et de résistance à l’oxydation, à l’hydrolyse et à la pression que possèdent les bio-lubrifiants à base de carbonate de glycérol développés à l’Inra. Dans le domaine des tensioactifs, l’ambition affichée des chercheurs de l’Inra est de réaliser la construction des molécules à partir de carbonate de glycérol ou de ses dérivés oligomérisés et des acides gras provenant d’huiles végétales des zones géographiques tempérées. L’éco-compatibilité de ces ensembles moléculaires est une exigence et un résultat fortement attendu. Quant aux agrosolvants, un marché potentiel se profile en réponse à la directive 1999/13/CE visant à diminuer les émissions des composés organiques volatils (COV) réputés toxiques et polluants provenant de l’usage de solvants d’origine pétrochimique.