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Grippe aviaire : quid de l’industrie avicole ?

SELON LE DERNIER rapport du Conseil international des céréales (CIC), les estimations de production mondiale de viande de volaille publiées par l’USDA ont augmenté de 3 % en 2004 pour passer à 61 Mt (viande de poulet à rôtir et de dinde, base prêt à cuire), une hausse semblable aux dernières années malgré des épizooties de grippe aviaire généralisées. Les gains dans la plupart des principaux pays producteurs, notamment le Brésil, ont largement compensé les reculs prononcés de la production en Thaïlande et en Indonésie, deux pays particulièrement touchés par la grippe aviaire. On s’attend à des hausses légèrement plus fortes de la production mondiale, de l’ordre de 4 %, en 2005 et 2006, à un record de 65,6 Mt.

Alimentation animale

La plupart des pays ayant signalé des épizooties de grippe aviaire depuis 2004 ont affiché une tendance semblable en termes d’impact sur le marché des aliments pour animaux. Ils ont d’abord connu un recul marqué des besoins en aliments pour la volaille en raison des abattages imposés pour contrôler la maladie et de la contraction de la demande des consommateurs en viande de poulet. Mais les secteurs avicoles se sont dans l’ensemble redressés assez vite dans les régions où la maladie était effectivement maîtrisée. Ceci a été favorisé par le fait que les cycles de production de volaille sont assez brefs, de l’ordre de 8 semaines. Toutefois, la reprise a été plus lente dans des pays comme la Thaïlande, l’Indonésie, le Viet Nam et la Chine où la maladie est réapparue plusieurs fois et risque à présent d’être endémique, avec un effet plus durable sur l’utilisation d’aliments pour la volaille.

L’impact des futures épidémies de grippe aviaire, y compris dans les pays qui ne sont pas encore touchés, dépendra dans une large mesure de la gravité de l’attaque, tout particulièrement le niveau d’abattage requis pour contrôler la maladie et de l’évolution future de la maladie chez l’humain. Toutefois, il est difficile de se servir des épisodes passés comme modèles pour prédire l’impact des cas futurs en raison des craintes qu’ont soulevé les morts humaines lors de la dernière vague de la maladie, lesquelles pourraient provoquer une réaction plus violente des consommateurs. Tout impact grave à court terme sur la production de volaille, la consommation de viande et les besoins en aliments pour animaux semble être surmonté assez rapidement lorsque la maladie est rapidement maîtrisée et lorsque les craintes des consommateurs sont dissipées par des conseils officiels faisant autorité.

Dans la plupart des pays, les poulets sont essentiellement nourris à base de maïs. Ceci traduit non seulement la relation de prix par rapport aux autres céréales mais aussi la meilleure digestibilité et valeur nutritionnelle du maïs pour la volaille par rapport à l’orge et, dans une moindre mesure, au blé et au sorgho. Là où l’offre de blé est abondante et les prix compétitifs par rapport aux autres ingrédients fourragers, un atout majeur du blé pour justifier son incorporation dans les rations données aux poulets est sa teneur en protéines plus élevée que celle du maïs. Ceci fait que l’incorporation de suppléments protéiques, comme la farine de soja, peut être réduite dans les rations pour volaille qui comprennent du blé. Le blé est particulièrement important dans les aliments destinés aux poulets au sein de l’UE.

Utilisation de céréales

L’utilisation mondiale de céréales pour l’alimentation animale est estimée à 733 Mt (748 Mt) en 2005/2006, dont 458 Mt de maïs, 109 Mt de blé, 96 Mt d’orge et un total cumulé de 70 Mt pour le sorgho, l’avoine, le seigle et les autres céréales. Les aliments destinés à la volaille comptent pour environ 240 Mt, soit près du tiers du total, ceux destinés aux porcins 400 Mt, aux bovins 85 Mt et les autres 10 Mt. Les deux tiers des aliments volaille sont du maïs, soit quelque 165 Mt, l’utilisation de blé étant placée à 50 Mt, l’orge à 15 Mt et les autres céréales à 10 Mt.

Compte tenu de l’importance mondiale du maïs dans les rations destinées aux poulets, de nouvelles épizooties de grippe aviaire auront principalement une incidence sur cette céréale. Toutefois, si la maladie venait à gagner l’UE, la part du blé dans l’alimentation animale pourrait être touchée dans une bien plus large mesure ; l’UE compte pour plus de la moitié de l’utilisation mondiale de blé dans l’alimentation animale, avec une utilisation pour l’alimentation de la volaille estimée aux alentours de 20 Mt. Bien que le recul des besoins en aliments destinés aux poulets dans les pays touchés soit généralement de courte durée, des perturbations à plus long terme, là où la maladie serait récurrente, pourraient déclencher une demande accrue pour d’autres types d’aliments pour animaux, notamment, dans certains pays, pour les élevages porcins. Une réorientation globale des modèles de consommation de viande tendrait à essuyer tout recul des besoins en aliments destinés aux poulets alors que, dans les pays non touchés, l’industrie avicole pourrait bénéficier de nouveaux débouchés.

Au total, les pays ayant signalé des épizooties de grippe aviaire depuis 2003 importent environ 30 Mt de céréales pour l’alimentation animale, y compris 23 Mt de maïs, dont environ la moitié est destiné à la filière avicole. Le Japon et la Corée du Sud sont de loin les plus gros importateurs de maïs fourrager, avec respectivement 12,5 Mt et 6,5 Mt environ. Les seuls autres pays ayant des importations notables sont la Malaisie (2,4 Mt), l’Indonésie (0,9 Mt) et la Turquie (0,3 Mt), les autres n’achetant que de modestes quantités ou bien, comme dans le cas de la Chine et la Thaïlande, étant des exportateurs nets d’envergure.

A ce jour, l’impact mondial de la grippe aviaire sur la consommation de céréales fourragères a été limité par la reprise relativement rapide des secteurs avicoles une fois les épizooties maîtrisées. Toutefois, comme on a pu le voir dans plusieurs pays d’Asie, l’impact peut être plus significatif et de plus longue durée lorsque la maladie devient récurrente. L’impact potentiel de tout nouveau cas de grippe aviaire sur les marchés des céréales fourragères dépend principalement de la gravité de l’épizootie, de la rapidité avec laquelle l’épidémie est enrayée, des récurrences éventuelles et de la réaction des consommateurs. Comme on l’a déjà constaté, même en l’absence de la maladie au sein de l’UE, les secteurs avicoles peuvent être sensiblement touchés par un effondrement de la demande des consommateurs. Toute transmission significative de la maladie aux humains pourrait avoir des implications à l’échelle mondiale pour la production de volaille et pour les besoins du secteur en rations animales.

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